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Législatives 2024 : ce qu'il faut retenir du premier tour
Un taux de participation record, des scores qui pourraient donner au RN une majorité relative, voire absolue, à l'Assemblée nationale, de très nombreuses triangulaires et des stratégies de désistement hétérogènes... Que faut-il retenir du premier tour des législatives anticipées ?

Avec 33,15 % des votes exprimés, le Rassemblement national (29,25 %) et ses alliés (UXD, l'Union de l'extrême droite, à 3,90 %) sont arrivés très largement en tête du premier tour des élections législatives anticipées, dimanche 30 juin, devant le Nouveau Front populaire (27,99 %) et la coalition du camp présidentiel regroupée sous la bannière Ensemble (20,04 %), selon les chiffres quasi définitifs du ministère de l'Intérieur.

À gauche, un front républicain se forme pour faire barrage, coûte que coûte, à l'extrême droite pour le second tour, tandis que les macronistes peinent à parler d'une même voix. France 24 fait le point sur ce qu'il faut retenir du premier tour de ce scrutin historique.

67,5 %, taux de participation le plus élevé depuis 1997

Ces élections ont été marquées par une forte participation électorale, estimée à 67,5 %, la plus élevée depuis 1997. Une participation qui, selon plusieurs experts, a profité aux trois blocs sans véritable distinction.

"Ceux qui ont des affinités politiques se sont mobilisés autour de leurs camps dans des proportions similaires", relève ainsi Adelaïde Zulfikarpasic, directrice générale de BVA, auprès de l'AFP.

"Ça veut dire que la théorie d'une armée de réserve d'abstentionnistes de gauche était fausse. La gauche n'avait pas d'armée de réserve, elle est au taquet à 30 %. Le pays est à droite actuellement", pense quant à lui le politologue Luc Rouban (Sciences Po, CEVIPOF).

"L'offre politique était tellement réduite cette fois-ci qu'il y a très peu de réserves de voix. Toutes les forces étaient présentes", juge Martial Foucault (Sciences Po, CEVIPOF).

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Un clivage territorial qui se confirme

"L'adage 'Dis-moi où tu habites, je te dirais pour qui tu votes', que l'on commençait à sentir depuis quelques années, s'est caractérisé" lors du premier tour des législatives anticipées, analyse Lucas Jakubowicz, journaliste politique et rédacteur en chef du magazine Décideurs, évoquant la répartition des votes en fonction des territoires.

"Les candidats de la gauche unie sont très forts dans les centres-ville, quasi inexistants ou très faibles dans la France périphérique ; les candidats macronistes sont forts dans les beaux quartiers, la "France triple A", sur le littoral breton, où il y a beaucoup de retraités avec une tradition modérée, dans les zones 'gagnantes de la mondialisation', les zones frontalières comme dans l'Ain et autour de la frontière suisse ; et le RN est très fort dans la France périphérique, la France qui ne profite pas pleinement de la mondialisation", explique-t-il.

Canton par canton, cette grande règle semble s'être renforcée par rapport aux législatives de 2022.

Aux européennes du 9 juin dernier, déjà, 93 % des communes avaient voté pour le RN (en tête dans plus de 32 000 communes sur 35 000).

Vers une majorité relative, ou une courte majorité absolue

En l'état, les projections des instituts de sondage anticipent une large majorité relative d'au moins 240 sièges pour les troupes de Jordan Bardella, voire une courte majorité absolue qui engloberait jusqu'à 295 sièges.

Législatives 2024 : ce qu'il faut retenir du premier tour

"Le point de départ est plutôt sur une majorité relative qu'une majorité absolue", a estimé lundi sur France Inter Brice Teinturier, directeur général délégué d'Ipsos.

Si avant le premier tour, Jordan Bardella avait déclaré qu'il n'irait pas à Matignon sans majorité absolue, Sébastien Chenu a semblé nuancer cette position. "Il faudra regarder la configuration de l'Assemblée nationale. S'il y a effectivement à trouver des soutiens, nous assumerons nos responsabilités devant les Français", a-t-il déclaré lundi sur France 2.

Pour que l'extrême droite atteigne la majorité absolue, Marion Maréchal a de son côté lancé sur RMC un appel à "la lucidité et à la responsabilité" aux électeurs de "centre droit".

En effet, toutes les projections actuelles sont faites sans prendre en compte de possibles désistements. Pour évoquer cette question centrale, le président Emmanuel Macron a lui-même convoqué ses ministres à l'Élysée à 12 h, lundi.

Élus au premier tour, désistements, consignes de vote

  • 39 députés RN déjà élus, 32 NFP, deux macronistes

Le Rassemblement national a frappé un grand coup d'entrée, en faisant élire 39 députés dès le premier tour, à commencer par Marine Le Pen dans son fief d'Hénin-Beaumont (Pas-de-Calais), tout comme ses lieutenants Sébastien Chenu (Nord), Julien Odoul (Yonne), Edwige Diaz (Gironde) et Laure Lavalette (Var).

Le Nouveau Front populaire a de son côté déjà 32 élus, parmi lesquels les insoumis Manuel Bompard, Mathilde Panot et Clémentine Autain, ainsi que le socialiste Olivier Faure et l'écologiste Sandrine Rousseau.

Pour le parti présidentiel, seuls deux candidats ont déjà été élus : Pierre Cazeneuve dans la 7e circonscription des Hauts-de-Seine, et Mikaele Seo à Wallis-et-Futuna.

Un candidat LR, un autre ayant fait alliance avec le RN, un divers-droite et un divers-centre ont également été élus dès le premier tour.

  • Des triangulaires et d'éventuels désistements

Au total, 307 triangulaires sont possibles au second tour, un record. En 2022, il y en avait huit, et une seule en 2017.

Quelque 383 candidats du RN se sont qualifiés pour le second tour, auxquels s'ajoutent 60 candidats LR-RN d'Éric Ciotti. L'extrême droite est donc présente au second tour dans 443 circonscriptions (et en tête dans 260).

Face au raz-de-marée RN, les différents camps affichent des stratégies divergentes concernant l'hypothèse de désistements au profit d'un parti concurrent qui serait le plus à même de battre le parti d'extrême droite en profitant d'un report de voix.

Dans la Somme, le candidat NFP François Ruffin, en ballotage, bénéficie déjà du désistement de la candidate "Ensemble pour la République", Albane Branlant.

« Je ne confonds pas adversaire politique et ennemi de la République. »

Ce soir, j’annonce retirer ma candidature au profit de François Ruffin pour faire barrage au Rassemblement national. pic.twitter.com/g5UFtgmYZK

— Albane Branlant (@AlbaneBlt) June 30, 2024

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Plus tard dans la soirée, le Premier ministre Gabriel Attal a dit "assumer" le désistement des candidats d’Ensemble "dont le maintien en troisième position aurait fait élire un député Rassemblement national face à un autre candidat qui défend comme nous les valeurs de la République". Une formulation qui laisse planer le doute sur le maintien d’un candidat Ensemble face à un candidat LFI.

Dès 20 h, dans une déclaration écrite transmise à l'AFP, Emmanuel Macron a évoqué un "large rassemblement démocrate et républicain pour le second tour" contre le RN, sans en définir les contours et sans dire s'il y inclut la France insoumise (LFI).

Alors que l'extrême droite est en tête dans 132 triangulaires, les désistements devraient être nombreux à gauche ; les différents leaders de partis ayant appelé à se retirer lorsque le RN est en tête et le candidat de la gauche en troisième position.

Après avoir entretenu un certain flou, Jean-Luc Mélenchon, le leader de LFI, a en effet annoncé que ses candidats se retireraient s'ils terminaient troisièmes et que le RN était en tête.

"Il serait incompréhensible que certains continuent à ne pas faire la différence entre la gauche et l'extrême droite", a de son côté réagi la patronne des Écologistes, Marine Tondelier, appelant à la "construction d'un nouveau front républicain".

Le parti de Raphaël Glucksmann, Place publique, a quant à lui, demandé à tous les partis arrivés en troisième position de se désister face au RN en cas de triangulaires au second tour des élections législatives.

Le Modem de François Bayrou et le parti Horizons d'Édouard Philippe ont de leur côté indiqué être favorables au barrage face au RN, mais aussi face à LFI.

Arrivés en quatrième position de ce premier tour avec 10 % des suffrages, Les Républicains (LR) ont fait savoir dans un communiqué qu’ils ne donneraient pas de consigne de vote.

Les candidats qualifiés ont jusqu'au mardi 2 juillet à 18 h pour déposer leur candidature pour le second tour des élections.

Avec AFP