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La Hongrie suspend une radio indépendante critique vis-à-vis du gouvernement

En Hongrie, la radio indépendante Klubradio, souvent critique vis-à-vis du gouvernement de Viktor Orban, n'émettra plus à partir du 14 février, selon une décision du Conseil des médias qui chapeaute les entreprises d'information dans le pays. Une décision qui inquiète le Conseil de l'Europe. 

Le Conseil de l'Europe dénonce une nouvelle atteinte à la liberté de la presse en Hongrie. La première station de radio indépendante de cet État membre de l'Union européenne (UE) va cesser d'émettre après avoir été déboutée, mardi 9 février, de son appel pour garder sa licence.

Le responsable de Klubradio, au contenu souvent critique vis-à-vis du gouvernement souverainiste de Viktor Orban, a dénoncé "une décision politique, honteuse et lâche" du tribunal municipal de Budapest.  

"Nous déposerons un ultime recours auprès de la Cour suprême", a déclaré Andras Arato à l'AFP. Il a promis de continuer le travail sur internet dès lundi, invitant les auditeurs à "soutenir" l'équipe.

"Dans une dictature, il n'y a pas de place pour les voix libres", a réagi, amer, un des présentateurs, Janos Desi. 

En septembre dernier, le Conseil des médias (NMHH), une tutelle qui chapeaute toutes les entreprises d'information en Hongrie, avait refusé de prolonger l'autorisation d'exploitation de la radio, qui arrive à son terme le 14 février.

Le puissant NMHH, créé en 2011 sous l'égide de Viktor Orban, affirme que la station a soumis, à deux reprises en un an, des documents administratifs avec retard.

Il l'a toutefois autorisée à se porter candidate sur la même fréquence desservant principalement la capitale, Budapest.

Branle-bas de combat pour préserver sa licence 

Klubradio, criant à la discrimination, avait alors saisi la justice afin de demander une licence temporaire en attendant le résultat de l'appel d'offres, qui n'est pas attendu avant plusieurs mois. Deux autres radios ont également postulé.

Mais le tribunal a jugé que cette requête "dépassait le champ de ses compétences" et sur la question de la violation des règles, il a donné raison à NMHH, assurant que les renouvellements de licences n'étaient pas automatiques.

Il s'agit là d'un nouveau revers pour les médias indépendants hongrois, sous pression depuis le retour au pouvoir en 2010 de Viktor Orban.

Klubradio, qui avait commencé à émettre dans les années 1990, a été confrontée ces dernières années à une série d'obstacles et de batailles juridiques pour pouvoir rester à l'antenne.

Au-delà de ce cas, de nombreux médias indépendants ont dû mettre la clé sous la porte ou ont été repris par des proches du pouvoir, à l'image du principal site d'information Index, dont les journalistes avaient démissionné avec fracas à l'été 2020.

Pendant ce temps, la presse publique est accusée d'avoir été transformée en outil de propagande. 

Une décision condamnée par Bruxelles Washington et Paris 

"Une autre voix réduite au silence en Hongrie. Un autre triste jour pour la liberté des médias", a réagi sur Twitter la commissaire aux droits de l'Homme du Conseil de l'Europe, Dunja Mijatovic.

Today’s ruling of the Budapest Court seals the fate of #Hungary’s last independent radio station. Recently redesigned media laws leave #Klubradio no other way to extend its airwaves license beyond 14 February. Another silenced voice in Hungary. Another sad day for #MediaFreedom. pic.twitter.com/dHBmgLSVBQ

— Commissioner for Human Rights (@CommissionerHR) February 9, 2021

La Commission européenne a elle aussi dénoncé la suspension de la radio. "Nous sommes en contact avec les autorités hongroises afin de garantir que Klubradio puisse continuer à fonctionner légalement", a affirmé mercredi un porte-parole de l'exécutif européen. "Nous n'hésiterons pas à prendre des mesures si cela est possible et nécessaire", a-t-il ajouté.

Les États-Unis ont, quant à eux, exprimé leur inquiétude face à "une nouvelle atteinte à la liberté de la presse en Hongrie".  

"Nous encourageons le gouvernement hongrois à promouvoir un espace médiatique ouvert, à faire respecter l'État de droit et le principe de transparence", a déclaré le porte-parole du département d'État Ned Price.

De son côté, la diplomatie française, voyant là "un signal très inquiétant en termes de pluralisme et d'indépendance des médias", a appelé la Hongrie à "respecter ses engagements européens en la matière".

La Hongrie occupe actuellement la 89e place sur 180 au classement mondial de la liberté de la presse, publié par l'ONG Reporters sans frontières (RSF). Elle était 23e lorsque Viktor Orban est devenu Premier ministre il y a 10 ans.

Fin 2018, Bruxelles a déclenché une procédure exceptionnelle pour risque de "violation grave" des valeurs de l'UE, pointant notamment l'appauvrissement du pluralisme médiatique en Hongrie.

Avec AFP