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, correspondant à Rome – Depuis plusieurs semaines, des groupes idolâtrant des chefs mafieux apparaissent sur Facebook et attirent de jeunes fans. Le débat en ligne est vif et une pétition circule pour demander la fermeture du site de socialisation.
La mobilisation de magistrats et de dizaines de milliers d’usagers italiens d’Internet a provoqué la suspension de plusieurs groupes célébrant des parrains de la mafia sur le site de socialisation Facebook.
Le groupe sur Facebook "Riina, le chef des chefs", soutenant Toto Riina, condamné à la prison à perpétuité pour assassinats, était parvenu à recueillir l’adhésion de 5 000 fans. Avant de disparaitre des écrans jeudi, ses membres y avaient publié des messages, qualifiant Riina d’"homme d’honneur", d’"incompris" avant de lui faire le respectueux "baise main".
Bernardo Provenzano, chef mafieux arrêté en 2006 après une longue clandestinité, a vu également fleurir plusieurs groupes à sa gloire. La page de son "fan club" sur Facebook avait été créée pour "honorer quelqu’un qui avait échapper à l’Etat pendant 40 ans". Ses fondateurs l’ont suspendue "pour éviter les infiltrations des bons penseurs". Mais ils sont encore 268 membres du réseau à demander, sans sourciller, sa sanctification sur une autre page.
La censure ne fait pas partie de la politique de Facebook
Salvatore Borsellino, frère du juge anti-mafia assassiné en 1992, est préoccupé par la récente prolifération de ces sites, même si leur existence est parfois éphémère.
"Il s’agit d’une campagne bien précise de désinformation pour délégitimer les magistrats et tous ceux qui recherchent la vérité sur les mystères de Riina et Provenzano", a déclaré Borsellino au quotidien La Repubblica. "N’oublions pas que, depuis des années, l’un des objectifs principaux des parrains est d’obtenir la révision de leurs procès."
Les dirigeants du réseau Facebook ont fait savoir que la censure ne faisait pas partie de leur politique et refusent d’intervenir contre ces groupes de fans de mafieux, provoquant un tollé dans la péninsule.
La mobilisation contre les sites se fait de l’intérieur. Plusieurs milliers de membres du réseau social menacent de quitter Facebook en rejoignant des groupes tels que "Ou eux ou nous" ou "La mafia hors de Facebook". Ce dernier recensait vendredi matin plus un total de 124 000 adhérents, bien supérieur à ceux des pages pro-mafia.
Une pétition circule sur Internet pour demander la fermeture du site pour "complicité en apologie de délit", punissable selon le code pénal italien.
Une nouvelle arme de la mafia
Son initiateur, Giuseppe A., qui souhaite protéger son identité, a déclaré à FRANCE 24 : "Il est inadmissible que ce genre de chose se passe en Italie, qu’il n’y ait pas un minimum de contrôle de la part des administrateurs. Il faut faire passer la culture du respect et de la légalité avant celle du sang et de la peur que les boss mafieux veulent imposer en Sicile et en Italie."
Selon des magistrats spécialistes de la criminalité organisée, recruter de jeunes partisans sur Internet serait devenu une nouvelle arme de la mafia dans sa lutte contre l’Etat.
Pietro Grasso, le chef de la direction de l'anti-mafia en Italie, juge le phénomène inquiétant. "Les mafieux se déplacent à grande vitesse dans le monde global, dit-il. Ils sont toujours les plus prompts à s’adapter aux nouveautés."