![#JusticePourJoyce : le Québec s’indigne après la mort d’une autochtone victime de racisme #JusticePourJoyce : le Québec s’indigne après la mort d’une autochtone victime de racisme](/data/posts/2022/07/25/1658760993_JusticePourJoyce-le-Quebec-s-indigne-apres-la-mort-d-une-autochtone-victime-de-racisme.jpg)
Une femme autochtone a été la cible d'insultes racistes par des membres du personnel soignant, peu avant son décès dans un hôpital près de Montréal. Les propos tenus à l'encontre de Joyce Echaquan et sa disparition ont suscité un vive émoi au Québec, où les politiques sont appelés à lutter contre ce "racisme systémique".
Des hurlements. Une respiration haletante. Un appel à l’aide. "Venez me chercher, quelqu’un, venez me chercher !" Pendant plusieurs minutes, Joyce Echaquan, une Québécoise de la communauté Atikamekw, s’est filmée en direct sur Facebook, alors qu’elle se trouvait sur une civière à l’hôpital de Joliette, à environ 70 kilomètres de Montréal. Hospitalisée quelques jours plus tôt pour des douleurs à l’estomac, cette femme de 37 ans, mère de sept enfants, n’a reçu comme réponse que des injures racistes.
"Esti d’épaisse de tabarnak, [putain de débile, NDLR]. T’as-tu fini de niaiser, t’as-tu fini, là ? Câlisse !", peut-on entendre dans la vidéo de la bouche d’une infirmière, qui se moque de ses supplications. Joyce Echaquan est décédée peu après, lundi 28 septembre, à la suite d'un malaise cardiaque.
⚠️Attention, ces images peuvent choquer. Cette vidéo diffusée par Joyce Echaquan peu de temps avant sa mort montre la...
Publiée par Journal Métro sur Mardi 29 septembre 2020Comme le raconte le site de Radio-Canada, la jeune femme a tenté désespérément d’expliquer qu’elle était surmédicamentée. Fragile du cœur, elle craignait une réaction allergique à la morphine. "J’aime pas ça qu’on me dise que je niaise là-dessus", a-t-elle dit avant que l’une des infirmières ne réplique : "Ben, t’as fait des mauvais choix, ma belle !" ou encore "On va s’occuper de toi parce que tu n’es pas capable de t’occuper de toi".
#JusticePourJoyce
Ces images et la mort de Joyce Echaquan ont provoqué une vague d’indignations dans tout le Québec. Sur les réseaux sociaux, les réactions se sont multipliées sous le hashtag #JusticePourJoyce, tandis qu'une veillée d'hommages s’est tenue, mardi, devant l'hôpital de Joliette, rassemblant plusieurs centaines de personnes.
La classe politique québécoise a unanimement condamné les propos entendus dans cette vidéo. Interpellé à ce sujet, le Premier ministre québécois François Legault s’est lui-aussi exprimé, lors d’une conférence de presse. "Il y a du racisme au Québec, il faut combattre ce racisme. L’infirmière, ce qu’elle a dit, c’est totalement inacceptable, et elle a été congédiée. Maintenant de penser que toutes les infirmières ou tout le système de la santé auraient eu cette réaction, tout le monde va dire non", a-t-il affirmé.
Le jeune Lucas, tenant un cadre de sa mère Joyce Echaquan hier soir, à Joliette. #rcinfo #JoyceEchaquan #JusticePourJoyce #justiceforjoyce #manawan #polcan #polqc #autochtones @rc_autochtones @RadioCanadaInfo ???? pic.twitter.com/U45HFJNMhl
— Ivanoh Demers (@ivanohdemers) September 30, 2020"On ne veut plus que ça se reproduise"
Le chef du gouvernement québécois a annoncé l'ouverture de deux enquêtes, l'une des autorités régionales de la santé, l'autre du médecin-légiste, chargé d'enquêter en cas de décès dans des circonstances suspectes ou dues à des négligences. Mais ces propos n’ont pas convaincu.
"J’interpelle les gouvernements, le gouvernement Legault, qui dit qu’il n’y a pas de racisme au Québec, voilà un bel exemple et on ne veut plus que ça se reproduise", a ainsi lancé Viviane Michel, la présidente de Femmes autochtones du Québec, lors de la veillée, comme le relate Radio-Canada.
Dans une vidéo publiée sur Facebook, la chanteuse Elisapie Isaac, figure de la communauté autochtone, s’est aussi adressée en larmes directement à François Legault. "Tu as fait une déclaration dans laquelle tu dis qu’il n’y a pas de racisme systémique dans cette province de Québec, et je me dis 'Tu es né où ?'. Je me dis comment tu peux dire quelque chose comme cela et ne pas reconnaître l’histoire de ton peuple qui est arrivé ici en bateau dans une culture millénaire avec différents territoires, différentes langues et cultures autochtones ?".
"Tu as une responsabilité d’être là aussi pour nous", a poursuivi l’artiste avant de lancer des pistes de réflexion sur une meilleure prise en compte des communautés autochtones. "On s’impatiente avec vous, avec votre gouvernement".
Cher Premier Ministre Dear Prime Minister Legault #JusticePourJoyce #JusticeForJoyce #OrangeShirtDay ????
Publiée par Elisapie sur Mercredi 30 septembre 2020Un rapport sans conséquence
Le journal Le Devoir rappelle d’ailleurs la publication, il y a un an, d’un rapport d'une commission d'enquête publique sur les relations entre les Autochtones et certains services publics au Québec. Dans ce texte, "le juge Viens indiquait déjà qu’il est ‘impossible de nier la discrimination systémique dont sont victimes les membres des Premières Nations et les Inuits dans leurs relations avec les services publics’. Il ajoute qu’’à la lumière de nombreux témoignages citoyens, force est d’admettre que les préjugés envers les Autochtones demeurent très répandus dans l’interaction entre les soignants et les patients’, et que ‘de [son] point de vue […], les voix entendues sont assez nombreuses pour affirmer que les membres des Premières Nations et les Inuits ne se sentent pas en sécurité lorsque vient le temps de mettre leur santé entre les mains des services publics’".
Le quotidien constate que, depuis, "rien n’a été fait" et que cela est "outrageant". Il met en parallèle le massacre perpétué dans l’école polytechnique de Montréal le 6 décembre 1989, au cours duquel 14 jeunes femmes avaient été assassinées. Selon Le Devoir, il avait fallu 30 ans pour "admettre qu’il s’agissait bien d’un attentat antiféministe". Alors que les femmes autochtones subissent "une violence systémique" et que rien n’évolue, le journal s’interroge : "Faudra-t-il encore 30 ans, pour sortir de ce déni collectif ? Combien de Joyce Echaquan cela nous prendra-t-il encore pour agir ?".