L'Ours d'or de la 70e Berlinale a été attribué au cinéaste iranien Mohammad Rasoulof pour "There is No Evil", un film sur la peine de mort. Le réalisateur, dissident, a interdiction de quitter son pays.
Le jury présidé par Jeremy Irons a remis le prix le plus important de la Berlinale à un absent. Au terme d'une 70e édition aux accents très politiques, la Berlinale a attribué, samedi 29 février, l'Ours d'or à "There is No Evil" du réalisateur iranien Mohammad Rasoulof. Dissident politique, le cinéaste a interdiction de quitter son pays.
En effet, ce dernier avait déjà été primé en 2017 à Cannes pour "Un homme intègre". Un film qui lui avait valu une condamnation, en 2019, à deux ans d'interdiction de quitter le territoire et une peine de prison.
Joint par téléphone après la cérémonie, le réalisateur semblait heureux mais fatigué. "Le film est sur des personnes prenant la responsabilité de leurs actes. Le plus difficile quand vous prenez une décision est de la justifier", a-t-il affirmé.
Interdiction de tourner
Son film, le dernier présenté des dix-huit en compétition, traite en quatre séquences de la peine de mort, un thème tabou en Iran, vue par les bourreaux et par les familles des victimes.
Alors que Rasoulof s'était aussi vu interdire de tourner, il a fallu user de subterfuges pour réaliser le film. "Mohammad en parlait il y a quatre mois, à ce moment, on ne savait pas s'il irait en prison : on a donc décidé de faire au plus vite", a expliqué son producteur Farzad Pak, aux côtés de Baran Rasoulof, actrice et fille du réalisateur. Il a également tenu à saluer devant la presse le courage de toute l'équipe "qui a mis sa vie en danger pour être dans le film".
Sujets politiques, et polémiques
Confortant sa dimension engagée, la Berlinale a également récompensé du grand prix du jury "Never rarely sometimes always", de l'Américaine Eliza Hittman. Un drame traitant de l'avortement. Le film d'Eliza Hittman remporte donc le grand prix du jury (Ours d'argent). Sans verser dans le pathos, il suit les traces d'Autumn, 17 ans, qui se rend à New York avec sa cousine pour avorter.
La scène la plus forte est celle où une assistante sociale l'interroge sur d'éventuelles violences qu'elle aurait pu subir, selon une échelle allant de "jamais" à "toujours", donnant son titre au film.
À noter l’Ours d’argent de la 70e Berlinale attribué au film français des très baroques Benoît Delépine et Gustave Kervern, "Effacer l’historique (à l'heure des réseau sociaux)".
Bon ben voilà. Deux ours avec un ours. pic.twitter.com/FMEeSIzhmd
— Gustave Kervern (@GustaveKervern) February 29, 2020"Il y a des sujets très en vue aujourd'hui, mais nous devons faire nos choix sur la base de l'histoire, sur la façon dont le film fonctionne avec un public", avait prévenu Jeremy Irons, interrogé au sujet du mouvement #MeToo.
Après la réapparition d'une interview où il tenait des propos jugés sexistes, l'acteur de 71 ans a dû faire une mise au point au premier jour du festival. Il a alors affiché son soutien au droit à l'avortement, au mariage gay et aux mouvements défendant les femmes contre le harcèlement.
Mais cette polémique n'est pas la seule qui a assombri les débuts du festival. Des révélations sur le passé nazi d'un ancien directeur de la Berlinale ont notamment contraint la nouvelle équipe dirigeante à transformer le Prix Alfred-Bauer en Ours d'argent.
Avec AFP