Selon l'Autorité de sûreté nucléaire française, la sécurité des installations nucléaires de l'Hexagone n'a pas été étudiée pour faire face à une série de catastrophes naturelles en chaîne comme le Japon en a connu.
AFP - La France doit retenir la leçon du drame de Fukushima et s'assurer que ses centrales nucléaires sont capables de résister au "cumul" de plusieurs catastrophes naturelles, une éventualité qui n'a encore jamais été prise en compte, a reconnu mercredi l'Autorité de sûreté nucléaire.
"A l'évidence, il va falloir qu'on se demande quels retours d'expérience il y a à tirer de ce qui s'est passé au Japon", a lancé le président de l'ASN, André-Claude Lacoste, après avoir présenté au Parlement un rapport sur l'état de la sûreté nucléaire et de la radioprotection en France en 2010.
"Nous ne sommes pas nourris de certitudes tranquilles, d'ailleurs qui peut l'être après ce qui vient de se passer ?", a-t-il lancé.
L'ASN, autorité indépendante de contrôle du nucléaire civil, a toujours dit, avant même l'accident, que "personne ne pourra jamais garantir qu'il n'y aura jamais d'accident nucléaire en France", a rappelé M. Lacoste.
Certes, le ministre de l'Industrie, Eric Besson, avait assuré au lendemain de Fukushima que "toutes les centrales françaises ont été conçues en intégrant le risque sismique et le risque inondation".
"On n'attend pas un accident au Japon pour se poser la question chez nous", avait même rétorqué M. Besson à ceux qui s'inquiétaient de la possibilité d'un accident similaire en France.
Ces risques ont bien été pris en compte, mais pas la conjonction de plusieurs catastrophes naturelles frappant un même site nucléaire au même moment, comme ce fut le cas au Japon, a précisé M. Lacoste devant l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et techniques (Opecst).
A Fukushima, un séisme d'une rare puissance suivi de peu par un tsunami a privé la centrale de son alimentation électrique externe et de son système de refroidissement, entraînant une série de graves dysfonctionnements sur plusieurs réacteurs.
"Comment faire face à un cumul d'aggressions de ce type ? C'est un sujet que jusqu'à présent on n'a pas pris en compte", a reconnu le président de l'ASN.
Raison pour laquelle le Premier ministre, François Fillon, a chargé la semaine dernière l'Autorité de procéder à un "audit" de toutes les installations nucléaires de France, à commencer par ses 58 réacteurs, le deuxième parc nucléaire au monde qui lui fournit plus de 75% de son électricité.
Risques sismiques, risques d'inondations, perte d'alimentation électrique, perte de source de refroidissement ainsi que le cumul de ces aléas: la revue générale doit prendre en compte les nouveaux risques révélés par l'accident de Fukushima et en tirer les conséquences, a précisé M. Lacoste.
Par exemple, "on peut imaginer la création d'un parc de secours de diesels sur l'ensemble des installations nucléaires en France" ou que, "sur des centrales installées le long de la côte, les diesels soient plutôt installés sur la falaise qu'en bas".
"Ca paraît extrêmement rustique mais c'est typiquement le genre de questions à se poser", a expliqué le président de l'ASN.
L'audit mené par l'ASN portera aussi sur la "gestion de crise" par les autorités en cas d'accident.
Constatant que l'évacuation de la population dans un rayon de 20 km autour de la centrale de Fukushima avait bien fonctionné, M. Lacoste s'est interrogé à voix haute: "serions-nous capables d'assurer quelque chose de ce genre en France? C'est un sujet qu'il faut que nous regardions avec le ministère de l'Intérieur et la Sécurité civile".
Les premières conclusions de l'audit devraient être rendues publiques pour la fin de l'année.