Fédératrice et populaire, la reine du Danemark Margrethe II, dernière souveraine d'Europe en exercice, a annoncé dimanche qu’elle allait abdiquer le 14 janvier. Veuve depuis 2018, elle passera le sceptre à son fils aîné, le prince héritier Frederik, 55 ans.
Une page se tourne pour la monarchie danoise. La reine du Danemark Margrethe II a annoncé dimanche 31 décembre, lors de son traditionnel discours du Nouvel An, qu'elle allait abdiquer le 14 janvier, après 52 ans de règne.
"Le 14 janvier 2024, 52 ans après avoir succédé à mon père bien-aimé, je quitterai mes fonctions de reine du Danemark. Je laisserai le trône à mon fils, le prince héritier Frederik", a-t-elle dit à l'occasion de ses vœux télévisés.
Fédératrice et populaire, la souveraine, veuve depuis 2018, avait subi une lourde intervention chirurgicale au dos en février qui l'avait empêché d'apparaître en public jusqu'en avril.
"L'opération a (...) donné lieu à des réflexions sur l'avenir, sur la question de savoir s'il était temps de transférer les responsabilités à la génération suivante", a confié la reine, âgée de 83 ans.
"Beaucoup d'entre nous n'ont jamais connu d'autre monarque. La reine Margrethe est l'incarnation même du Danemark et, au fil des ans, elle a mis des mots et des sentiments sur ce que nous sommes en tant que peuple et en tant que nation", a réagi la Première ministre, Mette Frederiksen dans un communiqué.
Une reine moderne
Toujours tirée à quatre épingles, elle a subtilement modernisé l'image de la monarchie danoise en restant à la tête du petit pays nordique plus d'un demi-siècle.
Le 14 janvier 1972, à la mort de son père Frederik IX, elle est alors la première femme à monter sur ce trône – Margrethe I ne fut officiellement que régente au Moyen-Âge (1375-1412).
C'est d'ailleurs exactement 52 ans plus tard qu'elle passera le sceptre à son fils aîné, le prince héritier Frederik, 55 ans.
Au Danemark, la part des monarchistes culmine à plus de 80 % et la famille royale danoise compte parmi les plus populaires au monde.
Margrethe, dont le règne est le deuxième plus long dans l'histoire du royaume, est une institution qui a longtemps semblé indéboulonnable.
Depuis la disparition de sa lointaine cousine Elizabeth II, elle est l'actuel monarque d'Europe au plus long règne – devant son voisin suédois, et lui aussi cousin, Carl XVI Gustaf, qui vient de fêter ses 50 ans sur le trône. Dans le monde, seul le sultan de Bruneï la dépasse de quatre années.
Surnommée "Daisy"
Si des princesses héritières sont appelées à régner dans plusieurs pays d'Europe, Margrethe est la seule femme du Vieux continent à régner.
Reine, la Danoise aurait pu aussi ne jamais l'être, car la Constitution interdisait jusqu'en 1953 que la couronne arrive sur la tête d'une femme.
Au détriment de son oncle Knud et de son fils, la loi est alors changée par référendum, sous la pression des gouvernements danois soucieux de modernité.
Le fondement de sa popularité, c'est que "la reine n'est pas du tout politique, elle unit la nation au lieu de la diviser", avait expliqué à l'AFP l'historien Lars Hovebakke Sørensen lors des célébrations de ses 50 ans de règne en 2022.
"Elle a réussi à être une reine qui a unifié la nation danoise à travers beaucoup de changements : la mondialisation, l'avènement d'un État multiculturel, des crises économiques (...) et la pandémie de Covid-19", avait-il développé.
Veuve depuis 2018, la reine, affectueusement surnommée "Daisy", a contribué à moderniser progressivement la monarchie sans pour autant la trivialiser.
"Je resterai sur le trône jusqu'à ce que j'en tombe", avait auparavant prévenu cette fumeuse invétérée, mère de deux fils.
What a magnificent queen for the people of Denmark Margrethe II has been. I hope she enjoys a long and happy retirement! pic.twitter.com/RcK1tkuPhe
— Stefan Roberts (@stefanroberts) December 31, 2023Polyglotte et artiste
Créatrice de costumes et scénographe, la reine, née à Copenhague le 16 avril 1940, aime promener son sourire franc à travers le pays.
Chaque été, elle fait une croisière avec son yacht, le Dannebrog, avant de prendre ses quartiers d'été dans le sud-ouest de la France, au château de Cayx.
La souveraine l'avait acheté en 1975 avec feu son mari le prince Henrik, Henri de Monpezat, un diplomate noble né Français, originaire de la région.
Son érudition – elle a étudié à Cambridge et à la Sorbonne – et ses multiples talents font d'elle un exemple pour les Danois, qui suivent religieusement ses interventions télévisées, notamment ses vœux de fin d'année.
Intellectuelle polyglotte, elle s'est essayée à la traduction en élaborant en 1981, sous un pseudonyme et en collaboration avec son mari, une version danoise de l'ouvrage de Simone de Beauvoir "Tous les hommes sont mortels".
Mais c'est surtout dans le dessin et la peinture qu'elle se distingue. Margrethe a illustré de nombreux ouvrages littéraires, comme la réédition en 2002 du "Seigneur des anneaux", de J.R.R Tolkien.
Ses peintures ont été exposées dans de prestigieux musées et galeries – au Danemark et à l'étranger.
Avec AFP