logo

Aux prises avec un mouvement de contestation, les autorités du Caire ont paralysé la quasi-totalité du Web égyptien. Un seul fournisseur d'accès, Noor, parvient toutefois à assurer ses services. Explications.

Depuis jeudi soir, la quasi-intégralité (près de 90%) du Web est paralysée par les autorités égyptiennes. Mais Noor, un fournisseur d’accès à Internet (FAI), semble être passé entre les mailles du filet. Même si la connexion sur les sites hébergés reste erratique, la grande majorité des sites web hébergés par le FAI égyptien sont toujours accessibles.

Ce traitement de faveur a suscité de nombreuses réactions sur Twitter, où des internautes égyptiens avancent que le maintien des sites hébergés par Noor est le fruit d’un partenariat liant la société aux autorités du Caire. Même s’il ne s’agit pas d’une compagnie publique, Noor est l’une des figures de proue du développement technologique désiré par l’administration Moubarak et a conclu de nombreux accords commerciaux avec d’importantes entités économiques.

En août 2004, dans une interview publiée par le journal "Al-Mougaz" et reprise par la "newsletter" du fournisseur d'accès, son fondateur, Basel Dalloul, se félicitait de la réussite de son groupe, quatre ans après son lancement : "Le gouvernement égyptien m’a invité il y a cinq ans à rechercher des opportunités d’investissement, dans le cadre du projet du président Moubarak de faire de l’Égypte le ‘hub’ des technologies de l’information."

Un rouage de l'économie égyptienne

Les entreprises pétrolières Egyptian General Petroleum Company (EGPC) et ExxonMobil, notamment, utilisent les services de Noor, tout comme la Bourse égyptienne. Bien qu'il ne soit pas le leader du marché auprès des utilisateurs "lambda", Noor constitue, grâce à ces partenariats, un rouage non négligeable de l’économie du pays.

Ce déploiement stratégique, entamé par le groupe dès le début des années 2000, est le fruit du travail de Basel Dalloul. Ce dernier, qui vient de revendre Magnet Interactive Group après en avoir fait, en dix ans, un acteur respectable du secteur des nouvelles technologies, décide de répondre à l’appel du gouvernement égyptien. Son premier défi : démocratiser l’utilisation d’Internet dans un pays où le marché du Web est encore confidentiel et où l’on estime le nombre total d’internautes à moins de 500 000.

Grâce à un partenariat développé avec Telecom Egypt, Noor, fondé en 2000, propose rapidement à une grande majorité d’utilisateurs un accès basique au Web ("dial-up"), via les lignes téléphoniques de l’opérateur historique égyptien.

Un service qu’il finira par abandonner, en raison du grand nombre de licences accordées par le ministère de la Communication et des Technologies de l’information aux FAI.

Fournisseur de Coca-Cola, Toyota et Nestlé

À partir de 2004, alors que les opérateurs, à l'instar d'Orascom, s’attèlent à développer leurs services aux particuliers, Noor établit de nombreux partenariats avec les acteurs économiques du pays. Il fournit aujourd’hui un accès interne à Internet à de nombreux groupes implantés en Égypte, parmi lesquels Coca-Cola, Toyota, Renault, Mitsubishi, FedEx, Nestlé, Bristol Myers ou Lafarge.

Aujourd’hui, le parc d’internautes égyptiens s’est considérablement développé et flirte avec les 17 millions d’utilisateurs, selon l’International Telecommunication Union (ITU). Et depuis jeudi soir, les quatre principaux fournisseurs d’accès à Internet, Link Egypt, Telecom Egypt, Vodafone/Raya, et Etisalat Misr ont vu leurs réseaux haut-débit suspendus. Seules quelques lignes "dial-up" semblent échapper au black-out. L’ADSL proposé par Noor, quant à lui, est toujours "online" pour l’instant.