La CDU, le parti chrétien-démocrate de la chancelière allemande, a désigné samedi le centriste et héritier d'Angela Merkel, Armin Laschet, pour en prendre la tête. Sous ses airs affables et bonhommes, le nouveau président des conservateurs allemands est considéré comme un Européen convaincu, fervent défenseur des politiques d'accueil et d'intégration.
Rassurant, peu charismatique, le tenant de la ligne Merkel, Armin Laschet, 59 ans, a été élu samedi 16 janvier président du parti conservateur CDU, en Allemagne. "Il inspire confiance car il a une bonne expérience de chef de gouvernement régional, estime Hélène Miard-Delacroix, professeur à la Sobonne, dans un entretien à France 24. Il est celui qui est le plus dans la continuité d'Angela Merkel, de centre-droit, très européen".
Avec une majorité de 521 voix des 1 001 délégués appelés à voter, Armin Laschet devance Friedrich Merz (466 voix), rival historique de la chancelière et favorable à un coup de barre à droite, selon les résultats d'un scrutin interne, et se positionne en vue de mener le camp conservateur aux élections générales en septembre."Je veux que nous réussissions ensemble et que nous fassions en sorte que l'Union" soit portée à la chancellerie en septembre, a-t-il réagi après sa victoire.
Une élection stratégique
Cette élection est décisive pour l'avenir de l'Allemagne : le vainqueur est en effet en bonne position pour mener le camp conservateur aux élections de septembre et succéder à Angela Merkel, au pouvoir depuis 2005
Armin Laschet revient de loin : donné favori il y a près d'un an au lancement de la course pour le remplacement d'Annegret Kramp-Karrenbauer, démissionnaire, sa cote a fondu en raison de sa gestion jugée hésitante de la crise sanitaire.
Armin Laschet dirige depuis 2017 le land de Rhénanie-du-Nord-Westphalie, le plus peuplé d'Allemagne où il s'est vu reprocher son manque de détermination dans la lutte contre la pandémie.
À tel point que son co-listier à la présidence du parti, le ministre de la Santé Jens Spahn, a fini par lui faire de l'ombre, gagnant en popularité à la faveur de la crise.
Une politique d'intégration libérale des migrants
Ce père de trois enfants est vu comme un modéré proche de la chancelière, dont il entend maintenir le cap centriste. "Une rupture avec Angela Merkel serait exactement le mauvais signal", a-t-il déclaré, estimant que cela ouvrirait notamment un boulevard aux Verts, principaux adversaires de la CDU pour les élections à venir.
Il fut l'un des rares à la soutenir sans réserve après sa décision d'accueillir des centaines de milliers de migrants de Syrie ou d'Afghanistan en 2015.
Ses convictions sur cette question sensible ne datent pas d'hier. Sa politique d'intégration libérale alors qu'il était ministre régional en 2005 lui a valu le surnom d'"Armin le Turc" au sein de la CDU.
La diversité ethnique n'est pas "une menace, mais un défi et une chance", déclarait-il en 2009.
Européen passionné
L'ancien journaliste se présente aussi comme un "Européen passionné". Après cinq années au Bundestag, il se frottera directement à la politique de l'UE entre 1999 et 2005, en tant que député à Bruxelles spécialisé dans les questions de sécurité et de politique internationale.
À cet égard, il dit admirer Charlemagne, le "père de l'Europe" dont le centre de l'empire carolingien était situé à Aix-la-Chapelle, lieu de naissance d'Armin Laschet.
Un buste doré du grand homme trône sur son bureau. Une récente biographie à son sujet assure d'ailleurs que la famille Laschet n'exclut pas de descendre du célèbre empereur, ce qui lui a valu des commentaires amusés dans les médias.
Si ses qualités de rassembleur ont souvent été louées, il souffre d'une image de responsable "indécis, agissant parfois de manière irréfléchie" qui font douter de sa capacité à diriger la première économie européenne, écrivait récemment le quotidien Süddeutsche Zeitung.
Ce qui se reflète dans sa faible popularité. Selon le dernier baromètre vendredi de la télévision publique ZDF, seulement 28% des personnes interrogées estiment qu'il a la carrure d'un chancelier. Quand le chef du gouvernement bavarois conservateur Markus Söder, auréolé de son image de gestionnaire résolu de crise, recueille 54%.
Critiques
Lors de la première vague de la pandémie, Armin Laschet avait notamment rejeté dans un premier temps des mesures strictes de restrictions, avant de faire volte-face en imposant le premier confinement local du pays suite à l'émergence d'un vaste foyer d'infection dans un abattoir.
Il fut aussi vertement critiqué pour avoir affirmé que les travailleurs est-européens employés par cette entreprise avaient importé le virus, avant de s'excuser.
Plus récemment, il a dû se défendre d'accusations de népotisme concernant des commandes par son gouvernement régional de masques et équipements de protection confectionnés par une entreprise de textile locale.
Car son fils Johannes, dit "Joe", un influenceur de mode, avait fait de la publicité pour cette marque sur son blog.
Avec AFP