Depuis le début du mois d'octobre, les attaques des Taliban se sont multipliées au Pakistan, tuant plus d’une centaine de personnes. Les spécialistes en retiennent surtout les nouveaux modes opératoires des combattants islamistes.
Plus organisées, plus violentes et imprévisibles : tels sont les caractéristiques des dernières attaques des Taliban, qui ont ensanglanté le Pakistan. "Les attentats se multiplient et les processus varient", confirme à FRANCE 24 Alain Lamballe, ancien attaché militaire de la France en Inde et au Pakistan.
Derrière la vague de violence intervenue ces dernières semaines se trouve un homme, Hakimullah Mehsud. Donné pour mort par l’armée, le nouvel homme fort des Taliban pakistanais s’est exprimé dans une vidéo, le 5 octobre, infligeant un cinglant camouflet à Islamabad. Dans son intervention, il promet, notamment, de mettre le pays à feu et à sang pour venger la mort de Baitullah Mehsud, son prédécesseur.
femmes kamikazes
Depuis lors, les Taliban pakistanais sont passés de la parole aux actes. Islamabad, Lahore ou encore Peshawar : aucune ville du pays n’est épargnée. Toutes subissent la nouvelle stratégie de terreur mise au point par les rebelles islamistes. L'utilisation de femmes kamikazes, à Lahore, le 15 octobre, et à Peshawar, le lendemain, a particulièrement frappé la population.
"Le recours aux femmes n’avait encore jamais eu lieu au Pakistan", souligne Alain Lamballe. Depuis, les femmes vêtues du niqab ou de la burqua sont souvent soupçonnées d’être des terroristes en puissance.
Les hommes d’Hakimullah Mehsud sont, en outre, mieux équipés. À preuve : les deux opérations qu'ils ont menées, les 5 et 10-11 octobre. À Islamabad, un kamikaze qui avait revêtu un uniforme de policier s’est fait exploser en plein cœur de la zone ultra-sécurisée de l’ONU. À Rawalpindi, cinq jours plus tard, d'autres combattants déguisés en militaires ont réussi à s’introduire dans le quartier général de l’armée et à prendre en otage 25 soldats.
"Ce sont des attaques qui prouvent que les Taliban préparent désormais leurs attaques longtemps à l’avance, parfois des mois", explique à FRANCE 24 Muhammad Amir Rana, un spécialiste pakistanais du mouvement islamiste. La plus spectaculaire des opérations, parce qu'elle a requis une lourde préparation, s’est déroulée le 15 octobre, lorsque sept attaques se sont déroulées dans tout le pays en quelques heures. "Tous ces attentats ont créé un climat de peur au sein de la population, qui en veut de plus en plus au gouvernement de ne pas parvenir à empêcher les Taliban d'agir", précise Cédric Molle-Laurençon, correspondant de FRANCE 24 à Islamabad.
Plus de 100 000 réfugiés
D'abord prises au dépourvu par cette accélération de la violence, les autorités ont finalement décidé, dimanche dernier, de lancer une vaste opération au Sud-Waziristan, fief du Mouvement des Taliban du Pakistan (TTP). Depuis, près de 28 000 soldats y affrontent quelque 10 000 rebelles islamistes. Conséquence la plus visible des combats, pour l'instant : la fuite de plus de 100 000 personnes de la région. "Ces réfugiés partent avec un fort ressentiment contre le gouvernement pakistanais", rapporte Anne-Isabelle Tollet, envoyé spéciale de FRANCE 24 au Pakistan, et l’une des rares journalistes à avoir pu se rendre dans la région où se déroulent les combats.
itPour la plupart des spécialistes, les deux derniers attentats en date, qui ont coûté la vie à un haut gradé de l’armée, ce jeudi, et frappé l’université islamique d'Islamabad, mardi, tuant cinq personnes au passage, constituent la première réponse des Taliban à l’offensive déclenchée au Sud-Waziristan.