La réforme constitutionnelle au Kazakhstan a été approuvée par 77 % des voix lors d'un référendum organisé dimanche dans ce pays d'Asie centrale et censé clore l'ère de l'ex-président Noursoultan Nazarbaïev et de son clan, au pouvoir pendant 30 ans.
Le Kazakhstan a approuvé, dimanche 5 juin, une modification de sa Constitution. La réforme a été adoptée par 77 % des voix lors d'un référendum censé clore l'ère de l'ex-président Noursoultan Nazarbaïev et de son clan, aux commandes de ce pays d'Asie centrale pendant 30 ans.
"Le référendum peut être considéré comme validé", a déclaré le président de la Commission électorale centrale, Nourlan Abdirov, en annonçant ces résultats et précisant que le taux de participation a dépassé 68 %.
Le Kazakhstan, riche en minerais et en hydrocarbures, a été secoué en janvier par des violences qui ont fait plus de 230 morts.
Ces troubles, les plus meurtriers depuis l'indépendance de ce pays en 1991, avaient été précédés par des protestations pacifiques contre la hausse du prix du carburant, puis ont dégénéré en affrontements entre forces de l'ordre et civils.
Avant les émeutes, l'actuel président kazakhstanais Kassym-Jomart Tokaïev, 69 ans, était largement considéré comme l'homme de main de Noursoultan Nazarbaïev, 81 ans, qui avait démissionné en 2019, tout en continuant à jouer dans l'ombre un grand rôle.
Mais les violences de janvier ont marqué un tournant, Kassym-Jomart Tokaïev semblant avoir profité de la crise pour brider l'influence de son prédécesseur et évincer certains de ses proches.
Noursoultan Nazarbaïev ne sera plus "chef de la Nation"
Les changements constitutionnels, soumis au référendum de dimanche, prévoient une modification d'environ un tiers des articles de la Loi fondamentale kazakhstanaise et, tout particulièrement, le retrait à Noursoultan Nazarbaïev du titre d'"Elbassy" – "chef de la Nation" –, un statut qui lui donne une autorité considérable.
Un amendement prévoit que les proches des dirigeants ne puissent pas occuper des fonctions gouvernementales majeures, une mesure visant manifestement la famille Nazarbaïev.
Selon Kassym-Jomart Tokaïev, la révision constitutionnelle a pour but de supprimer l'actuel régime "superprésidentiel", longtemps marqué par le culte de la personnalité de Noursoultan Nazarbaïev.
Aucune campagne pour le "non" n'a eu lieu dans cet État connu pour réprimer toute voix critique.
À Almaty, la plus grande ville du Kazakhstan, de petites files d'attente s'étaient formées devant les bureaux de vote, a constaté l'AFP.
Ayan, un étudiant de 18 ans qui a voté pour la première fois de sa vie, s'est dit satisfait que le statut privilégié de Noursoultan Nazarbaïev soit supprimé. L'ex-président "a une place dans nos livres d'histoire, mais tous les citoyens devraient être égaux devant la Constitution", a-t-il déclaré.
Toutefois, dans la capitale Noursoultan, Bolat, un homme d'affaires de 46 ans, a expliqué qu'il ne voterait pas car ce référendum "est une formalité destinée à consolider la position du pouvoir actuel".
Les émeutes de janvier, un tournant
Les causes précises des émeutes de janvier restent mystérieuses. Elles avaient dévasté le centre d'Almaty mais épargné Noursoultan, l'ancienne Astana, rebaptisée en 2018 en l'honneur de Noursoultan Nazarbaïev.
Le président Tokaïev avait accusé des "terroristes" d'avoir voulu prendre le pouvoir.
L'arrestation, le 8 janvier, d'un proche de Noursoultan Nazarbaïev, Karim Massimov, alors chef du Conseil de sécurité nationale, avait toutefois alimenté les conjectures sur une lutte de pouvoir.
Après la crise, Kassym-Jomart Tokaïev a aussi critiqué Noursoultan Nazarbaïev publiquement, l'accusant d'avoir protégé les "riches". Un neveu de l'ex-chef de l'État, Kaïrat Satybaldy, a été arrêté en mars, accusé de détournements de fonds.
Kassym-Jomart Tokaïev a néanmoins également loué les travaux accomplis par Noursoultan Nazarbaïev, un ancien cadre du Parti communiste qui a développé cet immense pays couvert de steppes en s'appuyant sur la manne des hydrocarbures.
Noursoultan Nazarbaïev et Kassym-Jomart Tokaïev prônent tous deux des liens étroits avec la Russie voisine, tout en maintenant des partenariats avec les Occidentaux et la Chine.
Au moment des émeutes, Kassym-Jomart Tokaïev avait appelé à l'aide Moscou, qui avait envoyé des troupes, dans le cadre de l'alliance militaire unissant les deux pays. Le Kremlin assure que cette intervention n'a eu aucune contrepartie politique.
Depuis janvier, Noursoultan Nazarbaïev n'a quasiment pas fait d'apparitions publiques. Mais il a donné lundi une interview dans laquelle il a appelé à voter en faveur de la révision constitutionnelle.
Avec AFP