Toujours plus de paysans, mais de moins en moins de terres à partager. Au Burundi, la pression démographique est une bombe à retardement. La terre est de plus en plus convoitée, et les conflits entre voisins se multiplient. Ces disputes pour la terre fragilisent la récente réconciliation nationale.
Au Burundi, l’un des plus petits pays d’Afrique situé à l’Est de la RDC, 90 % de la population dépend de l’agriculture, mais la terre pose un réel problème. La démographie explose, la population pourrait doubler, voir tripler d’ici 2050. Il y a de moins en moins de terres pour de plus en plus de bouches à nourrir… Un demi-hectare par ménage ne suffit plus pour assurer la sécurité alimentaire d’une famille.
Conséquence : les relations entre paysans sont polluées, les familles s’entredéchirent pour les questions d’héritages. Les terres sont morcelées, et de plus en plus marchandées.
Les tribunaux sont saturés. 80 % des affaires juridiques du pays concernent le foncier. Des procès souvent interminables, ou reportés. Car au Burundi, la terre est un bien collectif qui se transmet de génération en génération, et l’on se remet souvent au droit coutumier, loin de l’administration dans la capitale Bujumbura. D’ailleurs, les services cadastraux sont quasi inexistants dans les campagnes. Faire enregistrer une terre coûte cher pour un paysan qui gagne quelques euros par jour, c’est donc peu commun dans les familles. C’est pourquoi les tribunaux peinent à rassembler les preuves et autres documents officiels lorsque deux parties affirment chacune être propriétaire. Un véritable cercle vicieux.
L’État a promis de réformer. Le code foncier en vigueur date de 1986 et n’est plus adapté à la situation actuelle. Dans l’urgence, une Commission Nationale a été créée en 2006 pour gérer les litiges, désengorger les tribunaux et trouver des solutions amiables. Quelques guichets fonciers pilotes dans les campagnes sont à l’essai. Mais ce n’est pas suffisant. La nouvelle loi foncière, qui doit aussi inclure un nouveau planning familial, est très attendue.
Dans l'attente de réformes, les agences de l'ONU dont la FAO aident de nombreux ménages vulnérables en proposant des alternatives agricoles et en finançant des techniques de semences à haut rendement. L'exemple notamment de se réunir en associations dans des zones fertiles tels les marais, où l'on peut cultiver du riz et faire un peu de commerce avec les récoltes, loin des disputes et autres conflits des collines. Un moyen de changer les mentalités, de rendre l'agriculture attractive et sources de revenus.
Autre problème : le retour de centaines de milliers de réfugiés qui ont fui les guerres civiles. La situation politique est à nouveau stable, mais l’équilibre reste fragile. D’autant plus que de nombreux rapatriés cherchent à récupérer leurs terres, certaines ont été données ou vendues par les administrations de l’époque à d’autres paysans.
Le pays a longtemps souffert des mêmes divisions ethniques que son voisin le Rwanda entre Tutsi et Hutus. La dernière guerre civile au Burundi (1993-2004) aurait fait plus de 200 000 morts. Le fragile processus de paix est mis en péril si rien n’est fait rapidement.