Le premier vol commercial direct entre Israël et le Maroc est arrivé, mardi, à Rabat en provenance de Tel-Aviv. Le président américain, Donald Trump, avait annoncé la normalisation de leurs relations diplomatiques le 10 décembre dernier. Ce premier pas vers un rapprochement entre les deux pays devrait être suivi par la signature d'une série d'accords bilatéraux.
Le premier vol commercial direct entre Israël et le Maroc s'est posé, mardi 22 décembre, à Rabat en provenance de Tel-Aviv, premier acte significatif de la récente reprise des relations entre les deux pays sous l'égide des États-Unis.
Accompagné du conseiller spécial à la sécurité de Benjamin Netanyahu, Meir Ben Shabbat, le gendre de Donald Trump, Jared Kushner, se trouvait à bord de l'avion de la compagnie israélienne El Al baptisé 555, en référence à la "main de Fatima" associée au chiffre 5, qui habille l'appareil pour se prémunir du "mauvais œil".
Le Maroc est devenu le quatrième pays arabe à annoncer cette année une normalisation de ses relations avec Israël sous l'impulsion de l'administration Trump, après les Émirats arabes unis, Bahreïn et le Soudan.
Jusque-là, les quelque 50 000 à 70 000 touristes qui venaient chaque année d'Israël - pour beaucoup originaires du Maroc - devaient passer par d'autres pays pour se rendre dans le royaume.
Le Maroc compte toujours la plus importante communauté juive d'Afrique du Nord - environ 3 000 personnes - et reconnaît dans sa Constitution son "affluent hébraïque".
"Le Maroc a un rôle historique dans le rapprochement des peuples dans la région", a déclaré au quotidien Al Ahdath Al Maghribia Jared Kushner, architecte du plan Trump pour le Moyen-Orient dénoncé par les Palestiniens.
Soutien de Donald Trump sur la question du Sahara occidental
Ce vol doit être suivi par la signature d'accords bilatéraux. Une déclaration tripartite, signée mardi à Rabat, récapitule les différents engagements des uns et des autres : ouverture d'un consulat américain à Dakhla, (sud du Sahara occidental), aide américaine au développement de l'ancienne colonie espagnole, rétablissements de relations diplomatiques entre Israël et Maroc, développement de la coopération économique et ouverture de vols directs entre les deux pays.
Les États-Unis ont promis trois milliards de dollars de "soutien financier et technique à des projets d'investissement privés" au Maroc et en Afrique subsaharienne "en coordination avec des partenaires marocains", dans un mémorandum d'entente signé mardi.
En acceptant de relancer officiellement ses relations avec Israël, le Maroc a obtenu en contrepartie que le président Trump reconnaisse sa "souveraineté" sur le Sahara occidental, une ex-colonie espagnole que lui disputent depuis des décennies les indépendantistes du Front Polisario, soutenus par l'Algérie.
Jared Kushner a ainsi répété avec force le soutien du président Trump au Maroc sur cette question. "En reconnaissant la souveraineté marocaine sur le Sahara occidental, le président Trump a rejeté les statu quo ratés qui ne bénéficiaient à personne, et à la place, il a mis en route une solution durable et mutuellement acceptable", a affirmé M. Kushner au cours d'une conférence de presse.
"Une vraie autonomie est la seule option faisable, mais cela prendra du temps et nous appelons toutes les parties à s'engager de façon constructive auprès des Nations unies pour avancer dans les négociations", a-t-il dit. Le Polisario, lui, veut l'indépendance et demande que soit organisé le référendum d'autodétermination prévu par l'ONU.
L'accord propose d'ailleurs l'ouverture d'un consulat américain au Sahara occidental et un programme d'investissement américain - que la presse marocaine assure colossal -, la réouverture de bureaux diplomatiques à Tel-Aviv et Rabat, fermés au début des années 2000 après le déclenchement de la deuxième intifada, et le développement de la coopération économique bilatérale.
Le roi Mohammed VI en faveur de "la cause palestinienne juste"
Comme le Sahara occidental, le soutien aux Palestiniens est considéré comme une "cause nationale" au Maroc.
Peu après l'annonce de la reprise des relations le 10 décembre, le roi Mohammed VI avait assuré au président de l'Autorité palestinienne, Mahmoud Abbas, la poursuite de "l'engagement permanent et soutenu du Maroc en faveur de la cause palestinienne juste".
Si la reconnaissance américaine de la "marocanité du Sahara" a été largement saluée dans le royaume, deux manifestations pro-palestiniennes ont été interdites la semaine dernière à Rabat.
Une coalition, regroupant une trentaine d'associations et de partis d'extrême gauche marocains, a dénoncé, mardi, la visite de la "délégation sioniste", en appelant à manifester contre et à "résister à la normalisation" avec l'État hébreu.
Les Palestiniens s'opposent à la normalisation des relations entre Israël et le monde arabe, en estimant qu'elle aurait dû se faire après un accord de paix israélo-palestinien et non avant.
"Pont culturel"
Israël, qui compte des centaines de milliers de juifs d'origine marocaine, et le Maroc avaient déjà entretenu des relations officielles à la fin des années 1990.
Selon des sources officielles israéliennes, il s'agit désormais de "rétablir" des relations qui existaient déjà pour atteindre des "relations diplomatiques pleines".
Les relations entre la communauté juive et le Palais royal au Maroc, et entre la communauté marocaine et le gouvernement israélien ont servi de "pont culturel" aux nouveaux accords, selon ces mêmes sources.
Le Maroc revendique "l'affluent juif" de son histoire, inscrit dans sa Constitution de 2011. Sous l'impulsion de Mohammed VI, plusieurs programmes de réhabilitation des cimetières, synagogues et quartiers historiques juifs ont été lancés.
Présente au Maroc depuis l'Antiquité, la communauté juive a crû au cours des siècles, notamment avec l'arrivée des Juifs expulsés d'Espagne par les rois catholiques à partir de 1492.
Elle a atteint environ 250 000 âmes à la fin des années 1940, soit environ 10 % de la population, avant de baisser drastiquement après la création d'Israël en 1948.
Nombre d'entre eux continuent de revenir dans le royaume retrouver la terre de leurs ancêtres, célébrer des fêtes religieuses ou effectuer des pèlerinages.
Avec AFP