
La mairie de Saint-Denis où a été hissé le drapeau palestinien, le 22 septembre 2025, à l'occasion de la reconnaissance officielle par la France de l'État de Palestine. © Stéphane de Sakutin, AFP
Le drapeau palestinien flotte au vent sur le fronton de la mairie de Saint-Denis depuis quelques minutes. Aux côtés du maire socialiste Mathieu Hanotin, du président socialiste du département de Seine-Saint-Denis, Stéphane Troussel et du député communiste de la circonscription Stéphane Peu, le premier secrétaire du Parti socialiste (PS) Olivier Faure justifie cette décision, lorsque Sabrina, émue jusqu’aux larmes, interpelle les élus pour les féliciter.
"Bravo la gauche ! Merci pour ce drapeau !", lance cette habitante de Saint-Denis de 58 ans qui, en cette journée de reconnaissance officielle par la France de l’État palestinien, ne peut contenir son émotion.
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Accepter Gérer mes choix"Les Palestiniens sont un peuple qui souffre. Ils ont le droit d’avoir un drapeau et un État. Ils vivent une injustice que je ne supporte pas, alors je suis très heureuse de cette initiative de la gauche et de la reconnaissance de l’État palestinien par Emmanuel Macron, confie Sabrina à France 24. Voir ce drapeau palestinien hissé sur la mairie m’a fait un choc émotionnel. J’ai l’impression que c’est comme s’il s’agissait de l’indépendance de la Palestine", ajoute-t-elle, tout en précisant que ses propos ne sont pas dirigés "contre les Israéliens" et qu’elle souhaite "que les deux peuples puissent vivre en paix".
À l’image de la ville de Saint-Denis, plusieurs dizaines de mairies de France ont hissé, lundi 22 septembre, le drapeau palestinien à leur fronton, malgré la consigne du ministre démissionnaire de l’Intérieur Bruno Retailleau. Celui-ci a demandé vendredi aux préfets d’interdire les pavoisements, au nom des principes de neutralité du service public et de non ingérence dans la politique étrangère de la France, compétence exclusive de l’État.
Le ministère de l’Intérieur recensait toutefois lundi midi 52 communes, toutes tenues par des maires de gauche, ayant décidé d’arborer le drapeau palestinien.
"Ce drapeau-là n'est pas le drapeau du Hamas"
"C’est un jour historique et il était important de marquer le coup pour accompagner une position diplomatique française nouvelle et de lui donner de la force en montrant un soutien populaire à travers les élus", a expliqué le maire de Saint-Denis, Mathieu Hanotin. Ce dernier a également rappelé la jurisprudence de la décision du tribunal administratif de Versailles, datant de décembre 2024, selon laquelle mettre un drapeau ukrainien sur la façade d’un bâtiment public n’était pas une revendication politique mais un symbole de solidarité envers une nation victime d’une agression.
Ainsi, de nombreuses mairies françaises ont arboré un drapeau ukrainien après l’invasion de l’Ukraine par la Russie en février 2022. De même, après l’attaque du Hamas contre Israël le 7 octobre 2023, plusieurs mairies avaient hissé le drapeau israélien.
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Accepter Gérer mes choix"Ce drapeau-là n'est pas le drapeau du Hamas, il est le drapeau de femmes et d'hommes qui ont le droit, eux aussi, à la liberté et à l'autodétermination, il est le drapeau de ceux qui vivent un génocide qu’il faut condamner", a déclaré pour sa part Olivier Faure devant les journalistes.
L’État de Palestine, que la France doit reconnaître lundi soir devant l’ONU, "est un État qui reste virtuel à ce stade mais c’est une façon d’engager le débat, d’engager une autre voie" vers une solution à deux États.
Il s'agit également, a complété Olivier Faure, "de rappeler à Benjamin Netanyahu, qui cherche aujourd'hui à rendre impossible cette solution par la destruction programmée de Gaza et l'annexion de la Cisjordanie, que nous ne sommes pas prêts à accepter l'idée qu'il y ait un grand Israël qui aille de la mer Méditerranée jusqu'au fleuve du Jourdain".
"Une forme d’indécence folle"
Le patron du PS a demandé, dimanche soir, à Emmanuel Macron de contredire son ministre de l’Intérieur en autorisant l’initiative du pavoisement des mairies avec le drapeau palestinien. "Il s'agirait non seulement d'un acte fort envers tous ceux qui sont attachés à la résolution du conflit israélo-palestinien, mais cohérent avec la position de la France que vous proclamerez devant la communauté internationale", a-t-il plaidé dans un courrier envoyé au chef de l’État.
Emmanuel Macron ne lui a pas répondu. Jean-Noël Barrot, ministre démissionnaire des Affaires étrangères, a de son côté qualifié ces débats de "polémiques futiles", regrettant que ce "jour historique pour la paix" soit "instrumentalisé aux fins de polémiques politiciennes, aux fins de nous diviser dans un moment où, plus que jamais, nous avons besoin d'être unis pour être fort".
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Accepter Gérer mes choixLundi matin, devant la mairie de Saint-Denis, le drapeau palestinien au-dessus de sa tête, Olivier Faure pointait les divisions sur la question palestinienne au sein du gouvernement, ciblant Bruno Retailleau en soulignant son opposition personnelle à la reconnaissance de l’État palestinien.
"Je regrette que le ministre de l’Intérieur n’ait rien trouvé de mieux que de chercher à condamner des maires qui font leur devoir de solidarité. Il y a là une forme d’indécence folle. Comment peut-on aujourd’hui dire qu’il y a là un acte qui serait condamnable quand on ne condamne pas ce qu’il se passe sur le territoire de Gaza ?", a interrogé le député socialiste.
Un peu plus loin, Matteo, un habitant de Saint-Denis âgé de 29 ans, fait partie de la poignée de curieux qui observent la scène. "Tout cela reste symbolique. Malheureusement ça ne changera rien de façon concrète dans la vie des Palestiniens", regrette-t-il, dubitatif, avant de reprendre la promenade de son chien. Le drapeau palestinien restera hissé sur la mairie dionysienne entre les drapeaux français et européen jusqu’à mardi matin.