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Affaire Contador : "Les meilleurs cyclistes ne sont plus au-dessus des règles"

"Monsieur Propre" du cyclisme de la fin des années 1990, le Français Christophe Bassons revient pour FRANCE 24 sur la suspension d'un an dont a écopé Alberto Contador, vainqueur du Tour 2010.

Onze ans après avoir vu sa carrière se briser contre l’omerta en vigueur dans le peloton des “années Festina“, Christophe Bassons n’a toujours pas abdiqué. L’ancien coureur de la Française des Jeux, victime en 1999 de ses prises de position répétées contre le dopage, est passé de l’autre côté de la barrière. Il œuvre désormais comme correspondant Aquitaine pour l'Agence française de lutte contre le dopage (AFLD).

En entretien pour France24.com, il revient sur l’“affaire Contador“ alors que le vainqueur du Tour 2010 vient d’être suspendu un an par sa fédération et pourrait voir son palmarès amputé de sa victoire sur la Grande Boucle 2010.

Le “Monsieur Propre“ du cyclisme, dont la tentative symbolique de finir le Tour de France 1999 “à l’eau claire“ avait avortée, estime que certaines évolutions sont positives. Il reste néanmoins persuadé que le cyclisme est encore loin d’être sevré de ses vieux démons.

France24.com - Alberto Contador, soupçonné de dopage, a été suspendu pour un an et pourrait se voir retirer sa victoire sur le Tour 2010. Cette sanction vous paraît-elle suffisamment dissuasive ?

Christophe Bassons - C’est une décision qui, comparativement aux précédents dans le domaine, me paraît plutôt logique. D’autres, dans les mêmes circonstances, avaient obtenu une relaxe mais la majorité a encouru des suspensions de ce type. Dans l’absolu, les doses de clenbutérol [un produit interdit, ndlr] retrouvées dans le sang de Contador ne sont pas énormes. Par contre, les autres recherches effectuées semblent confirmer la présence de résidus de plastique [ce qui constituerait une preuve tangible que Contador aurait eu recours à une transfusion sanguine] dans ses prélèvements. D’ici six mois, avec les analyses effectuées, on aura plus de précisions sur tout cela. Et les soupçons d’autotransfusion qui pèsent sur lui devraient être infirmés ou confirmés. C’est un enjeu majeur dans ce dossier.

F24 - Alberto Contador justifie ces contrôles positifs en invoquant une intoxication alimentaire. Si l’on se réfère aux chiffres, son argument vous semble-t-il crédible ?

C. B. - Crédible ou pas, ce n’est pas le fond du problème. J’ai un avis bien tranché sur lui comme sur beaucoup d’autres. Ce n’est pas l’interprétation de ce taux qui, selon moi, peut prouver son innocence ou sa culpabilité. Le mode de défense qu’il a choisi est celui que l’on pouvait attendre de lui. Après, il faut bien avoir conscience que tous les coureurs cherchent à utiliser tous les moyens qui sont autorisés pour améliorer et maximiser leurs performances. C’est, à mon sens, un premier pas vers une démarche de dopage.

F24 - Depuis quelques mois, la justice de plusieurs pays, aux États-Unis et en Espagne notamment, s'intéresse de plus au plus à des cas présumés de dopage. Cette implication des pouvoirs publics pave-t-elle le chemin de la rédemption pour le cyclisme ?

C. B. - C’est un pas en avant, mais surtout un message fort. Quelque part, c’est une preuve que même les meilleurs cyclistes ne sont plus au-dessus des règles. Ce qui m’inquiète beaucoup plus en revanche, c’est l’évolution de la liste des substances "sensibles" autorisées par les instances anti-dopage. Plusieurs produits comme la Ventoline et certains corticoïdes sont désormais soumis à des contrôles moindres et la liste ne cesse de s’agrandir.

F24 - L’Union cycliste internationale (UCI), par la voix de son président Pat McQuaid, a affirmé être "en colère contre Contador" mais défend toujours l’idée que le cyclisme est "le plus propre des sports". S’agit-il d’un discours de façade ?

C. B. - Les exemples récents ont souvent démontré que les actes ne suivaient généralement pas les paroles. Je suis toujours sceptique sur les sorties médiatiques des grandes fédérations. Il est très difficile pour elles de sortir des affaires de dopage tout en développant positivement l’image de leur sport. Dans le domaine, je pense qu’il faut être très réservé et surtout prendre en compte les travaux des organismes indépendants et des gouvernements.