![L’affaire Soumaré suscite l’embarras en Ile-de-France L’affaire Soumaré suscite l’embarras en Ile-de-France](/data/posts/2022/07/15/1657880566_L-affaire-Soumare-suscite-l-embarras-en-Ile-de-France.jpg)
Plombée par les sondages, l’UMP s’en est prise de nouveau à un candidat socialiste en Val-d’Oise, qualifié de "délinquant". Alors que la campagne dérape, le PS s’étonne que des élus de droite aient accédé à des documents réservés à la magistrature.
La campagne des régionales s’embrase en Ile-de-France, où l’UMP, à la traîne dans les sondages, a qualifié Ali Soumaré, tête de liste socialiste en Val-d’Oise, de "délinquant multirécidiviste chevronné". Décidément, le candidat d’origine malienne, déjà comparé le 28 janvier à "un joueur de l’équipe réserve du PSG", pose problème à certains.
Pour "Le Figaro", "Ali Soumaré embarrasse le PS" ; Mais pour "Le Monde", c’est surtout l’UMP qui est "embarrassée". Ce qui est sûr, c’est que le maire UMP de Franconville, Francis Delattre, auteur de la plaisanterie footballistique du mois dernier, a fait de Soumaré sa tête de Turc. Piqué par les accusations de racisme qui ont suivi sa première sortie, l’élu de droite a surenchérit le 19 février, adressant à la presse un inventaire de délits qu’auraient commis le socialiste. Francis Delattre fait état de deux "vols aggravés", de "conduite sans permis de conduire", de "rébellion à agents de la force publique" et de "violences ayant entraîné une interruption de travail de huit jours".
Appuyé par Axel Poniatowski, tête de liste UMP dans le Val-d’Oise, Francis Delattre a invité le président socialiste de la région Ile-de-France, Jean-Paul Huchon, à retirer la candidature de Soumaré.
Climat délétère
Le principal intéressé, ancien porte-parole des familles des deux adolescents tués en 2007 à Villiers-le-Bel lors d’un accident avec une voiture de police, a annoncé lundi qu’il porterait plainte pour diffamation. Autour de lui, les socialistes franciliens font bloc. Dans un message posté sur le réseau Twitter, Anne Hidalgo, tête de liste socialiste à Paris, a dénoncé un "acharnement" et une "diabolisation" orchestrés par le maire de Franconville.
Jean-Paul Huchon, lui-même condamné en 2007 à une peine de six mois de prison avec sursis et à une amende de 60 000 euros pour prise illégale d'intérêts, a fustigé une "campagne de caniveau", source de "racisme, de populisme et de démagogie".
A droite, la tête de liste UMP en Ile-de-France, la ministre de l'Enseignement supérieur Valérie Pécresse, est restée prudente, rappelant que l’affaire devait être replacée "dans le contexte d’une campagne dans le Val-d’Oise très violente". Même son de cloche du côté de son lieutenant à Paris, Chantal Jouanno, qui déplore une campagne qu’elle "n’aime pas beaucoup, depuis le début".
Complaisances judiciaires ?
Si les socialistes franciliens se sont empressés de défendre leur candidat, à Solferino, où plane un certain malaise, on préfère déplorer la méthode employée à droite pour dénicher des informations normalement réservées à la magistrature.
Selon le porte-parole de l’UMP, Frédéric Lefebvre, qui s’exprimait lundi matin sur RTL, "il suffit d'aller sur Internet" ou "au greffe du tribunal" pour vérifier les informations sur le passé judiciaire de Soumaré.
Or, dans des propos recueillis par "Le Monde", l’avocat de Soumaré, Jean-Pierre Mignard, soutient que les faits cités "ne figurent pas dans le casier judiciaire d’Ali Soumaré", à l’exception de la condamnation du 9 décembre 2002 pour "vol aggravé", pour laquelle il y aurait "probablement prescription".
Les élus de l’UMP auraient-ils eu accès à plus que le bulletin n°2 – le seul accessible à un tiers, pourvu que la demande soit faite par une autorité administrative – du casier judiciaire du candidat socialiste ? Et si oui, par quel intermédiaire ?
Selon Philippe Bilger, avocat général auprès de la cour d’appel de Paris, interrogé par FRANCE 24, "le casier intégral n’est pas accessible, sauf aux autorités judiciaires". Aussi, ajoute-t-il, les informations diffusées sur le candidat PS "n’ont pu être obtenues qu'à la suite d'une complaisance policière ou judiciaire coupable".
L’affrontement entre PS et UMP profitera-t-il aux autres partis ? Rien n’est moins sûr, estime la tête de liste des Verts en Ile-de-France, Cécile Duflot, pour qui la "désolante" passe d’armes autour de Soumaré ne peut qu’enfler les rangs des abstentionnistes, déjà attendus "à 60%".