Une nouvelle couleur de cheveux à chaque compétition et des ongles bariolées à la longueur inégalée à chaque course. Avec son look, l'Américaine Sha'Carri Richardson ne passe pas inaperçue dans les stades. Mais l'athlète fait surtout sensation en raison de ses performances. Favorite du 100 m, l'épreuve reine, elle déboule à Paris avec le meilleur chrono de la saison sur la ligne droite, en 10 sec 71.
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Accepter Gérer mes choixPour sa première participation aux Jeux olympiques, la Texane de 24 ans ambitionne de se parer d'or. Il y a trois ans à Tokyo, elle avait manqué son rendez-vous avec les JO.
Une semaine avant les sélections, elle apprend le décès de sa mère biologique, qui ne l'a pas élevée, et fume du cannabis pour surmonter ce moment. De quoi déclencher un contrôle antidopage positif, une disqualification et une courte suspension qui la prive des Jeux de Tokyo. "Je n'avais pas le droit de le faire [fumer du cannabis]. Je ne cherche pas d'excuse, je ne recherche aucune empathie […]. Mais quand on parle de Sha'Carri Richardson, il n'y aura jamais le terme stéroïde attaché à ce nom. Le produit dont on parle ici est le cannabis", avait-elle alors expliqué à la chaîne NBC.
Star annoncée des Jeux de Paris, elle apprend toujours à canaliser sa fougue et ses émotions sur la piste, son refuge depuis une enfance difficile. "Peu importe ce qu'il se passait dans ma vie, la piste restait un lieu où je pouvais être en paix", avait raconté Richardson en 2020 dans un documentaire de Park Stories.
"Je me disais que personne ne voulait être avec moi"
Née en 2000 à Dallas, "Sha'Carri", qui n'a jamais fait état de présence paternelle, est élevée par sa tante et sa grand-mère face aux carences de sa mère, qui abandonne ses deux filles. "Je me demandais ce qui n'allait pas avec moi. Si ma mère ne souhaitait pas être ici, je me disais que personne ne voulait être avec moi", raconte la sprinteuse. "Cette absence de lien avec ma mère biologique m'a tourmenté à l'adolescence et conduit vers l'obscurité. J'ai fait une tentative de suicide lorsque j'étais au lycée, je me suis retrouvée le lendemain matin à l'hôpital pour un lavage gastrique."
Seul lieu où elle oublie sa tristesse, la piste d'athlétisme l'accueille depuis qu'elle a voulu imiter sa tante, dont les médailles de jeunesse traînent à la maison. "C'était la plus petite, mais d'entrée la plus rapide. Elle voulait toujours être devant, prouver sa valeur, elle travaillait dur, menait toutes les séries d'entraînement", a indiqué en mai à l'AFP son entraîneure au lycée Lauren Cross, devenue sa marraine. "Elle était déjà très sérieuse, concentrée. Elle travaillait d'autant plus dur qu'elle détestait perdre."
Ses prouesses mènent la jeune femme à l'Université de Louisiane, puis en 2019 au groupe professionnel de l'ex-sprinter sulfureux Dennis Mitchell, impliqué dans plusieurs affaires de dopage, en Floride. En 2021, au meeting de Mirama Invitational, elle égale la 9e performance mondiale de l'histoire sur le 100 m femmes avec le temps de 10 s 72 et devient la 6e performeuse mondiale de l'histoire.
"Je suis à la fois mature et immature"
Mais son contrôle positif freine pendant un temps ses ambitions. L'Américaine, qui touche alors le fond sportivement, apprend à s'ouvrir sur ses tourments personnels : "Depuis ma suspension, les gens voient mon côté humain, ma chair à vif", dit-elle. "Je suis à la fois mature et immature. Parfois je suis de bonne humeur, parfois je suis toxique", écrit encore sur les réseaux sociaux celle qui estime que son "plus grand obstacle" est de "rester stable". "Parfois je flanche parce que je n'arrive pas à gérer tout ce qui m'arrive."
Déterminée, elle arrive à remonter la pente et revient à son meilleur niveau. En 2023, elle explose la concurrence lors des Mondiaux de Budapest et devient championne du monde du 100 m en 10 s 65, devant les Jamaïcaines Shericka Jackson et Shelly-Ann Fraser Pryce, un chrono qui lui permet de devenir la 5e performeuse de tous les temps.
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Accepter Gérer mes choixAvec sa notoriété et son titre mondial, la flamboyante jeune femme fait la fierté des banlieues sud de Dallas, à grande majorité afro-américaine. L'an passé, le district scolaire renomme la piste de ses débuts à son nom lors d'une émouvante cérémonie, à l'occasion de laquelle la sprinteuse glisse des conseils aux jeunes athlètes qui rêvent de suivre ses foulées.
"La vie ne s'arrête pas ici, il y a tant à découvrir. J'ai été moi aussi une jeune fille noire du sud de Dallas. Je veux que vous croyez en vous, que vous sachiez que tout est possible." Sha'Carri Richardson se définit "comme une personne noire avant d'être une athlète". "Hors de la piste, je vis des choses comme les autres femmes, comme les autres noirs en vivent", explique au magazine Teen Vogue celle qui dit s'inspirer des légendes afro-américaines du sprint Wilma Rudolph et Florence Griffith-Joyner.
Faire revenir l'or olympique aux États-Unis
À Paris, elle va aussi avoir pour mission de reconquérir l'or du sprint qui échappe aux États-Unis depuis près de trente ans. Il faut remonter à 1996 pour voir Gail Devers remporter le titre olympique pour la team USA, le titre des JO de 2000 ayant été retiré à Marion Jones pour dopage.
Depuis, ce sont les Jamaïcaines qui écrasent la concurrence et notamment la légende Shelly-Ann Fraser-Pryce, qui attaque à 37 ans ses cinquièmes et derniers Jeux olympiques. Depuis les Jeux olympiques de Pékin en 2008, la sprinteuse de Kingston est toujours montée sur le podium de la distance reine des Jeux, avec deux titres en 2008 et 2012, une médaille de bronze en 2016 et l'argent en 2021 à Tokyo.
Avec ses départs supersoniques et malgré son âge avancé, Fraser-Pryce pourrait faire douter en début de course la favorite Sha'Carri Richardson. Cette dernière pourra toutefois compter sur les absences de de la double championne olympique en titre jamaïcaine Elaine Thompson-Herah en raison d'une blessure au tendon d'Achille et de sa compatriote la vice-championne du monde Shericka Jackson, qui a annoncé son forfait sur cette épreuve pour se consacrer au 200 m.
Les choses sérieuses débutent vendredi avec les séries du 100 m, avant la demi-finale et la finale samedi.
Avec AFP et Reuters