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JO 2024 : la nageuse Charlotte Bonnet veut "profiter et avoir une belle fin" à Paris
Alors qu’elle avait envisagé d'arrêter sa carrière à l'issue des JO de Tokyo, la nageuse Charlotte Bonnet a finalement fait le choix de continuer et de s'offrir une olympiade de plus. À l'approche de Paris 2024, la capitaine de l'équipe de France de natation espère profiter de la fête. Entretien.

"Je m'étais dit que c'est la dernière fois que je mettais une combinaison dans une compétition internationale et que je plongeais. J'étais triste." Le 29 juillet 2021, aux Jeux olympiques de Tokyo, Charlotte Bonnet pense effectuer la dernière course de sa carrière en natation. Lors de cette finale du relais 4 x 200 mètres nage libre, l'équipe de France se classe à la dernière place.

Pour la nageuse, cette défaite marque la fin d'un calvaire. "Ça ne se passait pas comme je voulais avec mon coach de l'époque. J'étais arrivée à ces Jeux dans un très mauvais état psychologique et je n'avais tout simplement plus envie", témoigne-t-elle trois ans plus tard. "C'était douloureux pour moi de me rendre compte que je n'avais pas envie d'être là alors que c'étaient les Jeux. C’est censé être un moment incroyable. À la fin de la course, je me sentais triste et vide. Je ne voulais pas forcément finir sur une médaille, mais au moins sur une bonne note, émotionnellement. J'avais envie de terminer avec le sourire."

Finalement, l’envie de ne pas terminer sa carrière sur cette course la conduit rapidement à remettre à plus tard ses projets de retraite et à viser les Jeux olympiques de Paris. Pour retrouver le plaisir de nager, elle contacte dès août 2021 l'emblématique Philippe Lucas, qui a formé Laure Manaudou. Ce dernier accepte de la prendre sous son aile. Charlotte Bonnet déménage de Nice à Martigues, près de Marseille. Le pari est réussi : elle reprend goût à la natation.

"Il n'a rien mis en place de particulier en fait... Il a juste été lui-même, c'est-à-dire quelqu'un d'authentique, d'attachant et de protecteur. J'avais besoin de retrouver le sourire avec quelqu'un qui donne envie", relate-elle.

"Passer à autre chose" en changeant de nage

Pour se remonter le moral, Charlotte Bonnet, nageuse de crawl depuis ses 14 ans, se laisse aussi aller aux expérimentations : sous l'œil de Philippe Lucas, elle s'essaie à la brasse et aux quatre nages.

"Ça m'a fait du bien dans la tête de passer à autre chose et de me dire que j'avais la capacité d'être forte ailleurs, en me qualifiant sur une autre course que celles que j'ai toujours faites : les 100 mètres et les 200 mètres nage libre", raconte-t-elle, lors d'une interview organisée Arena, marque dont elle est ambassadrice.

Les résultats suivent. Lors des championnats de France en petit bassin de 2023, elle remporte quatre titres (100 mètres papillon, 200 mètres nage libre, 200 mètres brasse et 200 mètres quatre nages), qui valident ses décisions et ses envies. Elle s'offre même le record de France sur l'épreuve de brasse.

En décembre 2023, six ans après son dernier titre, elle décroche la médaille d'or en finale du 100 mètres quatre nages des championnats d’Europe de natation en petit bassin. Une victoire qu'elle a savoure. "C'était beaucoup de fierté et d'émotion parce que je revenais de loin. Il y a eu des périodes de doute avec beaucoup de remises en question. Je me demandais si ces changements allaient marcher. Et donc quand ça fonctionne, ça fait tellement de bien et tellement plaisir", se remémore-t-elle.

CHAMPIONNE D’EUROPE 🥇🤩🥹 pic.twitter.com/WVsAfb35u1

— Charlotte Bonnet (@BonnetCha) December 7, 2023

Le choix du cœur

Pourtant, si la méthode Lucas porte ses fruits, Charlotte Bonnet prend un nouveau risque à quelques mois des Jeux. Elle décide de quitter le giron du Français pour aller s'installer à Genève. Elle suit ainsi son compagnon, le nageur – et champion – suisse Jérémy Desplanches qui, après des années à s'entraîner en France, avait eu envie de retrouver sa patrie.

"C'était un choix personnel. À 29 ans, je considère que ma vie professionnelle est liée à ma vie personnelle. Si je veux être heureuse, ce n'est pas en vivant à distance de mon mari. Je ne me considère plus comme une ado qui a une amourette de vacances. La décision a été facile à prendre, mais difficile à annoncer à Philippe", souffle-t-elle. "Ça n'a pas été facile pour lui. On voulait aller jusqu’aux Jeux ensemble. Mais rien n'est jamais écrit… Ce sera peut-être un échec, mais je ne pense pas, car il est important que je me sente bien dans ma tête."

La nageuse ne s'estime pas dépaysée outre-Jura, retrouvant des méthodes qui lui rappellent l'avant-Philippe Lucas. Le changement se fait pour le moment dans la sérénité et Charlotte Bonnet prépare avec appétit les championnats de France 2024. À Chartres, elle devra valider ses minima olympiques. Elle espère se qualifier pour le 200 mètres quatre nages, le 100 mètres crawl et 100 mètres brasse.

À la place de Taylor Swift

Trois ans après le calvaire de Tokyo, la nageuse espère désormais profiter des Jeux à Paris. "Je veux me qualifier sur les événements dont j'ai envie. Je ne veux même pas parler de résultats, je veux juste kiffer jusqu'au dernier instant du village et d'avoir les Jeux à la maison, ce qui est unique dans une vie", sourit-elle. "Je veux profiter et avoir une belle fin."

Une note finale à laquelle elle a pensé en assistant à un concert de la superstar américaine Taylor Swift. Un show qui avait lieu à La Defense Arena, là même où se dérouleront les épreuves de natation de Paris 2024 : "C’était fou de se dire qu’il y avait une scène et 45 000 personnes et que dans deux mois, il y aura deux grands bassins…" Et elle, au centre de l’attention.

Plus de 3h de show.. @taylorswift13 a mis le feu à La Défense Arena hier soir🔥 C’était dingue ! 🤩🥳 pic.twitter.com/ptjK9HHIZp

— Charlotte Bonnet (@BonnetCha) May 12, 2024

Pour ses quatrièmes et derniers JO, Charlotte Bonnet sera par ailleurs chargée d'un nouveau rôle, celui de capitaine de l'équipe de France. Un rôle qu'elle prend là aussi de façon détendue, même si elle se dit "contente d'apporter son expérience, son vécu".

Pour elle, les Jeux restent un événement unique dans la vie d'une athlète : "Il faut se rendre compte de la chance qu'on a de les faire. Pendant deux semaines, tu vois d'autres sports que les tiens. Tu vis au village olympique. Tu as l'impression d'appartenir à une famille qui est l'équipe de France olympique", explique-t-elle. "Quand quelqu'un gagne, tu as l'impression que toi aussi, tu as gagné."

Si Tokyo a été douloureux, elle garde au contraire un souvenir particulièrement ému des JO de Londres, ses premiers, qu'elle a disputés à seulement 17 ans. "J'avais vu la victoire des handballeurs, j'avais pu voir le sprint d'Usain Bolt", se rappelle-t-elle.

Et pour ce qui est de ses propres performances, elle y avait décroché la seule médaille olympique de sa carrière, sur le relais 4 x 200 mètres nage libre aux côtés de Camille Muffat, Ophélie-Cyrielle Étienne et Coralie Balmy : "L'émotion est décuplée quand tu es en relais, surtout avec des filles qui sont mes amies dans la vie. Partager ça avec elles, c'était juste dingue."

Après cet été, Charlotte Bonnet quittera donc pour de bon le monde de la natation professionnelle. Sans regrets mais pas sans projets. Elle se voit déjà voyager et poursuivre son engagement, notamment en matière d'écologie et d'accessibilité de la natation pour tous et toutes avec l'association Nageur et citoyen : "J'ai l'impression de transmettre ma passion et mon rêve de petite fille."