À l'heure du traditionnel bilan de fin d'année, difficile de ne pas sombrer dans l'écoanxiété. Températures, sécheresses, inondations inédites : l'année 2023 s'achève avec de nouveaux records alarmants. Mais, les défenseurs de l'environnement peuvent aussi saluer plusieurs avancées majeures dans la lutte contre le dérèglement climatique. De quoi voir le verre à moitié plein ?

L'année la plus chaude de l'Histoire

Il a fait chaud cette année, parfois très chaud. Cet été, le thermomètre a grimpé jusqu'à 53 °C dans la vallée de la Mort aux États-Unis, 55 °C en Tunisie et 52 °C en Chine. Puis, en septembre, octobre, novembre, les épisodes de chaleur se sont succédé les uns après les autres. La confirmation est finalement tombée début décembre : l'année 2023 a été la plus chaude de l'Histoire.

Pour la période allant de janvier à novembre, la température moyenne à la surface du globe était ainsi 1,46 °C au-dessus de celle de l'ère préindustrielle. Elle était aussi 0,13 °C au-dessus de la moyenne de 2016, l'année la plus chaude auparavant. En cause : les effets conjugués du phénomène climatique El Nino, dans le Pacifique, et du dérèglement climatique.

Les océans en proie à des chaleurs extrêmes

Dans l'eau aussi, on étouffe. Dans le sillage de l'atmosphère, les océans ont connu les journées les plus chaudes de leur histoire pour un mois de mars, d'avril, de mai, de juin, de juillet, d'août, de septembre, d'octobre… Le 30 juillet, la température mondiale à la surface des océans avait même atteint 20,96 °C, selon le service européen de surveillance du climat Copernicus - du jamais-vu, toutes périodes confondues. La mer Méditerranée a elle aussi battu son record de chaleur journalier en août, avec une température médiane de 28,71 °C, selon le principal centre de recherches maritimes espagnol. 

Des records à répétition qui rendent compte de la multiplication des canicules marines, avec des conséquences dramatiques pour la biodiversité.

En Antarctique, une fonte record de la banquise 

16,96 millions de km2. En septembre, la surface de la banquise en Antarctique - qui fond en été et se reconstitue en hiver - n'a jamais été aussi petite depuis le début des relevés scientifiques, selon le National Snow and Ice Data Center (NSIDC), l'observatoire américain de référence. Quelques mois plus tôt, en février, en plein été austral, la banquise antarctique avait déjà atteint un niveau particulièrement bas, avec un record de fonte. Elle a ensuite peiné à se reformer, avec un rythme inhabituellement lent malgré l'arrivée de l'hiver.

De l'autre côté du globe, l'Arctique a lui aussi connu son été (de juillet à septembre) le plus chaud jamais enregistré, avec une température moyenne de 6,4 °C. Une réaction en chaîne du dérèglement climatique : la région est touchée par un phénomène d'"amplification" et se réchauffe plus vite que les latitudes moyennes à cause, notamment, de la fonte de la banquise et du réchauffement des océans.

Des feux de forêt sans précédent

Les images des fumées gagnant le ciel aux États-Unis et en Europe, et le teintant d'une couleur orangée, ont fait le tour du monde. Avec 6 400 incendies et 18,5 millions d'hectares de forêts partis en fumée, le Canada a subi la pire saison des feux de son histoire en 2023. Le précédent record, établi en 1989, était de 7,6 millions d’hectares, soit moins de la moitié de la superficie rasée par les brasiers cette année.

De l'autre côté de la planète, un autre fait exceptionnel a eu lieu en plein cœur de l'été lorsque des milliers de touristes ont dû être évacués de l'île de Rhodes à cause de feux de forêts. Il s'agissait de la plus grande opération d'évacuation jamais effectuée en Grèce.

En Espagne, en France, en Iran, au Kenya… de longues périodes de sécheresse

2023 est aussi l'année de la sécheresse. La France n'a ainsi pas connu de véritable pluie pendant 32 jours consécutifs, du 21 janvier au 21 février, "la plus longue série depuis le début des mesures en 1959", selon l'institut Copernicus. En Espagne aussi, la population a dû faire face à l'absence de pluie pendant plus de 100 jours, ravivant des conflits sur l'usage de l'eau. 

Et l'Union européenne est loin d'avoir été le seul territoire concerné. Début juin, l'Iran alertait que 97 % du pays manquait d'eau à cause d'un manque de précipitations. Une sécheresse historique, débutée en 2020, s'est aussi poursuivie dans la Corne de l'Afrique, avec de graves conséquences sur l'agriculture.  

En Chine, en France, en Slovénie… des pluies d'une intensité inédite

Aux épisodes de sécheresse se sont succédé des pluies d'une intensité inédite, provoquant bien souvent crues et inondations. Début août, un mois de pluie s'est ainsi abattu en 24 heures sur la Slovénie, tuant trois personnes et causant des dégâts estimés à 500 millions d'euros.

Dans la Corne de l'Afrique aussi, la sécheresse a laissé la place à des pluies diluviennes faisant plus de 300 morts et deux millions de déplacés selon l'ONU. En Libye, plusieurs milliers de personnes sont mortes et des dizaines de milliers d'autres ont été déplacées à cause d'inondations dans l'est du pays.

Même constat aux États-Unis, au Japon, au Népal, en Chine ou encore en France, touchée cet automne par des inondations historiques dans le Nord et le Pas-de-Calais.

Les énergies fossiles mentionnées pour la première fois dans un texte final d'une COP

Pour la première fois dans l'histoire des Conférences des Nations unies pour le climat (COP), la COP28 organisée début décembre à Dubaï, aux Émirats arabes unis, s'est achevée avec un texte appelant à abandonner progressivement les énergies fossiles, premières responsables du dérèglement climatique. 

Si le texte est critiqué pour ses nombreuses "lacunes" par des ONG de défense de l'environnement, notamment pour faire la part belle à des technologies de capture de CO2 ou encore présenter le gaz comme "énergie de transition", il peut signer "le début de la fin des énergies fossiles", saluent-elles.

Tirées par le solaire, les énergies renouvelables progressent dans le monde

Les énergies renouvelables se développent à vitesse grand V. Selon un rapport de l’Agence internationale de l’énergie (AIE), elles devraient représenter 4 500 GW de puissance en 2024, soit la production électrique des États-Unis et de la Chine réunis, principalement stimulées par le solaire et de nouvelles capacités d'énergie photovoltaïque. 

Dans l'UE, cette dynamique devrait être aidée par une nouvelle loi énergies renouvelables. Celle-ci fixe l'objectif contraignant d'atteindre 42,5 % d'énergies renouvelables dans la consommation européenne d'ici 2030, contre 22 % aujourd'hui. À l'issue de la COP28, les États membres se sont par ailleurs engagés à tripler la production de ces énergies.

Dans l'UE, une loi sur la restauration de la nature pour préserver la biodiversité

Une bonne nouvelle pour les forêts, les prairies, les tourbières, les lacs, les rivières, les éponges ou encore les coraux. Après des mois de tension et de longues heures de négociations, le Parlement européen et les États de l'UE sont parvenus à un accord en novembre sur un texte relatif à la restauration de la nature. Objectif affiché : la restauration de 20 % des terres et des mers de l'Union européenne d'ici 2030, et de tous les écosystèmes dégradés d'ici 2050 - soit 80 % des habitats naturels totaux.

Si le texte est moins ambitieux qu'il devait être à l'origine, notamment sur les obligations de restauration pour les terres agricoles, il n'en reste pas moins crucial à un moment où la biodiversité s'effondre. 

Un premier traité sur la protection de la haute mer 

Il a constitué l'aboutissement de 15 années de discussions. L'ONU a officiellement adopté en juin le premier traité au monde visant à protéger la haute mer et à préserver la biodiversité marine dans les eaux internationales.

La haute mer commence là où s'arrêtent les zones économiques exclusives (ZEE) des États, à un maximum de 200 milles nautiques (370 km) des côtes, et n'est donc sous la juridiction d'aucun État. Même si elle représente près de la moitié de la planète et plus de 60 % des océans, elle a longtemps été ignorée dans le combat environnemental. Aujourd'hui, environ 1 % seulement de la haute mer fait l'objet de mesures de conservation. Ce nouveau traité doit ainsi permettre la création d’aires marines protégées en haute mer. Le texte devrait entrer en vigueur dès 2025, au moment de la prochaine Conférence des Nations unies sur l'océan en France.

Bientôt un traité contre la pollution plastique ?

Cela pourrait être la bonne nouvelle de 2024. Depuis le début de l'année 2023, les représentants de 175 pays réfléchissent à l'élaboration d'un premier traité mondial pour lutter contre la pollution plastique. Un enjeu de taille alors que le plastique, issu de la pétrochimie, est partout, du fond des océans au sommet des montagnes. 

Il faudra cependant surmonter une divergence de points de vue, certains appelant à un traité contraignant visant à "restreindre et réduire la consommation et la production" de plastique et d'autres plaidant plutôt pour mettre en avant une meilleure gestion des déchets.