Alpha Condé, qui briguait à 82 ans un troisième mandat consécutif malgré des mois de contestation meurtrière, a été réélu avec 59,49 % des voix président de la Guinée, a annoncé samedi la commission électorale. Son principal opposant, Cellou Dalein Diallo, entend contester "ce hold-up électoral" devant la justice.
Le président guinéen sortant Alpha Condé, ex-opposant historique, a été désigné vainqueur de l'élection présidentielle avec 59,49 % des voix, a annoncé samedi 24 octobre la commission électorale.
Le candidat Cellou Dalein Diallo, principale figure de l'opposition, a annoncé dans la foulée qu'il contesterait devant la justice cette victoire d'Alpha Condé, dans un entretien accordé à l'AFP. "Nous allons protester contre ce hold-up électoral par la rue", a-t-il déclaré, bloqué dans son domicile de Conakry par la police. "Nous allons quand même saisir la Cour constitutionelle, sans se faire trop d'illusions."
Cellou Dalein Diallo avait dénoncé le 20 octobre "une fraude à grande échelle" visant à le priver de la victoire lors de ce scrutin présidentiel. Celui qui s'est proclamé vainqueur de la présidentielle avant la publication des résultats a obtenu 33,5 % des suffrages, selon la commission électorale.
Le secrétaire général de l'ONU Antonio Guterres a, quant à lui, appelé samedi à une "solution pacifique" par le "dialogue" de la crise post-électorale en Guinée, demandant au président réélu Alpha Condé et à son adversaire Cellou Dalein Diallo d'empêcher "la violence".
"Le secrétaire général exhorte également les leaders d'opinion et la presse à mettre un terme à tous discours incendiaires et appels à la dissension d'inspiration ethniciste", a déclaré son porte-parole dans un communiqué.
Âgé de 68 ans, Cellou Dalein Diallo, battu par Alpha Condé en 2010 et en 2015, a proclamé sa victoire en se fondant sur les données remontées par ses partisans, envoyées dans les bureaux de vote pour ne pas s'en remettre à la commission électorale et à la Cour constitutionnelle, inféodées au pouvoir selon lui. Il a revendiqué 53 % des suffrages.
Les opposants à Condé "ne renonceront pas aux manifestations"
Une forte présence policière était visible, samedi, dans la capitale Conakry lors de l'annonce de la commission électorale, a constaté un journaliste de l'AFP.
Cette semaine, la Guinée a vécu une escalade de violences post-électorales qui ont fait au moins une dizaine de morts : l'armée a été réquisitionnée et de nouveaux affrontements ont eu lieu entre les forces de sécurité et les partisans de Cellou Dalein Diallo.
Dans un communiqué, le parti de Cellou Dalein Diallo, l'Union des forces démocratiques de Guinée (UFDG), a affirmé que "le bilan provisoire de ces exactions inouïes était […] de 27 morts et de près de 200 blessés par balles", sans qu'il soit possible d'obtenir un bilan des violences de source indépendante.
"L'UFDG et ses alliés ne renonceront pas aux manifestations dans les rues et sur les places publiques pour protester contre ce hold-up électoral", ajoute le communiqué du parti.
Climat de contestation en Guinée depuis un an
La procureure de la Cour pénale internationale (CPI), Fatou Bensouda, a mis en garde samedi les acteurs politiques guinéens, leur rappelant "que quiconque commet[tait], ordonn[ait], incit[ait], encourage[ait] et contribu[ait]" à des crimes tels que définis par les statuts de la CPI, "peut être poursuivi par les tribunaux guinéens ou par la CPI".
L'éventualité d'un troisième mandat consécutif d'Alpha Condé, 82 ans, a provoqué pendant un an en Guinée une contestation dans laquelle des dizaines de civils ont été tués, faisant craindre une éruption autour du vote, dans un pays coutumier des confrontations politiques sanglantes.
En mars, le président sortant avait présenté une nouvelle Constitution dans laquelle il s'engageait à moderniser le pays, mais qui permettait aussi de ne plus limiter à deux les mandats successifs des présidents.
Avec AFP