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Le président biélorusse Alexandre Loukachenko s'est exprimé mercredi devant le Parlement, tandis que le Conseil de sécurité de l'ONU doit se réunir à huis clos pour évoquer le détournement d'un avion de ligne européen. Mais les diplomates s'attendent à ce que la Russie s'oppose à une déclaration commune.

Le président biélorusse Alexandre Loukachenko, accusé d'avoir fait détourner un avion de ligne européen pour arrêter un opposant à bord, a prononcé mercredi 25 mai un discours devant le Parlement tandis que le Conseil de sécurité de l'ONU doit tenir une réunion à huis clos. Alexandre Loukachenko était jusqu'à présent resté silencieux, à l'écart d'une avalanche de déclarations indignées – européennes et américaines – et d'annonces de sanctions.

Le président bélarusse a affirmé avoir agi "légalement" en déroutant un avion civil sur Minsk après une alerte à la bombe, rejetant l'accusation d'avoir détourné le vol pour arrêter cet opposant.

"J'ai agi légalement en protégeant les gens", a-t-il dit, dans un discours devant des élus et d'autres hauts responsables du régime. 

"C'est un mensonge absolu (de dire) que l'avion a été forcé d'atterrir par un Mig 29", a-t-il martelé, "la mission de l'avion de chasse était d'établir la communication, d'accompagner l'atterrissage de l'avion de passagers en cas de situation d'urgence".

L'interception, dimanche, du vol Athènes-Vilnius opéré par la compagnie Ryanair, a suscité un scandale d'ampleur internationale.

À l'issue de cette opération dirigée par les services de sécurité biélorusse, deux passagers ont été arrêtés à l'aéroport de Minsk : Roman Protassevitch, un journaliste d'opposition de 26 ans exilé en Lituanie, et sa compagne russe, Sofia Sapega.

"Ils vont le tuer "

Natalia, la mère du photographe et militant, dit n'avoir pas dormi depuis deux nuits, serrant son téléphone dans ses mains dans l'espoir de recevoir des nouvelles. "Je demande, je supplie, j'appelle toute la communauté internationale à le sauver", a-t-elle lancé, fondant en larmes, lors d'un entretien accordé à l'AFP à Wroclaw, en Pologne, où le couple s'est installé. "S'il vous plaît, sauvez-le ! Ils vont le tuer !"

Le Conseil de sécurité de l'ONU tiendra mercredi en milieu de journée une réunion informelle d'urgence à huis clos sur le sujet, ont indiqué à l'AFP des sources diplomatiques. Cette session, qui devrait être virtuelle, a été demandée par la France, l'Irlande et l'Estonie, ont précisé des diplomates.

Interrogés par l'AFP, des diplomates jugent peu probable que les membres Conseil de sécurité de l'ONU puissent s'entendre sur une déclaration commune. Soutien de la Biélorussie, la Russie devrait s'y opposer, prédit une source sous couvert d'anonymat.

De nombreuses compagnies aériennes ont suivi mardi la recommandation de l'Union européenne de contourner le pays et ont suspendu leur vols. L'espace aérien européen a par ailleurs été fermé aux appareils biélorusses.

Des dirigeants européens ont continué mardi d'exprimer leur colère et leur exaspération. Le chef de la diplomatie allemande, Heiko Maas, a assuré qu'Alexandre Loukachenko devait "payer le prix fort" pour son "acte infâme". Le président français, Emmanuel Macron, estime pour sa part que "la politique des sanctions" avait atteint ses limites.

De son côté, Jean-Yves le Drian, a estimé que l'absence de réaction de la Russie équivalait à cautionner la décision de la Biélorussie de faire atterrir de force cet avion. "Si d'aventure le président (russe Vladimir) Poutine voulait se démarquer du président (biélorusse Alexandre) Loukachenko, il le ferait. Au contraire il semble bien qu'on banalise cet événement qui est un événement très grave", a déclaré le ministre français des Affaires étrangères sur France 2.

Pression de l'opposition

La Biélorussie a invité mardi les organisations internationales à venir établir "les circonstances" du détournement de l'avion par Minsk – l'Association internationale du transport aérien (IATA) et l'Organisation de l'aviation civile internationale (OACI), dépendante de l'ONU, ainsi que des autorités américaines et de l'Union européenne.

De son côté, l'opposition biélorusse, dont la plupart des représentants sont exilés ou emprisonnés, a réclamé de nouvelles représailles. Exilée en Lituanie, l'ex-candidate à la présidentielle Svetlana Tikhanovskaïa a appelé les États-Unis à "isoler le régime et à faire pression avec des sanctions".

Elle a aussi réclamé "la participation des forces démocratiques biélorusses au G7", du 11 au 13 juin au Royaume-Uni. Emmanuel Macron s'y est dit favorable. Le Premier ministre canadien Justin Trudeau a quant à lui assuré "soutenir fermement une action via toutes les institutions internationales possibles", y compris l'Otan.

Avec AFP