
Photo de la marine brésilienne publiée le 8 juin 2009 montrant des plongeurs en train de récupérer une dérive de l'avion A330 d'Air France qui s'est écrasé dans l'Atlantique le 1er juin 2009 © - / BRAZILIAN NAVY/AFP/Archives
Air France et Airbus sont-ils responsables d'homicides involontaires dans l'affaire du crash de l'avion qui reliait Rio à Paris ? Seize ans après cet accident qui a fait 228 morts, la compagnie et le constructeur, relaxés en première instance, sont jugés à partir de lundi 29 septembre en appel pour deux mois.
Le 1er juin 2009, l'Airbus parti de Rio de Janeiro pour Paris (vol AF447) s'abîme en pleine nuit dans l'Atlantique, quelques heures après son décollage, entraînant la mort de ses 216 passagers et 12 membres d'équipage. À bord de l'A330 immatriculé F-GZCP, se trouvent des personnes de 33 nationalités, parmi lesquelles 72 Français et 58 Brésiliens.
Les boîtes noires ont confirmé le point de départ de l'accident : le givrage des sondes de vitesse Pitot alors que l'avion volait à haute altitude dans la zone météo difficile du "Pot au noir", près de l'équateur.
Pour cet accident aérien, passé à la postérité par la célèbre photo de la dérive tricolore arrachée à l'avion et flottant au milieu de l'océan Atlantique, les deux entreprises sont jugées jusqu'au 27 novembre par la cour d'appel de Paris. Elles encourent jusqu'à 225 000 euros d'amende.
Le 17 avril 2023, après deux mois de débats hautement techniques hachés de moments d'émotion lors des auditions des familles endeuillées, le tribunal correctionnel de Paris a relaxé sur le plan pénal Airbus et Air France tout en reconnaissant leur responsabilité civile.
Il a considéré que si des "imprudences" et "négligences" avaient été commises, "aucun lien de causalité certain" n'avait "pu être démontré" avec l'accident le plus meurtrier de l'histoire des compagnies françaises.
Alors que le ministère public avait requis à l'audience la relaxe des deux entreprises, le parquet général a tout de même fait appel du jugement, "afin de donner leur plein effet aux voies de recours prévues par la loi et soumettre l'affaire à un second degré de juridiction".
Sur les 489 parties civiles constituées lors du procès de première instance, 281 se sont jointes à l'appel dans ce dossier aux 20 000 cotes de procédure s'étalant sur 105 tomes.
"Certaines se sont lassées, ont lâché la rampe, pour essayer de tourner la page. D'autres sont toujours extrêmement combatives et veulent absolument que justice soit rendue et que la vérité soit clairement dite au plan judiciaire", a déclaré à l'AFP Me Alain Jakubowicz, avocat de nombreuses parties civiles.
L'éclairage d'Airbus
Le transporteur Air France est poursuivi pour ne pas avoir mis en oeuvre une formation de pilotes adaptée aux situations de givrage des sondes Pitot, qui mesurent à l'extérieur de l'avion la vitesse de l'appareil, et procédé à une information suffisante des équipages.
La compagnie "continuera à démontrer, désormais devant la cour d'appel, qu'Air France n'a pas commis de faute pénale à l'origine de cet accident", a-t-elle indiqué dans un communiqué transmis à l'AFP.
Quant au constructeur aéronautique européen Airbus, la justice lui reproche d'avoir sous-estimé la gravité des défaillances des sondes anémométriques et de n'avoir pas pris toutes les dispositions nécessaires pour en informer d'urgence les compagnies aériennes qui en étaient équipées, ce que le constructeur conteste également.
"Airbus apportera sa pleine contribution au procès en appel (...), afin de continuer à éclairer la compréhension de ce tragique accident, en accord avec l'engagement total de la société en matière de sécurité des vols", a-t-il dit dans un communiqué.
Les premiers débris de l'avion et des corps ont été retrouvés dans les jours suivant le crash. Mais l'épave n'a été localisée que deux ans plus tard, après de longues recherches, à 3 900 mètres de profondeur.
Déstabilisé par les conséquences de la panne des sondes, l'un des copilotes a adopté une trajectoire ascendante et, dans l'incompréhension, les trois pilotes n'ont pas réussi à reprendre le contrôle de l'avion, qui a décroché et heurté l'océan 4 minutes et 23 secondes plus tard.
Selon le calendrier prévisionnel, le premier mois du procès sera consacré à des auditions de témoins et d'experts. Les représentants d'Airbus et Air France devraient être interrogés à partir du 27 octobre.
Avec AFP