Après une semaine de calvaire, tous les otages – soit 201 personnes, selon un dernier bilan – qui restaient retenus par des mutins dans les prisons équatoriennes ont été libérés dans la nuit de samedi 13 à dimanche 14 janvier, a annoncé l'administration pénitentiaire.
Quelques heures plus tard, le général Pablo Velasco a annoncé que "le contrôle a été rétabli dans six centres" de détention, et une opération est "en cours" dans une dernière prison de la province méridionale de Cotopaxi. "[Il n'y a pas eu] d'accord [...], l'intervention militaire a été postérieure à la libération" des otages, a affirmé le général Pablo Velasco.
"Félicitations au travail patriotique, professionnel et courageux des forces armées, de la police nationale et du SNAI [...] pour avoir obtenu la libération des gardiens et des personnels administratifs détenus dans les centres de détention d'Azuay, Cañar, Esmeraldas, Cotopaxi, Tungurahua, El Oro et Loja", a réagi dans la foulée sur X (anciennement Twitter) le président Daniel Noboa.
Felicitaciones a la labor patriótica, profesional y valiente de las Fuerzas Armadas, Policía Nacional y el SNAI bajo el liderazgo de la ministra @Palencia3Monica y Gian Carlo Loffredo por lograr la liberación del cuerpo de seguridad y vigilancia penitenciario y el personal…
— Daniel Noboa Azin (@DanielNoboaOk) January 14, 2024Selon la police, ce sont 46 gardiens et un fonctionnaire qui ont été libérés de la prison de Cotopaxi (centre), treize de la prison de Tungurahua (centre) et quinze autres de la prison d'El Oro (sud-ouest), où a été retrouvé le corps sans vie d'un fonctionnaire.
Les images diffusées par la police ont montré les gardiens, parmi lesquels de nombreuses femmes, en pleurs, épuisés et soutenus par leurs collègues peu après leur libération.
"Grâce à Dieu, nous nous en sommes tous bien sortis. Nous sommes en bonne santé. En espérant que ce sera un grand pas pour le pays vers la paix", ont déclaré dans une autre vidéo sur les réseaux sociaux les otages libérés de Cotopaxi, brandissant un drapeau équatorien.
Depuis une semaine que durait leur détention, des otages, sous la menace des mutins armés de couteaux ou d'armes à feu, appelaient régulièrement les autorités à l'aide et à la retenue, selon des vidéos diffusées régulièrement sur les réseaux. Au moins deux d'entre eux, dont l'un a été pendu, ont été exécutés par les mutins, selon des images atroces.
Les quelque 175 gardiens et fonctionnaires de l'administration pénitentiaire avaient été pris en otage en fin de semaine dernière. Une quarantaine d'entre eux avaient été libérés samedi dans la journée, les autorités évoquant une médiation de l'Église catholique. Tout au long de ces prises d'otage, l'administration pénitentiaire (SNAI) a donné très peu de détails, les forces de sécurité affrontant les prisonniers mutins dans certains pénitenciers et négociant avec eux dans d'autres.
Plus de 22 400 militaires déployés
L'annonce de l'évasion, le 7 janvier, du pénitencier de Guayaquil (sud-ouest), du redouté chef du gang des Choneros, Adolfo Macias, alias "Fito", a provoqué une vague de mutineries et de prises d'otages dans au moins cinq prisons équatoriennes, ainsi que des attaques contre les forces de l'ordre et d'autres actes visant à semer la terreur. Au moins 19 personnes ont été tuées, selon le dernier bilan officiel actualisé.
Le jeune président, Daniel Noboa, a décrété l'état d'urgence et ordonné à l'armée de neutraliser ces bandes criminelles, désormais considérées comme "terroristes". Plus de 22 400 militaires ont été déployés pour mener des patrouilles terrestres, aériennes et maritimes. Des perquisitions et des opérations à tout va sont en cours dans les prisons, tandis qu'un couvre-feu a été imposé.
Après la vague de panique dans tout le pays provoquée par l'attaque en direct mardi des studios d'une TV publique à Guayaquil, grand port sur la côte sud-ouest et épicentre de la violence des narcos, la situation est revenue à une relative normalité.
En journée, l'activité a repris quasi normalement, à Guayaquil comme à Quito, même si les Équatoriens rentrent rapidement se mettre en sécurité chez eux en fin d'après-midi.
Violences des bandes criminelles
Considéré comme un havre de paix sous les présidences de Rafael Correa (2007-2017), durant lesquelles le taux d'homicides volontaires devient l'un des plus bas d'Amérique du Sud, l'Équateur est devenu ces dernières années le centre d'expédition de la cocaïne produite chez les voisins colombien et péruvien et la situation s'est fortement dégradée.
Les narcotrafiquants ont peu à peu imposé leur loi dans le pays, livré à la violence des bandes criminelles. Les prisons équatoriennes, surpeuplées et mises en coupe réglée par les gangs, sont notamment le théâtre régulier d'affrontements sanglants entre ces bandes rivales : Choneros (ceux de Chone, ville de l'ouest du pays), Tiguerones (Tigres), Lobos (Loups) et autres Aguilas (Aigles).
Élu en novembre dernier sur la promesse de rétablir la sécurité, Daniel Noboa, 36 ans, est le plus jeune président de l'histoire du pays. Son prédécesseur, le conservateur Guillermo Lasso, a été confronté à plusieurs crises de violences dans les prisons et a décrété l'état d'urgence plusieurs fois, sans parvenir à reprendre le contrôle de la situation, et plus généralement à endiguer le narcotrafic, lié à la corruption qui gangrène le pays.
Avec AFP