
Bahreïn, seul pays du Golfe peuplé d'une majorité chiite, renouvelle samedi sa Chambre des députés alors que les tensions confessionnelles inter-musulmanes restent vives.
"À l’approche des élections générales du 23 octobre prochain, la situation intérieure pourrait se tendre". Cette mise en garde destinée aux touristes désireux de se rendre au Bahreïn, émane du ministère français des Affaires étrangères. Et pour cause, la campagne électorale des élections législatives et municipales du royaume se déroule sur fond de tensions dans le seul pays du Golfe peuplé d'une majorité de chiites (70 %), mais gouverné par la dynastie sunnite Al Khalifa.
La tension est montée d’un cran après l'inculpation, début septembre, de 23 activistes de l'opposition chiite, accusés de comploter en vue de renverser la monarchie. Hasard du calendrier ou précaution des autorités, leur procès devant la Haute cour pénale aura lieu le 28 octobre, soit quelques jours à peine après les élections. Parmi les accusés figurent Abdeljalil al-Singace, un leader du Mouvement des libertés et de la démocratie (HAQ), une association politique chiite interdite, Mohammed Saïd, un dirigeant du Centre pour les droits de l'homme au Bahreïn, et deux religieux chiites, cheikh Mohammed al-Moqdad et cheikh Saïd al-Nouri. Par ailleurs, quelque 250 détenus chiites arrêtés avant les élections au Bahreïn risquent d'être torturés, selon Amnesty International, tandis que l'on accuse le pouvoir d’avoir opéré "un retour à l'autoritarisme".
Discriminations
Une série d’évènements qui n’a pu que conforter le sentiment d’exclusion de la majorité chiite, fréquemment soupçonnée par les compatriotes sunnites d’entretenir des rapports ambigus avec l’Iran, la mère patrie de leur communauté. Une accusation sans fondements assurent de leur côté les leaders chiites. "La discrimination confessionnelle dont sont victimes les chiites au Bahreïn est bien réelle, il faut y mettre un terme, notamment sur le plan politique", déclare à France24.com, Abdel Nabi Salmane, ancien député et vice-président de la Tribune démocratique progressiste.
Mercredi, le chef du principal groupe de l'opposition chiite au Bahreïn est allé jusqu’à contester le monopole du pouvoir détenu par la famille royale, réclamant que le poste de Premier ministre ne soit plus occupé par l’un de ses membres. "Il est inadmissible que le pouvoir soit le monopole d'une seule famille, à laquelle nous devons (pourtant) respect et considération. Nous attendons le jour où un enfant du peuple, qu'il soit sunnite ou chiite (...), pourra accéder au poste de Premier ministre", a lancé cheikh Ali Salmane, chef de l'Association de l'entente nationale islamique ou Wefaq. Cette association, les partis politiques étant interdits, présente 18 candidats pour l'élection de la Chambre des députés aux pouvoirs limités. Si les dernières législatives de 2006 avaient été remportées par des partis islamistes, Wefaq avait réussi à gagner 17 des 40 sièges.
Samedi, 127 candidats, dont 8 femmes, seront en lice pour 35 des 40 sièges de la Chambre des députés. Leur sort, qui semble joué d'avance selon l'opposition qui dénonce des risques de fraude, est désormais entre les mains des quelques 318 000 électeurs.