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Présidentielle en Guinée : les esprits s'échauffent avant l'annonce des résultats officiels

À peine le premier tour de la présidentielle passé, le camp de Cellou Dalein Diallo, le candidat de l'opposition, affirme lundi vouloir publier ses propres résultats, sans s'en remettre à la commission électorale. Des manifestations ont eu lieu à Conakry, dimanche soir.

Après un scrutin présidentiel qui semble avoir mobilisé les Guinéens et s'être déroulé dans le calme, dimanche 18 octobre, la tension commence à monter dans le pays. En cause : la publication des résultats par l'opposition alors que la commission électorale (Céni) n'a encore communiqué aucun chiffre.

Le camp de Cellou Dalein Diallo, 68 ans, qui se déclare inquiet de tricheries, a affirmé lundi 19 octobre qu'il publierait des résultats compilés par ses soins avec les données remontées de tout le pays. Il court-circuiterait ainsi la commission électorale ou, ultérieurement, à la Cour constitutionnelle, qu'il juge inféodées.

Dans la nuit, des résultats partiels ont été publiés sur des sites d'information. Des manifestations apparemment spontanées ont été rapportées dans certains quartiers de la capitale Conakry favorables à Cellou Dalein Diallo pour célébrer ce qui serait sa victoire. 

Le parti de Diallo, l'Union des forces démocratiques (UFDG), dit craindre de se faire "voler" la victoire, comme cela fut le cas selon lui en 2010 et 2015, déjà contre Alpha Condé – qui brigue, à 82 ans, un troisième mandat consécutif malgré des mois de contestation meurtrière.

"L'affrontement a été évité de justesse"

Le pouvoir ne cache pas son inquiétude devant les publications anticipées. Le ministère de la Sécurité a martelé qu'elles étaient interdites. "L'affrontement a été évité de justesse" lors des rassemblements de la nuit, a-t-il indiqué.

Dans un possible signe de fermeté, la Haute autorité de la communication a suspendu pour un mois le site d'information GuinéeMatin.com, coupable selon un communiqué lu à la télévision nationale d'avoir diffusé en direct sur les réseaux sociaux des opérations de dépouillement.

Devancer la Céni reviendrait à mettre de "l'huile sur le feu", a souligné dimanche soir le Premier ministre Kassory Fofana, qui est aussi directeur de la campagne du président sortant. "C'est créer les conditions d'une situation de dégradation qui va échapper à tout contrôle", a-t-il mis en garde.

L'UFDG dit craindre de "se faire voler la victoire"

"Les bureaux de vote affichent les résultats par bureau de vote. À partir du moment où c'est affiché, c'est un résultat public. Donc l'UFDG va publier les résultats. Si nous sommes gagnants, nous défendrons notre victoire (...) Nous n'attendrons pas la Cour constitutionnelle, nous n'attendrons pas la Céni", a assuré l'un de ses responsables, Ousmane Gaoual Diallo.

Devant les premières publications, le parti d'Alpha Condé a accusé dans un communiqué l'UFDG de chercher à usurper la victoire. Or celle-ci "est quasiment impossible si nous observons les tendances qui nous parviennent. Pour preuve, leur leader a été lamentablement battu dans son propre bureau de vote".

Une proclamation d'un résultat global par les organes électoraux officiels devrait être "l'affaire d'une semaine", a estimé le Premier ministre. L'UFDG compte aller beaucoup plus vite.     

Un second tour, s'il doit avoir lieu, est programmé le 24 novembre. Avant même le début de la comptabilisation, l'opposition a commencé à dénoncer des bourrages d'urnes et des obstructions faites à la présence de ses représentants dans des bureaux de vote. Le gouvernement a fait état d'incidents sans grande gravité.

Un an de contestation civile contre un 3e mandat d'Alpha Condé

Pendant des mois, l'opposition s'est mobilisée contre la perspective d'un troisième mandat d'Alpha Condé. La contestation, lancée en octobre 2019, a été durement réprimée. Des dizaines de civils ont été tués.

Le nombre de mandats présidentiels est limité à deux. Mais pour Alpha Condé, la Constitution qu'il a fait adopter en mars pour, affirme-t-il, moderniser le pays remet son compteur à zéro. La campagne, acrimonieuse, a été émaillée d'invectives, d'incidents et de heurts qui ont fait plusieurs blessés entre militants.

Ancien opposant historique devenu en 2010 le premier président démocratiquement élu après des années de régimes autoritaires, Alpha Condé revendique d'avoir redressé un pays qu'il avait trouvé en ruines et d'avoir fait avancer les droits humains.

Cellou Dalein Diallo propose de "tourner la page cauchemardesque de dix ans de mensonges", fustigeant dérive autoritaire, répression policière, corruption, chômage des jeunes et pauvreté.

Avec AFP