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De nouveaux affrontements ont opposé, pour le deuxième soir consécutif à Minsk, les autorités biélorusses à des manifestants protestant contre la réélection du président Alexandre Loukachenko. Plusieurs personnes ont été interpellées et un manifestant a été tué par un engin explosif qu'il comptait lancer sur les forces de l'ordre.

La tension est à nouveau montée d'un cran en Biélorussie. Des heurts ont opposé, lundi 10 août, à Minsk et dans d'autres villes, pour le deuxième soir consécutif, la police à des manifestants protestant contre la réélection du président Alexandre Loukachenko.

Un manifestant a été tué par l'engin explosif qu'il s'apprêtait à lancer sur les forces de l'ordre, et qui a explosé dans ses mains, selon la police.

Coups de pied et de matraque

La foule, moins importante que dimanche soir lors de précédentes protestations, scandait "Honte !" et "Longue vie à la Biélorussie". Les manifestants ont fait face à d'importantes forces policières qui ont donné sans ménagement des coups de pied et de matraque aux protestataires.

Un témoin et plusieurs médias russes et biélorusses ont fait état de l'utilisation de gaz lacrymogène, de tirs de balles en caoutchouc et de grenades assourdissantes par les forces de l'ordre.

Au moins un journaliste a été blessé à la jambe. Plusieurs autres personnes ont été blessées, selon la police, qui a également annoncé avoir procédé à des arrestations de manifestants.

Dans la nuit, des barricades ont été érigées dans des rues centrales de Minsk, marquant une escalade des tensions, et plusieurs explosions se sont fait entendre, selon des journalistes de l'AFP.

Svetlana Tikhanovskaïa injoignable

Au pouvoir depuis 1994, Alexandre Loukachenko a été réélu avec plus de 80 % des voix, ont annoncé les autorités de l'ancienne république soviétique. Sa principale opposante, Svetlana Tikhanovskaïa, a rejeté les résultats officiels, demandant au président de céder le pouvoir. "Le pouvoir doit réfléchir à comment nous céder le pouvoir. Je me considère vainqueur", a affirmé l'opposante de 37 ans, à qui la Commission électorale a attribué environ 10 % des suffrages.

Si elle a accusé le régime de "se maintenir par la force" après la répression des manifestations dans la nuit de dimanche à lundi, Svetlana Tikhanovskaïa ne rejoindra pas d'éventuelles nouvelles protestations, alors que des appels en ce sens circulent en ligne. "Elle ne participera pas (...) puisque le pouvoir pourrait organiser n'importe quelle provocation pour l'arrêter", a indiqué la porte-parole de la candidate, Anna Krassoulina. Svetlana Tikhanovskaïa était par ailleurs injoignable dans la soirée, son équipe ne sachant pas où elle se trouvait.

La nuit précédente, des dizaines de personnes avaient été blessées à Minsk. Des milliers de protestataires avaient essuyé des tirs de grenades assourdissantes et de balles en caoutchouc par la police.

Paris appelle les autorités à "la plus grande retenue"

Face aux appels à manifester lundi soir diffusés sur les réseaux sociaux malgré l'accès limité à Internet depuis dimanche, la police a bouclé le centre de Minsk, notamment aux environs du monument de la Stela, épicentre des violences de la veille. Les stations de métro étaient fermées, et les forces antiémeute étaient présentes en nombre.

La France a appelé, lundi, les autorités biélorusses à "la plus grande retenue", après la répression violente de l'opposition dimanche soir. "Nous observons avec inquiétude la violence qui a été opposée aux citoyens biélorusses sortis manifester après la clôture des bureaux de vote, et appelons à la plus grande retenue", a déclaré un porte-parole du ministère français des Affaires étrangères.

La Maison Blanche s'est dite aussi "grandement préoccupée" par la réélection d'Alexandre Loukachenko, appelant le gouvernement "à respecter le droit à se rassembler pacifiquement et à s'abstenir de faire usage de la force". De même, le Royaume-Uni a appelé le gouvernement biélorusse à "s'abstenir de nouveaux actes de violence" à la suite de l'élection présidentielle, dont il dénonce les "graves irrégularités".

Les manifestants, des "moutons"

De son côté, la Russie a salué la réélection d'Alexandre Loukachenko, tout comme le président vénézuélien Nicolas Maduro, qui félicite le chef de l'État, lui reconnaissant une "victoire incontestable".

Moscou a néanmoins dénoncé des interpellations de journalistes russes et réclamé la libération de 33 Russes présentés depuis fin juillet par Minsk comme des mercenaires travaillant avec l'opposition.

Le président biélorusse a pour sa part qualifié les manifestants de "moutons" téléguidés depuis Londres, Varsovie et Prague, martelant qu'il ne permettrait pas que le pays soit "mis en pièces".

Avec AFP et Reuters