Malgré les négociations sur une sortie de crise politique, la coalition internationale maintient la pression sur le régime de Mouammar Kadhafi. Vendredi soir, les rebelles semblaient avoir en partie infiltré la ville stratégique d'Ajdabiya.
AFP - La coalition internationale maintenait samedi la pression militaire sur le régime libyen du colonel Mouammar Kadhafi, tout en commençant à chercher une issue politique à une opération qui risque de s'enliser.
La coalition a mené des raids vendredi soir et dans la nuit sur la ville de Zliten à 160 km à l'est de la capitale, sur la région d'Al-Watia (ouest) et a bombardé un site militaire à Tajoura, dans la banlieue est de Tripoli, selon la télévision libyenne et un témoin.
"Le quartier a été secoué par trois explosions successives. Des vitres de fênetres ont éclaté. Le raid a visé un site militaire de radars qui est toujours en feu", a indiqué un habitant de Tajoura, dont la maison est située à 300 mètres de la cible atteinte.
Plusieurs sites militaires sont situés dans cette banlieue est de la capitale, visée quotidiennement par les raids de la coalition depuis le début, le 19 mars, de ses opérations en Libye.
La télévision nationale a indiqué plus tôt que "des sites civils et militaires à Zliten avaient été la cible de bombardements de l'agresseur croisé colonialiste"
La région d'Al-Watia qui abrite une base militaire, a été également la cible de "missiles de longue portée", a ajouté la télévision.
Vendredi le régime libyen s'est dit prêt à accepter un plan de l'Union africaine (UA) qui propose la cessation des combats et l'ouverture d'un dialogue entre Libyens en préalable à une "transition" démocratique.
"Nous sommes prêts à mettre en oeuvre la feuille de route" envisagée par l'UA, y compris "la mise en oeuvre d'une politique qui réponde aux aspirations du peuple libyen de façon pacifique et démocratique", ont affirmé les membres d'une forte délégation gouvernementale lors d'une importante réunion de l'UA à Addis Abeba, où aucun représentant de la rébellion n'était présent.
A l'approche d'un sommet prévu mardi à Londres, le président français Nicolas Sarkozy a quant à lui annoncé "une initiative franco-britannique" en vue d'une solution politique au conflit "pour bien montrer que la solution ne peut pas être que militaire".
Quelques heures plus tôt, le chef d'état-major français, Edouard Guillaud, avait déclaré que les opérations militaires allaient vraisemblablement se prolonger des "semaines".
itAu cours des dernières heures, des chasseurs-bombardiers de la coalition ont mené des raids à Adjabiya, où sont retranchés des soldats pro-Kadhafi.
Les rebelles en ont profité pour reprendre l'offensive et pénétrer dans ce gros bourg stratégique à 160 km au sud de Benghazi, fief de l'opposition.
Des dizaines d'habitants ont continué à fuir les combats. "Jusqu'ici, on tenait le coup, mais là ce n'est plus possible", a raconté Mansour Zaqzaq. "Nous avons des voisins qui n'ont pas de voiture, eux sont prisonniers".
Les partisans de Kadhafi ont continué vendredi pour leur part à pilonner Misrata, à 200 km à l'est de Tripoli, selon un témoin, qui a précisé qu'une mère et ses quatre enfants avaient été tués. Jeudi, un médecin de l'hôpital de Misrata avait fait état de 109 tués et 1.300 blessés en une semaine dans cette ville.
"Les bombardements aveugles à l'artillerie se poursuivent depuis jeudi soir, ils tirent sur tout (...). Il n'y a pas d'électricité, pas d'eau et tout commence à manquer dans la ville", a raconté le témoin par téléphone.
Les Etats-Unis ont annoncé avoir tiré 16 Tomahawks contre des cibles libyennes au cours des 24 dernières heures. Les avions de la coalition ont effectué 153 sorties: 67 pour les appareils américains et 86 pour les pays participants à la coalition, (France, Royaume-Uni, Canada, Italie, Espagne, Belgique, Danemark et Qatar).
Selon le vice-amiral américain Bill Gortney, "Kadhafi n'a quasiment plus de défense anti-aérienne (...). Son aviation ne peut plus voler, ses navires restent au port, ses dépôts de munitions continuent d'être détruits, les tours de communications sont abattues, ses bunkers de commandement inutilisables".
Un responsable du ministère libyen de la Santé a affirmé que les raids internationaux ont fait au moins 114 morts, essentiellement à Tripoli et dans sa banlieue, et 445 blessés de dimanche à mercredi.
A Benghazi, des milliers de personnes se sont rassemblées pour la prière du vendredi, défendant ardemment les frappes aériennes.
L'imam Wanis al-Mabruk al-Fisay a remercié les pays de la coalition et assuré qu'il ne s'agissait pas d'une "guerre chrétienne". "Les avions protègent nos femmes et nos enfants à notre demande", a-t-il insisté.
Concernant la conduite des opérations, les pays de l'Otan ont conclu jeudi un compromis laborieux: ils vont prendre dans l'immédiat le relais de la coalition pour la zone d'exclusion aérienne, mais pas tout de suite pour les frappes au sol.
Des négociations doivent se poursuivre dimanche, pour que l'Otan prenne bientôt toutes les opérations en main.
Le général canadien Charles Bouchard a été nommé à la tête des opérations de l'Alliance en Libye.
Le président américain Barack Obama a tenu une conférence téléphonique vendredi pour consulter les principaux responsables du Congrès afin de leur fournir un état des lieux des efforts de la coalition internationale en vue de protéger les populations civiles en Libye contre les forces du régime, selon la Maison Blanche.
Le colonel Kadhafi, au pouvoir depuis près de 42 ans, fait face depuis le 15 février à une révolte qui a fait des centaines de morts et poussé plus de 300.000 personnes à fuir.