L'organisation indépendantiste basque ETA annonce qu'elle ne "mènera plus d'actions armées", dans une vidéo transmise à la BBC. L'information, confirmée par le journal "Gara", a été accueillie avec scepticisme en Espagne.
AFP - Le cessez-le-feu officialisé dimanche par le groupe basque armé ETA, très affaibli par une traque policière incessante, sonne comme une réponse à minima aux "pressions" de sa branche politique Batasuna qui veut revenir dans le jeu politique, selon des experts interrogés par l'AFP.
Ce communiqué "était attendu depuis plusieurs semaines" après l'engagement officiel de Batasuna envers la non-violence et son alliance inédite avec le parti indépendantiste légal Eusko Alkartasuna (EA), note Gorka Landaburu, spécialiste de la question basque et directeur de l'hebdomadaire Cambio 16.
Batasuna et son nouvel allié EA ont d'ailleurs dernièrement réclamé à l'organisation clandestine --responsable de la mort de 829 personnes en un demi-siècle de violences pour l'indépendance basque-- un "cessez-le-feu permanent sous vérification internationale" pour tenter de satisfaire aux exigences de Madrid qui réclame un abandon sans condition de la violence.
L'objectif des "pressions" exercées par Batasuna, parti déclaré illégal en 2003 en raison de ses liens avec l'ETA, est de revenir dans le jeu politique et se présenter légalement aux côtés d'EA aux élections municipales de 2011.
itAvec cette trêve, "l'ETA cherche à répondre aux pressions de Batasuna et officialise l'arrêt technique dans lequel elle se trouve depuis mars pour réorganisation interne, en réponse aux opérations policières", explique le spécialiste Florencio Dominguez.
L'organisation n'a pas commis d'attentat sur le sol espagnol depuis août 2009 et si elle a tué à nouveau en mars 2010, ce fut au cours d'une fusillade fortuite en région parisienne, où un policier français a trouvé la mort.
Le groupe indépendantiste a annoncé dans sa vidéo transmise dimanche à la BBC qu'il "ne mènera pas d'actions offensives armées" dans le cadre sa lutte pour l'indépendance du Pays basque (nord).
"ETA ne parle pas de trêve définitive mais d'un arrêt des actions armées. En tant qu'organisation, elle continue", nuance M. Landaburu.
Dans le même sens M. Dominguez souligne que l'organisation "dit que pour l'heure elle ne fait pas d'attentat mais maintient toute son activité pour pouvoir en faire. Ce n'est pas un abandon des armes, loin s'en faut".
Pour José Luis Orella, professeur à l'Université CEU San Pablo de Madrid, cette annonce "est un début insuffisant" aux yeux du gouvernement espagnol.
Le groupe armé n'est pas allé au-delà de cette annonce vague parce qu'il "n'a jamais envisagé de déposer les armes", estime cet auteur de plusieurs livres sur l'ETA.
Le ministre espagnol de l'Intérieur Alfredo Perez Rubalcaba qui n'avait pas encore réagi officiellement dimanche soir à l'annonce, avait insisté vendredi en ce sens: "la seule chose que nous sachions, c'est que l'ETA n'est pas disposée à abandonner la lutte armée".
La déclaration du groupe clandestin n'a pas soulevé d'"enthousiasme" au Pays basque comme ce fut le cas lors du "cessez-le-feu permanent" de 2006, qui visait à permettre l'engagement d'un processus de paix avec Madrid, relève M. Landaburu. "Il y a eu tellement de trêves qui ont échoué"...
Le scepticisme était notamment de mise au gouvernement régional basque dirigé par les socialistes. Cette annonce est "absolument insuffisante parce qu'elle ne répond pas à ce que l'immense majorité de la société basque exige (...) de l'ETA, qui est qu'elle abandonne définitivement l'activité terroriste", a déclaré le responsable basque de l'Intérieur, Rodolfo Ares.
"En étant optimiste, on peut dire que c'est le début de la fin, mais ce sera long", juge M. Landaburu. "L'ETA ne va pas tirer le rideau du jour au lendemain et reconnaître sa défaite".