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Ouverture d'un musée, série de concerts... À l'approche du bicentenaire de la naissance de Chopin, Varsovie entend chérir son pianiste et compositeur prodige. Par opportunisme touristique, mais aussi pour se réconcilier avec son passé.

Un Musée Chopin flambant neuf qui ouvrira ses portes au public à Varsovie début avril, sa maison natale de Zelazowa-Wola, non loin de la capitale, entièrement rénovée pour la fin du même mois, une série de concerts d’hommage... La Pologne célèbre avec force le bicentenaire de la naissance du pianiste-compositeur Frédéric Chopin (1810-1849). L’Etat a investi pas moins de 90 millions d’euros pour ces célébrations qui ont notamment pour but de redessiner une image avantageuse du pays.

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"Journal de la Culture" consacré au bicentenaire Chopin

Le comité polonais qui organise les festivités du bicentenaire du pianiste romantique insiste sur le profil "ouvert sur le monde, dynamique, européen" de Frédéric - ou plutôt Fryderyk - Chopin. Le coordinateur des célébrations, Ryszard Kubiak, revendique clairement son parti pris : "Chopin était un homme de séduction et de voyages. Il représente la Pologne dans le monde. Je ne souhaite pas montrer un Chopin nostalgique, tourmenté par la maladie et la mort."

"Citez-moi une seule note qui soit française !"

Le pianiste a passé les 20 premières années de sa vie, de 1810 à 1830, sur le territoire polonais, alors sous administration russe. Durant ces deux décennies, son œuvre est déjà prolifique et admirée du milieu culturel de Varsovie. Après avoir fui les tumultes de l’insurrection de novembre 1830 contre la Russie, il finit par s’installer à Paris en 1831 où il participe à la Société littéraire polonaise et fréquente l’aristrocratie venue de Varsovie - pas moins de 6 000 compatriotes se sont également exilés en France à l’époque. Il n’a plus jamais foulé le sol polonais et a nourri vis-à-vis de sa terre natale une profonde nostalgie.

Qu’il compose à Varsovie ou à Paris, "chaque note de Chopin est polonaise : écoutez ses 'mazurkas', ses 'polonaises', j’y sens l’âme de chez nous", affirme Ryszard Kubiak. "Citez-moi une seule note qui soit française !" renchérit le pianiste Przemislaw Lechowski, qui a participé à l’intégrale des œuvres de Chopin à Varsovie fin février. Cette revendication polonaise n'est pas nouvelle. Déjà, en 1872, l'écrivain Wilhem von Lenz, élève du maître, s'enflammait. "Chopin a été l'unique pianiste politique. Il jouait la Pologne, il mettait en musique la Pologne !"

Chopin devient aéroport et marque de vodka

L’histoire d’amour de la Pologne avec son pianiste fétiche n’est pas de tout repos. De son vivant, il a été déchu de sa nationalité russe pour avoir refusé de devenir musicien officiel du tsar. Bien plus tard, durant la Seconde Guerre mondiale, ses œuvres deviennent un emblème de la résistance contre les nazis, qui avaient interdit sa musique.

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Puis elles servent d’outil à la propagande communiste. Le 13 décembre 1981, la télévision nationale diffusait en boucle des œuvres de Chopin et le discours du général Jaruzelski décrétant la loi martiale... La Pologne du XXIe siècle s’approprie à son tour la figure de Chopin, au point de baptiser le principal aéroport du pays du nom du pianiste, ou encore de griffer une marque de vodka avec la signature du fameux pianiste.

Les Polonais seraient-ils désormais avides d’un Chopin plus intimiste que triomphal ? Au flambant neuf Musée Chopin, c’est le quotidien du pianiste qui est mis en scène - les senteurs de violette qu’il affectionnait, les sons de cloche qui accompagnaient ses instants de compositions… A en croire le pianiste star Lang Lang, "chacun s’approprie Chopin, en fait une histoire personnelle, se dit qu’il lui parle à lui personnellement". A l’âme polonaise aussi, Chopin parle tout particulièrement.

Tags: Musique,