Le grand emprunt lancé par la France devrait finalement être intégralement financé par les marchés, affirme la ministre française de l'Économie, ce mercredi, qui confirme aussi que son montant devrait s'élever à 35 milliards d'euros.
REUTERS - Le "grand emprunt" annoncé par Nicolas Sarkozy en juin dernier ne concernerait finalement pas les ménages mais s'opérerait uniquement sur les marchés financiers, une option politiquement plus banale.
L'ancien Premier ministre socialiste Michel Rocard, chargé de réfléchir à ce dossier avec le maire UMP de Bordeaux Alain Juppé, et qui remettra ses propositions mercredi, le déclare dans un entretien publié mercredi par le journal gratuit Direct matin.
"Pour lever auprès des particuliers, il faudrait les allécher, ce qui coûte plus cher. Ça ne vaut pas le coup. Nous lèverons tout auprès des marchés, sans doute en deux fois, mais avec une sélection de secteurs", a-t-il déclaré.
La ministre de l'Economie Christine Lagarde a confirmé cette option sur France info, en confirmant le chiffre déjà évoqué de 35 milliards d'euros.
"Ca me parait, si c'est le cas, une bonne décision sur le plan financier. Un grand emprunt qui est financé par appel aux marchés coûte généralement moins cher qu'un grand emprunt qui s'adresse à l'ensemble de nos concitoyens", a dit Christine Lagarde.
"Je crois que ce qui est important dans le grand emprunt, c'est le mot 'grand', c'est pas forcément le mot 'emprunt'", a-t-elle dit.
Tournant politique
Si elle se confirmait, une telle orientation serait un tournant politique, le "grand emprunt" ayant été conçu au départ par Nicolas Sarkozy comme un moyen de relancer la confiance dans le pays et de solliciter symboliquement l'appui des Français.
Par ailleurs, il est évoqué l'idée d'utiliser l'argent des aides remboursées par les banques, soit 13 milliards d'euros, pour financer l'opération, ce qui ramènerait l'emprunt proprement dit à 22 milliards d'euros.
Ce chiffre ne sera peut-être in fine que d'une douzaine de milliards en 2010 car, selon le Canard enchâiné, le Trésor a déjà augmenté pour cette année ses emprunts habituels sur les marchés de dix milliards d'euros.
La France, qui présente des budgets en déficit depuis les années 1970, emprunte tous les jours sur les marchés financiers et l'opération annoncée sera donc en elle-même banale, même si le montant reste important.
L'emprunt sur les marchés est une option d'autant plus économique que les taux sont très bas actuellement.
Solliciter les ménages supposerait une rémunération attractive et des frais bancaires, ce qui coûterait, selon une estimation officielle évoquée aussi mercredi par le Canard enchaîné, cinq milliards d'euros.
Le débat sur ce dossier a enflammé la majorité depuis plusieurs mois. Le conseiller spécial de Nicolas Sarkozy Henri Guaino, appuyé par certaines personnalités de l'UMP, souhaitait que soit emprunté jusqu'à 100 milliards d'euros.
Le ministre du Budget Eric Woerth et d'autres ont cependant obtenu finalement que l'opération soit ramenée à des niveaux plus banals, en insistant sur le fait que les déficits publics français atteindront des records en 2010 en raison de la crise et des dépenses de l'Etat visant à stimuler l'économie.