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Au Brésil, les bureaux de vote ont fermé, après une journée de vote dimanche, lors d'une présidentielle extrêmement polarisée, avec le choc entre le favori de gauche Lula et le sortant d'extrême droite Jair Bolsonaro.

Les bureaux de vote ont fermé, dimanche 2 octobre, à 17 h (20 h GMT) dans tout le Brésil, où 156 millions d'électeurs étaient appelés à élire leur prochain président, mais aussi leurs gouverneurs, un tiers des sénateurs et les députés fédéraux et des 27 États.

Si l'élection s'est déroulée d'une manière "absolument tranquille", selon le président du Tribunal supérieur électoral (TSE), Alexandre de Moraes, le président sortant Jair Bolsonaro a laissé entendre qu'il pourrait ne pas reconnaître le résultat du vote en cas de victoire de son adversaire, l'ex-chef d'État et favori Lula.

Cette élection lourde d'incertitudes est décisive pour l'avenir de la jeune démocratie au Brésil, première puissance d'Amérique latine très fracturée.

Le choc au sommet entre les ennemis jurés Jair Bolsonaro, 67 ans, et Luiz Inacio Lula da Silva, 76 ans, a relégué les neuf autres candidats au rang de figurants.

Les bureaux de vote ont fermé lors d'élections sous haute tension au Brésil

Lula et Bolsonaro ont voté

Lula, vêtu d'un costume marine, a voté à Sao Bernardo do Campo, une banlieue ouvrière de Sao Paulo. "Nous ne voulons plus de haine, de discorde. Nous voulons un pays en paix" a-t-il dit en référence aux fractures du pays.

Votant peu après à Rio de Janeiro, Bolsonaro, vêtu du maillot jaune et vert de l'équipe nationale de football sous lequel il portait un gilet pare-balle, a laissé planer le doute sur une éventuelle contestation du résultat.

"Si les élections sont propres, aucun problème. Que le meilleur gagne !", a déclaré le chef de l'État, qui a multiplié les critiques envers le système d'urnes électroniques.

À la mi-journée, le président du Tribunal supérieur électoral (TSE), Alexandre de Moraes, a assuré que le vote se déroulait "sans problème", et a tenu à "réaffirmer la fiabilité et la transparence" du système d'urnes électroniques, moult fois critiqué par Jair Bolsonaro.

L'ex-président Lula (2003-2010) était toujours le grand favori dans le dernier sondage Datafolha, samedi soir, avec 50 % des votes valides contre 36 % à Bolsonaro.

"La question est de savoir s'il y aura un 2e tour ou non, et c'est impossible à prédire", a affirmé à l'AFP Adriano Laureno, analyste chez les consultants Prospectiva.

Une victoire de Lula, qui a marqué la vie politique brésilienne depuis un demi-siècle et concourt à sa 6e présidentielle, signerait un comeback inespéré quatre ans après son incarcération controversée pour des soupçons de corruption.

Le dernier débat présidentiel, jeudi, a illustré le degré de haine entre les deux favoris qui se sont écharpés, s'accusant d'être "menteur" ou "corrompu".

La campagne, menée en gilet pare-balle par les candidats, a elle aussi été tendue. Elle a charrié des tombereaux d'attaques personnelles, livré peu de projets pour le Brésil, et s'est déroulée dans un climat délétère.

Ainsi pour de nombreux Brésiliens, l'élection de Lula dès le premier tour permettrait d"'en finir" et d'échapper à quatre semaines supplémentaires de campagne à couteaux tirés jusqu'à un second tour le 30 octobre.

La crainte de troubles après l'élection

L'abstention pourrait pénaliser davantage Lula. Un second tour pourrait permettre à Bolsonaro, selon les analystes, de galvaniser ses troupes et de trouver un nouvel élan.

Mais espérant une victoire dès le 1er tour, l'équipe de Lula a fait campagne pour le "vote utile", lorgnant du côté des électeurs de Ciro Gomes (centre gauche), 4e dans les sondages avec 5 % des intentions de vote.

Jair Bolsonaro a affirmé qu'il serait "anormal" qu'il n'obtienne pas au moins 60 % des voix dimanche et rejette les sondages "mensongers".

"Je pense qu'il va contester le résultat s'il perd" dit Adriano Laureno, "mais cela ne veut pas dire qu'il va réussir. La communauté internationale va reconnaître le résultat rapidement".

L'ex-capitaine de l'armée a lancé des attaques innombrables contre la fiabilité des urnes électroniques, laissant planer la menace d'un coup de force. La crainte d'un remake brésilien de l'assaut du Capitole à Washington en 2021, après la défaite de Donald Trump, est dans tous les esprits.

L'armée n'a donné aucun signe d'agitation et les États-Unis ont indiqué qu'ils allaient "suivre de près" l'élection.

Plus de 500 000 membres des forces de l'ordre doivent assurer la sécurité et des dizaines d'observateurs étrangers surveiller le déroulement du vote.

Bolsonaro, champion du vote évangélique

Lula, le chef du Parti des travailleurs (PT), a réuni une vaste coalition de dix partis allant jusqu'au centre droit de son colistier, l'ex-gouverneur de Sao Paulo Geraldo Alckmin, choisi pour rassurer les milieux économiques.

Il a le vote majoritaire des femmes, des jeunes et des classes défavorisées.

Bolsonaro se présente sous l'étiquette du petit Parti libéral (PL) et bénéficie du soutien enthousiaste des évangéliques, du lobby de l'agronégoce et des pro-armes, et de l'appui, plus réservé, du patronat.

La majorité des Brésiliens attendent de leur président qu'il lutte contre la faim dont souffrent 30 millions d'entre eux, l'inflation et le chômage qui ont renforcé la précarité et la corruption.

Lula, qui avait extrait 30 millions de Brésiliens de la pauvreté, a promis de la viande pour chacun et "la démocratie contre le fascisme". Mais, pour beaucoup, il incarne irrémédiablement la corruption.

Bolsonaro défend les valeurs traditionnelles - Dieu, patrie, famille. Mais sa gestion jugée catastrophique du Covid-19 (685 000 morts) pourrait lui coûter cher, de même que les crises ayant jalonné son mandat.

Les Brésiliens élisent aussi, dimanche, leurs 513 députés fédéraux, les gouverneurs des 27 États et les députés des assemblées des États. Comme le président, tous ont un mandat de quatre ans. Un tiers des 81 sièges du Sénat sera aussi renouvelé, mais pour huit ans.

Les bureaux de vote ont fermé lors d'élections sous haute tension au Brésil

Avec AFP