L’Organisation de coopération et de développement économiques ajoute un indicateur : le "vivre mieux". Chargée du projet Martine Durand explique à FRANCE 24 l’intérêt de cet indice inspiré des travaux du prix Nobel d’économie Joseph Stieglitz.
Après 50 ans d’existence, l’OCDE (Organisation de coopération et de développement économiques) a décidé de s’intéresser au "bien vivre" des citoyens de ces trente-quatre États membres. L’organisation internationale s’y est attelé avec profusion de chiffres, données et un véritable indice du "vivre mieux", lancé mardi.
Selon onze critères, tels que la qualité du logement, la vie en communauté, l’importance de la protection de l’environnement ou le système de santé, l’OCDE espère pouvoir mesurer la qualité de vie au sein des États membres. La sortie de ce nouvel indicateur s’accompagne d’une évaluation des performances pour chaque pays. On y apprend notamment que les points forts de la France sont l’environnement et le rapport entre travail et temps libre. Martine Durand, chef statisticienne à l’OCDE en charge de cet indice explique à FRANCE 24 comment ce nouvel outil complète le traditionnel PIB.
FRANCE 24 : Mesurer le "vivre mieux" est-ce vraiment possible ?
Martine Durand : L’OCDE travaille depuis de dix ans sur ce sujet. L’idée est de démontrer que le PIB n’est pas suffisant pour mesurer le bien-être des personnes. L’économiste américain Joseph Stieglitz [prix Nobel d’économie en 2001, NDLR] a remis en 2009 au président français Nicolas Sarkozy un rapport complet sur cette question. Nous nous en sommes largement inspirés, notamment en reprenant les onze critères qu’il avait retenus.
Le plus difficile a été de réunir, ensuite, pour chacun des critères des indicateurs chiffrés, précis et comparables pour chacun des pays membres de l’OCDE. C’est un travail statistique qui nous a pris neuf mois mais qui a permis de rendre chaque critère le plus objectif possible.
F24 : Il y a déjà une profusion d’indicateurs, qu’apporte un nouvel indice ?
M.D. : Avec la crise, nous nous sommes rendu compte que les individus ne considéraient pas seulement la richesse de leur pays pour savoir s’ils vivaient bien ou non. C’est pourquoi je pense qu’il y a autant d’indices du "vivre mieux" que de citoyens. Notre démarche a donc été de fournir onze critères que tout le monde peut ensuite classer, sur notre site, selon leur importance et ainsi se créer son propre indice. Les gens peuvent ensuite vérifier quel pays correspond le mieux à leur idéal de qualité de vie.
Pour autant, cet indice du "vivre mieux" n’est pas un gadget pour les internautes qui vont sur le site. Il apporte des éléments concrets de comparaison qui peuvent servir aux politiques. Au-delà du PIB, les gouvernements peuvent ainsi regarder ceux qui font mieux dans tel ou tel domaine et ensuite s’inspirer des politiques dans ces pays pour s’améliorer.
F24 : Comment l’OCDE compte-t-elle se servir de ce nouvel outil ?
M.D. : À l’instar de rapports périodiques sur l’évolution économique des pays, nous comptons dorénavant publier, à intervalle régulier, un panorama de la qualité de vie dans les pays membres de l’OCDE, fondé sur cet indice. Les critères retenus vont par ailleurs probablement évoluer. Certains, comme l’environnement, doivent encore être affinés. Et puis nous espérons pouvoir l’élargir à des pays émergents afin de montrer qu’il y a une réalité au-delà de la croissance du PIB.
Enfin, au fur et à mesure que les internautes soumettront leur propre indice, cela nous permettra de mieux comprendre ce qui est important aux yeux des citoyens et ainsi nous pourrons davantage focaliser nos recherches dans ces domaines.
Crédit photo : The Infamour Gdub/Flickr