Le Costa Rica n’a pas d’armée depuis plus de 60 ans. Avec l’argent économisé, l’éducation et la santé sont gratuites pour tous. Mais aujourd’hui, ce pari politique se fissure : tensions avec le Nicaragua, passage des convois de drogue vers le Mexique... les policiers costaricains sous-équipés ne peuvent plus assurer la sécurité du pays.
En octobre dernier, un petit avion s'écrase à quelques kilomètres de San José, la capitale du Costa Rica. A son bord, deux Mexicains… et 350 kg de cocaïne. Si le moteur n'avait pas eu d'avarie, l'appareil aurait survolé le pays sans être inquiété.
Les images de l'accident ont mis sous les yeux des Costaricains une réalité que le petit pays cache derrière une image de paradis touristique : les convois de drogue transitent par le territoire, et irriguent au passage le marché local.
Sans armée, et avec seulement 0,3% du budget national consacré aux forces de police, le Costa Rica ne peut pas assurer la surveillance de ses frontières. D'autant plus qu'elles sont tracées en pleine jungle, avec le Panama au Sud et le Nicaragua au Nord.
Symptôme de ce manque de préparation : lorsque l'armée nicaraguayenne a envahi une portion du territoire costaricain sans préavis, ce fut l'affolement à San José : "ll a fallu apprendre en urgence à nos policiers à se servir de mitraillettes !...", se souvient José Maria Tijerino, le ministre de la Sécurité publique.
Depuis les années 1970, la drogue qui remonte de la Colombie vers les Etats-Unis fait escale en Amérique Centrale. Mais jamais la situation n'a été aussi critique pour ces petits pays, mal préparés pour repousser l'extension des cartels de la drogue sur leur territoire. Depuis dix ans, les efforts des gouvernements colombien, puis mexicain, pour combattre le narcotrafic, n'ont eu pour effet que d'en changer la géographie. D'après les autorités américaines, 84% de la cocaïne voyageant vers les Etats-Unis aurait fait étape en Amérique centrale en 2010, contre 44% en 2008.
L'année dernière, le Costa Rica a rejoint la liste des vingt pays désignés par les États-Unis comme "principaux pays de production ou de transit de drogues illicites".
Les cartels mexicains savent comment s'implanter dans ces terreaux déjà bien préparés : ils recrutent des gangs locaux et les paient avec de la drogue. Le crack en particulier, se répand à une vitesse fulgurante, aidé par un prix de vente défiant toute concurrence : un dollar la dose...
Au Mexique, les cartels de la drogue disposent d'armes plus puissantes que celles de la police. Un fait qui justifie, selon le président mexicain Felipe Calderòn, la présence de l'armée dans les rues... Mais quid du Costa Rica? La gangrène de la violence liée au narcotrafic continue de gagner du terrain… et ce petit pays littéralement "sans défense" a bien du mal à l’affronter.