La gauche française est suspendue dimanche au verdict de la Primaire populaire. Si Christiane Taubira est donnée favorite, une surprise n'est pas à exclure, y compris la victoire d'un candidat refusant de reconnaître le résultat, au risque d'ajouter encore à la confusion.
Une ultime tentative pour fédérer la gauche. Les quelque 467 000 inscrits qui ont commencé à voter en ligne depuis jeudi dans le cadre de la Primaire populaire ont jusqu'à 17 h ce dimanche 30 janvier pour choisir la personnalité de gauche qu’ils jugent la plus apte à les représenter lors de l’élection présidentielle française. Le résultat devrait être connu à partir de 19 h.
À la fermeture des votes, 392 738 votants ont été enregistrés, soit un taux de participation de 84,1%, selon les organisateurs.
À la base, la Primaire populaire avait un objectif simple : désigner un champion capable de réunir toute la gauche pour porter le fer à la présidentielle et pousser la porte du deuxième tour. Pour cela, cette initiative citoyenne a fini par sélectionner sept candidats, issus des différentes sensibilités de gauche : écologiste, socialiste et insoumise. Limpide.
Une primaire très populaire
Sauf que trois des sept candidats et pas des moindres – Anne Hidalgo, Yannick Jadot, Jean-Luc Mélenchon – ont demandé, en vain, à ne pas être mêlé à cette affaire et refusent de se plier au résultat du vote.
"Pour moi, la page de la Primaire populaire est tournée depuis un moment", a répété Yannick Jadot samedi.
Le chiffre de 467 000 inscrits à la Primaire populaire a pourtant été salué comme un vrai succès populaire, au regard des 22 000 militants de l'investiture socialiste, des 122 000 participants à la primaire écologiste, des près de 140 000 du congrès des Républicains et des 272 000 parrainages militants de Jean-Luc Mélenchon.
Le signe aussi, selon ses promoteurs, que l'heure n'est plus aux grands partis, mais aux citoyens prêts à se réapproprier la politique et ressusciter une famille de gauche aussi divisée qu'affaiblie, qui pèse à peine un quart des intentions de vote.
Mais que se passera-t-il si dimanche l'un des trois "malgré nous" est désigné vainqueur ? Un cas de figure qui n'est pas à écarter car les partis n'ont pas interdit à leurs militants d'y participer. Au contraire, plusieurs fédérations socialistes ont même appelé à voter et la numéro 2 du PS, Corinne Narassiguin, a indiqué qu'elle allait le faire.
Le mode de scrutin pourrait également réserver son lot de surprises. Les votants doivent classer les candidats avec les mentions suivantes : "très bien", "bien", "assez bien", "passable", "insuffisant(e)". Et le candidat qui obtient la meilleure médiane remporte l'élection.
Pour bénéficier du soutien de la Primaire populaire, le vainqueur devra encore ensuite signer un "contrat de rassemblement" et "inclure l'esprit du socle commun programmatique dans son programme".
"Farce" et "machine à perdre"
Un prérequis qui paraît totalement illusoire pour les candidats réfractaires. Jean-Luc Mélenchon décrit la Primaire populaire comme une "farce", Yannick Jadot comme une "machine à perdre" et Anne Hidalgo comme une "démarche qui ne crée aucune obligation".
Dès lors, le scénario le plus "confortable" reste une victoire de Christiane Taubira face aux trois autres candidats moins connus, le député européen Pierre Larrouturou et deux personnes de la société civile, Charlotte Marchandise et Anna Agueb-Porterie.
À l'inverse de ses trois principaux concurrents, l'ancienne garde des Sceaux a promis de respecter à la fois résultat et modalités pour la suite. "Je vais rejoindre la personne qui aura été désignée. À charge pour elle évidemment de créer les conditions de l'union", a-t-elle répété vendredi sur BFMTV.
Mais si le vainqueur ne reconnaît pas le processus ? Alors "on n'est pas dans le même cas de figure, mais nous verrons tranquillement dimanche", a-t-elle ajouté, refusant de dire clairement si elle se retirait, ou non, en cas de défaite.
Pour Anne Hidalgo, qui estime que le scénario d'une victoire de Christiane Taubira est "un peu écrit d'avance", "il n'y en a qu'une qui reconnaît le processus, c'est elle, et donc elle se ralliera à elle-même".
Et au final, ajoute la maire de Paris, l'ex-ministre de la Justice ne sera donc qu'"une candidate de plus" à gauche, où il faut également compter sur le communiste Fabien Roussel, non sélectionné pour la Primaire populaire.
Avec AFP