logo

Le "tout-faux" de José Mourinho

Après le match Real Madrid-FC Barcelone (0-2), mercredi, José Mourinho s'en est pris à la terre entière pour justifier la défaite de son club. Maîtrisant habituellement l'exercice de la conférence de presse, l'entraîneur a, cette fois-ci, dérapé.

Mercredi, en demi-finale de la Ligue des Champions, José Mourinho, le génie de la théorie footballistique, est redevenu un simple mortel. Face au FC Barcelone, l’entraîneur portugais du Real Madrid a fait le pari de refuser le jeu et de muscler les débats.

Le bilan est lourd : une affiche de gala gâchée par un engagement au-delà de l’acceptable et, surtout, un suspense presque tué après la victoire du Barça par deux buts d’écart à l’extérieur (0-2).

Le barça contre-attaque

Comme évoqué en début de journée, le Barça a annoncé jeudi soir qu'il portait plainte auprès de l'UEFA contre l'entraîneur du Real Madrid José Mourinho, suite aux propos qu'il a tenus en conférence de presse mercredi soir, à l'issue de la défaite de son club en demi-finale aller de la Ligue des Champions (0-2).

Par ailleurs, l'UEFA a annoncé plus tôt l'ouverture d'une procédure disciplinaire de plus grande ampleur. La commission de discipline se penchera sur le dossier le vendredi 6 mai. José Mourinho est visé pour son exclusion et ses "déclarations inappropriées" après la rencontre.

Le Real est aussi concerné par ces enquêtes en tant que club organisateur de rencontre pour des lancers de projectiles pendant la rencontre et des intrusions sur le terrain. Le carton rouge de son joueur Pepe sera aussi examiné.

Barcelone est également dans l'oeil du cyclone après le carton rouge infligé à José Pinto, son gardien remplaçant. (avec AFP)

En dix ans de carrière, ce camouflet constitue probablement l’échec le plus retentissant de "Mou". Défait par son rival historique puis expulsé pour avoir protesté contre un carton rouge infligé à son milieu de terrain Pepe à la 62e minute, le théoricien madrilène a vécu une soirée cauchemardesque.

Théorie du complot

On savait Mourinho amateur de bons mots. Mais face à la victoire du "beau jeu", l’esthète du tableau noir a dérapé. En conférence de presse, il a tout de même reconnu que le Barça était "une équipe fantastique".

Mais la révérence était trop belle. Après avoir ouvertement fustigé les choix de l’arbitre du match, M. Stark – à tort ou à raison – "Mou" s’est livré à une diatribe généralisée : "J'ai juste envie de demander : Pourquoi ? Pourquoi M. Ovrebo, M. Busacca, M. Stark ? À chaque demi-finale, il se passe la même chose. […] Pourquoi Chelsea n'est pas passé ? Pourquoi l'Inter est passé miraculeusement ? Je ne comprends pas. […] Je ne sais pas si c'est à cause de la publicité de l'Unicef (sur le maillot du Barça, NDLR) ou à cause des amitiés de Villar (le président de la Fédération espagnole, NDLR) à l'UEFA, dont il est le vice-président. Je ne sais pas si c'est parce qu'ils sont si gentils, mais ils disposent d'un grand pouvoir. Nous, les autres, n'avons aucune chance."

Le technicien portugais s’en est également pris ouvertement à son homologue catalan, Josep Guardiola, avec qui il avait déjà eu quelques passes d’armes ces dernières semaines : "Guardiola est un fantastique entraîneur mais il a gagné une Ligue des Champions d'une manière qui m'aurait posé problème, après le scandale de Stamford Bridge (contre Chelsea en demi-finale de l’édition 2009). […] Et cette année, s'il la remporte à nouveau, ce sera après le scandale de Bernabeu. […] À la place de Guardiola, j’aurais honte…"

Écran de fumée

Dans la conférence d’avant-match, Pep Guardiola, excédé par les piques habituelles de son homologue, avait déclaré à son endroit : "Tu es le putain de chef, le putain de maître de cette salle. Je ne peux pas te concurrencer dans ce domaine."

Le processus de victimisation systématique employé par Mourinho depuis des années l’a souvent servi. Il est passé maître dans l’exercice de la conférence de presse et ses sorties acerbes ont contribué à forger sa légende, au même titre que son incontestable science du jeu.

Mais cette fois, l’écran de fumée est trop gros. Le costume de polémiste endossé mercredi soir par le technicien du Real n’était pas taillé pour le contexte. Face à la défaite subie, Mourinho a pris l’ensemble de la planète football à parti. Et si les décisions de M. Stark sont éventuellement contestables, si la propension du Barça à bénéficier de largesses arbitrales peut évoquer un embryon de doute chez ses adversaires directs, il est un fait notable que Mourinho a omis de signifier.

Mercredi soir, devant son public, le Real Madrid a failli. Il a délaissé le ballon, laissé les clés du jeu à son adversaire du soir et refusé la confrontation.

Et Mourinho peut énoncer tous les corollaires qui lui viennent, c’est dans cette faillite collective que se trouve l’explication première de cette déconfiture. Le simple fait qu’il n’ait pas évoqué ce point porte un coup certain à la crédibilité de celui qui reste, malgré tout, le meilleur tacticien du football moderne.