
10 jours de grève générale, plus de 10 000 manifestants dans les rues de Pointe-à-Pitre vendredi, et des stations services à sec : le mouvement de protestation grandit en Guadeloupe et paralyse l'île.
Plusieurs milliers de personnes ont manifesté vendredi matin dans les rues de Pointe-à-Pitre à l'appel du LKP, le "Collectif contre l’exploitation outrancière" à l'origine de la grève générale qui paralyse l'île depuis le 20 janvier.
Cette manifestation a rassemblé au moins 12.000 personnes selon la police, environ 18.000 selon l'estimation d'un journaliste de l'AFP sur place.
"La Gwadloup sé tan nou, la Gwadloup a pa ta yo, yo péké fè sa yo vlé an péyi an nou" (La Guadeloupe nous appartient, elle ne leur appartient pas, ils ne feront pas ce qu'ils veulent dans notre pays), scandaient les manifestants.
Ils arboraient une forêt de drapeaux et de fanions des organisations syndicales membres du LKP: UGTG et CTU (indépendantistes), CGT-G, FO, CFDT, UNSA et FSU. Elles représentent 99,85 % des suffrages exprimés lors des prud'homales de novembre.
Le maire de Pointe-à-Pitre, Jacques Bangou (PPDG), est le seul élu guadeloupéen ayant pris part à cette manifestation. Des chefs d'entreprise et des membres en vue du secteur des professions libérales y ont également participé.
La rupture mercredi, suite au départ du préfet Nicolas Desforges, des négociations qui s'étaient ouvertes samedi dernier pourrait avoir apporté au LKP un supplément de soutien populaire dans ses revendications "contre la vie chère" et "pour le pouvoir d'achat".
Il réclame, entre autres dans son cahier de 146 revendications, "la baisse des prix de tous les produits de première nécessité et des impôts et taxes, la baisse "immédiate" de 50 centimes du prix des carburants, une augmentation salariale de 200 euros et le gel des loyers.
"Une centaine de mesures répondant aux attentes"
Les présidents des Conseils régional et général de la Guadeloupe, Victorin Lurel (PS) et Jacques Gillot (DVG), ont proposé vendredi soir de consacrer 54 millions d'euros pour satisfaire les principales revendications du Collectif contre l'exploitation outrancière (LKP).
Dans un document de 21 pages, ils proposent aux responsables du LKP, selon M. Lurel, "une centaine de mesures répondant aux attentes" de la population et du LKP, qui est à l'origine de la grève générale qui paralyse la Guadeloupe depuis le 20 janvier.
Parmi ces mesures figurent une réduction des taxes régionales sur le gasole (qui devrait se traduire par une baisse de 2 ou 3 centimes à la pompe), sur l'électricité et l'eau potable (de 1,5 à 1%), les produits laitiers (de 7 à 2%), une baisse de 9% de la taxe d'habitation et de 7% de celle sur le foncier bâti.
La baisse du tarif des cantines scolaires, l'augmentation des bourses régionales aux étudiants, le versement d'une prime de 150 euros "aux foyers fiscaux les plus démunis" figurent également parmi les mesures énoncées dans le document.
Plus une goutte d'essence
Le préfet de la Guadeloupe Nicolas Desforges a réclamé vendredi la réouverture dès lundi des stations-services de Guadeloupe, fermées depuis le 19 janvier en entraînant une pénurie de carburants rendant impossible la circulation automobile dans l'île.
Dans une lettre aux gérants de stations-services et aux compagnies pétrolières, le préfet les appelle "solennellement" à rouvrir.
Il estime, sans même évoquer l'autre conflit en cours avec le LKP et la grève générale "contre la vie chère" commencée le 20 janvier, que "seule cette solution, guidée par l’intérêt supérieur de la Guadeloupe, est de nature à permettre rapidement le retour à une vie normale".
Les gérants de stations-services, dont la moitié sont à l'enseigne Total (qui possède également plus de la moitié du capital de l'unique raffinerie alimentant, la SARA, les Antilles), exigent l'arrêt de toute nouvelle implantation de station-service par les trois compagnies locales de distribution qui se sont créées récemment.
Dominé par Total, notamment depuis sa fusion avec Elf, le marché insulaire de la distribution des produits pétroliers est partagé par Chevron, Exxon et Vito (ex-Shell), les trois autres actionnaires de la SARA.