
L'Algérie a enterré les restes de 24 combattants anticoloniaux remis par la France dans le carré des "martyrs", alors qu'Alger attend toujours des excuses de Paris pour solder le passé douloureux de la colonisation.
En ce jour anniversaire de son indépendance, l'Algérie a procédé dimanche 5 juillet à l'inhumation des restes de 24 combattants algériens tués au début de la colonisation française et remis par la France.
Les 24 crânes ont été enterrés dans la matinée lors d'obsèques solennelles au cimetière d'El Alia, le plus grand d'Algérie, en présence du président Abdelmadjid Tebboune.
Situé dans la banlieue est d'Alger, il abrite le "carré des martyrs de la Révolution algérienne", où reposent l'émir Abdelkader, héros de la première résistance antifrançaise et les grandes figures de la guerre d'indépendance (1954-1962). Les 24 cercueils, recouverts du drapeau national, ont été mis en terre dans un carré de quatre rangées sur six, près des tombes des anciens chefs d'État algériens. Une compagnie de la Garde républicaine, un corps d'élite, a présenté les armes. Des élèves officiers ont lentement exécuté une marche au pas funèbre.
Depuis leur arrivée, vendredi, sur le sol algérien, les cercueils étaient restés exposés au Palais de la culture, où une foule nombreuse s'est déplacée tout au long de la journée de samedi, afin de rendre un dernier hommage à ces premiers résistants rapatriés après 170 ans.
Ces restes mortuaires étaient entreposés depuis le XIXe siècle dans les collections du Muséum national d'histoire naturelle de Paris. Parmi les têtes des rebelles les plus illustres des débuts de la colonisation, figurent celles de cheikh Bouziane, le chef de l'insurrection des Zibans, dans l'est de l'Algérie, en 1849, et de ses compagnons d'armes. Capturés par les Français, ils avaient été fusillés puis décapités. Les crânes étaient considérés comme des "trophées de guerre" par les militaires français.
Colonisée pendant 132 ans (1830-1962), l'Algérie avait demandé officiellement la remise des crânes – plusieurs dizaines –, et d'archives coloniales en janvier 2018.
Des "demi-excuses"
Leur restitution par la France est un signe fort d'un dégel dans les relations entre l'Algérie et l'ancienne puissance coloniale, marquées depuis 1962 par des polémiques récurrentes et des crispations."Ce geste s'inscrit dans une démarche d'amitié et de lucidité sur toutes les blessures de notre histoire", a commenté l'Elysée.
Dans un entretien diffusé samedi sur France 24 , Abdelmadjid Tebboune s'est félicité du retour de ces restes et espère d’autres gestes en ce sens. Après ce qu’il qualifie de "demi-excuses" de la France pour les crimes commis pendant la période coloniale, le chef de l’État algérien espère que Paris formulera de véritables excuses.
Le président algérien Abdelmadjid Tebboune a déclaré, samedi, sur FRANCE 24, qu'«avec le président Macron nous pouvons aller loin dans l'apaisement, dans le règlement du problème de la mémoire».
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Les députés algériens viennent d'adopter une loi "historique" instaurant une Journée de la mémoire, le 8 mai, en souvenir des massacres de 1945 commis par les forces françaises à Sétif et dans le Constantinois.
Alger veut aussi remettre sur la table le dossier des "disparus" pendant la guerre d'indépendance (1954-1962), plus de 2 200 selon Alger, et celui des essais nucléaires français dans le Sahara algérien qui "ont fait et continuent à faire des victimes".
Avec AFP