Les stars du championnat nord-américain de basket s'entraînent depuis plusieurs jours dans une atmosphère de quarantaine à Disney World, à Orlando. Les 22 clubs de la NBA ont élu domicile en Floride et y disputeront à huis clos la suite de la saison à partir du 30 juillet, sur fond de Covid-19 et d'engagement contre les violences policières.
La saison de NBA s'est interrompue le 11 mars à la suite de l'annonce du test positif au Covid-19 du joueur français Rudy Gobert. Plus de quatre mois après cette mise à l'arrêt, elle va reprendre le 30 juillet prochain par un match entre les Utah Jazz, l'équipe du pivot tricolore, et les Pelicans de la Nouvelle-Orléans.
Alors que le virus continue de se propager aux États-Unis, la ligue nord-américaine de basketball a déployé de grands moyens pour sauver financièrement son championnat sans mettre en danger ses stars. Depuis début juillet, les joueurs de 22 clubs sont arrivés en Floride pour participer à un camp d'entraînement ultra-sécurisé avant de disputer la suite de la saison à huis clos. Ils se sont installés à Disney World, dans la ville d'Orlando : une véritable "bulle" censée les protéger du Covid-19 et dont la facture s'élève à 150 millions de dollars.
Un règlement et des contrôles stricts
À son arrivée, chaque joueur a subi un dépistage dans une zone de quarantaine spécialement aménagée, alors même que la Floride est devenue l'un des principaux foyers de coronavirus dans le pays. Ils ont ensuite été soumis à un nouveau test 24 heures plus tard pour être autorisés à accéder notamment aux restaurants de l'hôtel. Ils doivent également porter une bague permettant de connaître leur état de santé en temps réel avec prise du pouls, de la température, de la fréquence respiratoire et calcul de l'activité et du sommeil. Cette technologie est censée déterminer la probabilité de développer le Covid-19 avant même d'avoir le moindre symptôme.
Belinelli shows off the ID bracelets players will wear on the resort out in Disney, FL. #nba #gospursgo #nbatwitter pic.twitter.com/VaiAgZwKDN
— JeffGSpursZone (@JeffGSpursZone) July 10, 2020Un règlement d'une centaine de pages a ainsi été rédigé, et malheur à celui qui ne le respecte pas. Selon la chaîne sportive ESPN, Bruno Caboclo des Houston Rockets est sorti de sa chambre sans autorisation et a écopé de huit jours de quarantaine supplémentaire avant de pouvoir revenir à l'entraînement. L'intérieur des Kings de Sacramento Richaun Holmes a lui aussi dû s'excuser sur son compte Twitter pour être sorti des limites autorisées afin de récupérer une livraison de nourriture.
Malgré ces mesures très strictes, cette mise en "bulle" n'a pas suscité l'adhésion de tous les joueurs. "Je n'aime pas l'idée, je n'ai toujours pas confiance", a ainsi expliqué Joel Embiid, star des 76ers de Philadelphie. Le centre camerounais a même envisagé de ne pas jouer, mais il a finalement choisi de ne pas laisser tomber ses coéquipiers dans leur quête d'un titre NBA.
Joel Embiid on concerns going into Orlando:
“I’m not a big fan of the idea. But then again, I’m going to do my job. I’m not going to let the city down. I’m going to represent my city, my family, my teammates - that’s what I’ve always done.” #Sixershttps://t.co/v7pIJGfGIH pic.twitter.com/1OcTptsRJe
De son côté, la vedette des Bucks de Milwaukee, Giannis Antetokounmpo, s'est dit prêt à reprendre le chemin des parquets, même s'il a expliqué que c'était un sacré défi étant donné le contexte : "Vous allez quelque part sans votre famille pendant trois, quatre mois, et vous n'avez pas joué au basket pendant trois mois et demi, quatre mois", a-t-il estimé. Le titre reviendra donc "à celui qui le veut le plus, qui est le mieux préparé mentalement à tout ça, à ce qui se passe à Orlando", selon le joueur grec, qui participe à la très bonne saison des Bucks, équipe ayant remporté le plus de matches lors de la saison régulière. En tête de la conférence Est (les clubs américains sont divisés au sein de deux grandes zones dites Est et Ouest) juste avant la pause liée au coronavirus, avec un bilan de 53 victoires pour seulement 12 défaites, l'équipe de Milwaukee figure parmi les favoris pour atteindre le titre.
Le joueur français Evan Fournier s'est lui aussi rangé à l'avis général et a retrouvé ses coéquipiers d'Orlando Magic. Comme il l'a confié à l'AFP, l'international français pense toutefois que le vainqueur de la saison bénéficiera d'un sacre au rabais : "Les choses sont un peu faussées. À la limite, pour les futurs champions, ce n'est pas juste. Eux se seront démontés pour gagner et ils seront moins respectés qu'un vrai champion après une saison complète. Alors, bien sûr, cette équipe sera une très bonne équipe, mais elle n'aura pas eu le parcours normal qui mène à un titre NBA."
Arrivé le 7 juillet dans l'enceinte de Disney World, Evan Fournier fait vivre à ses abonnés sur Twitter son quotidien dans la bulle. Après avoir reconnu que la nourriture était meilleure que ce qu'il avait imaginé, il a expliqué que ce camp d'entraînement lui rappelait ses préparations avec l'équipe de France, avant de raconter avec humour qu'il n'y avait dans son hôtel qu'une piscine pour six équipes.
Dans notre hotel on est 6 equipes pour une piscine. Cest une sausage partie le bordel.
— Evan Fournier (@EvanFourmizz) July 13, 2020Une reprise sportive sous fond de contestation raciale
De nombreux basketteurs sont aussi préoccupés par la situation politique aux États-Unis et le mouvement Black Lives Matter. Après des semaines de manifestation en réponse à la mort de Georges Floyd, un Afro-Américain décédé lors de son arrestation par des policiers, plusieurs joueurs veulent poursuivre la mobilisation. Le pivot des Lakers Dwight Howard a même hésité pendant un temps à reprendre le chemin des parquets de peur de s'éloigner de la lutte contre les violences policières. "Oui, je vais rejoindre mon équipe à Orlando. Mais à côté de cela, nous ferons de grandes choses", a expliqué le joueur de 34 ans qui a décidé de reverser la totalité de son salaire pour la reprise, environ 700 000 dollars, à son association Breathe Again pour la justice sociale. "Je suis obligé. J'ai un engagement contractuel envers les Lakers, mes coéquipiers et les fans. Cependant, j'ai aussi un engagement envers ma famille et ma communauté", a ajouté le coéquipier de la superstar Lebron James.
Certains de ses camarades porteront des messages au dos de leur maillot lors de la reprise de la NBA, comme la ligue les y a autorisés parmi une trentaine de slogans, tels que "I Can't Breathe" ("Je ne peux pas respirer"), Justice, Peace (paix), Equality (égalité), Freedom (liberté) ou Anti-Racist.
#BlackLivesMatter pic.twitter.com/ELiopQMx7k
— x - Miami HEAT (@MiamiHEAT) July 14, 2020Mais plusieurs joueurs ont exprimé leur frustration à propos de cette liste, comme LeBron James, qui a laissé entendre qu'il aurait aimé avoir son mot à dire sur ces messages et a choisi de conserver son nom sur son maillot, ou Evan Fournier, qui a critiqué le fait d'établir une liste, mais a choisi de porter le mot "Justice".
L'Association des joueurs de la NBA (NBPA) va ainsi s'associer avec la marque de vêtements du joueur Russell Westbrook pour concevoir des t-shirts comportant des messages de justice sociale, dont certains n'ont pas été approuvés par la ligue pour la reprise, a rapporté dimanche le média The Athletic.
À l'approche de ce retour à la compétition, quelques joueurs manquent toutefois à l'appel. Eric Bledsoe, le meneur des Milwaukee Bucks, a annoncé vendredi qu'il ne pouvait pas rejoindre son équipe dans la "bulle d'Orlando" car il a contracté le coronavirus. "Je suis asymptomatique et je me sens bien", a toutefois déclaré le joueur de 30 ans. "Lorsque je serai en ordre avec les protocoles mis en place par la NBA, j'ai hâte de rejoindre mes coéquipiers à Orlando", a ajouté Bledsoe. Avant lui, d'autres joueurs de la NBA ont aussi été testés positifs, dont Russel Westbrook (Houston), Kevin Durant (Brooklyn), Marcus Smart (Boston) ou encore Harrison Barnes (Sacramento).
Le patron de la NBA, Adam Silver, a affirmé, lors d'un entretien à Time, que la saison serait stoppée si les cas de coronavirus se multipliaient à Orlando, tout en assurant que reprendre dans la "bulle" de Disney World restait l'option "la plus sûre".
Un calendrier revisité
Si tout se passe bien, à partir du 30 juillet, le calendrier prévoit jusqu'à sept matches par jour, avec des coups d'envois entre 12 h et 21 h sur trois terrains différents. Vingt-deux équipes sont concernées par cette fin de championnat : aux huit premières de chaque conférence (Milwaukee, Toronto, Boston, Miami, Indiana, Philadelphie, Brooklyn, Orlando à l'Est ; Lakers, Clippers, Denver, Utah, Oklahoma City, Houston, Dallas, Memphis à l'Ouest) s'ajoutent six clubs se trouvant à six matches ou moins de la 8e place dans chaque conférence (La Nouvelle-Orléans, Phoenix, Portland, Sacramento, San Antonio à l'Ouest, et Washington à l'Est).
Chacun équipe jouera huit matches de la saison régulière. Après quoi, le tableau des play-offs sera presque connu, puisque les sept premiers de chaque conférence seront directement qualifiés. Le 8e et dernier sésame fera, à l'Est comme à l'Ouest, l'objet d'un éventuel barrage. Les play-offs se dérouleront ensuite de façon classique au meilleur des sept rencontres, pour un couronnement final le 13 octobre au plus tard.