Andrea Nahles, la présidente du Parti social-démocrate allemand, a annoncé dimanche sa démission, une semaine après le cinglant revers de sa formation aux européennes. Son départ déstabilise un peu plus la coalition gouvernementale d'Angela Merkel.
En Allemagne, la coalition gouvernementale est de nouveau ébranlée. Andrea Nahles, la cheffe du Parti social-démocrate (SPD), a annoncé, dimanche 2 juin, sa démission, une semaine après la débâcle de sa formation aux européennes. Ce départ représente un nouveau coup dur pour la chancelière Angela Merkel, à la tête d’un parti en difficulté (l'Union chrétienne-démocrate, CDU ) et d’une coalition gouvernementale toujours plus fragilisée.
Un score historiquement bas
La démission d’Andrea Nahles n’est pourtant pas une surprise. La présidente du SPD cristallisait les critiques depuis le revers de son parti aux élections européennes le 26 mai . Largement devancé par les Verts (qui avaient réuni plus de 20 % des suffrages), le parti de centre-gauche n’avait lui recueilli que 15 % des voix. Du jamais-vu depuis la création du parti, en 1875.
Dans un communiqué, l’ex-cheffe du SPD en tire donc les conséquences : "Les discussions au sein du groupe parlementaire et les nombreuses réactions du parti m'ont montré que je n'ai plus le soutien nécessaire à l'exercice de mes fonctions."
Deux jours avant un vote en interne qui devait sceller son sort, Andrea Nahles, première femme à avoir dirigé le SPD, jette l’éponge, et renonce par la même occasion à son mandat de députée.
Le risque pour Angela Merkel ? Une accélération, par effet domino, de la décomposition du gouvernement, un an après la prise de fonction d’Andrea Nahles, malmenée par des frondeurs partisans d’une sortie de la coalition CDU-SPD au pouvoir.
Quitter l’alliance avec la CDU ?
Inquiète, l'Union chrétienne-démocrate d’Angela Merkel est à la manœuvre pour maintenir son partenaire junior dans son giron.
À l'occasion d'une brève allocution en marge d'une réunion de son parti, dimanche, la chancelière allemande s'est pourtant dit déterminée à poursuivre le travail de son gouvernement. "Ce que je veux dire au nom du gouvernement, c'est que nous allons continuer notre travail avec tout notre sérieux et surtout notre sens des responsabilités" a-t-elle insisté.
Un message que sa dauphine présumée, et dirigeante du CDU, Annegret Kramp-Karrenbauer (surnommée AKK), avait martelé quelques minutes avant elle.
Du côté du SPD, on réfléchit de plus en plus sérieusement à quitter l'alliance formée avec la CDU, au risque de provoquer des élections anticipées et un départ prématuré de la chancelière, dont le mandat s'achève en 2021.
Les sociaux-démocrates avaient prévu de trancher la question en septembre, à mi-mandat et autour de scrutins régionaux qui s'annoncent difficiles dans trois Länder (régions) de l'ancienne Allemagne de l'Est où l'AfD (parti d’extrême droite) espère dépasser la CDU.
La "GroKo", coalition gouvernementale formée dans la douleur début 2018 avec un SPD récalcitrant, naviguant de crise en crise, semble donc plus menacée que jamais.
L’heure du bilan et de la remise en question semble avoir sonné pour le Parti social-démocrate. Lundi 27 mai, Kevin Künhert, responsable des Jeunes du parti, et deux autres figures de l'aile gauche du mouvement avaient pris la plume pour exiger que le SPD impose un virage à gauche, ou qu’il claque la porte du gouvernement "si nécessaire" avant la fin de la législature.
"Nous n'avons pas pris un abonnement avec la droite" pour gouverner ensemble, écrivaient-ils dans leur appel.
La dirigeante de la CDU elle aussi sur la sellette
Pour ajouter à l'ampleur de la crise, aucun successeur ne s'impose pour remplacer Andrea Nahles à la tête du SPD.
Certains noms peu connus du public circulent, tout comme celui de Martin Schulz – l'ex-président du Parlement européen –, pourtant marginalisé après sa défaite face à Angela Merkel aux dernières législatives.
Quoi qu'il en soit, les deux partis structurant le paysage politique allemand, SPD et CDU, semblent sauter main dans la main vers l’inconnu. Car l’avenir n’est pas plus clair du côté du parti conservateur d’Angela Merkel.
AKK, la cheffe de l'Union chrétienne-démocrate, est elle aussi en difficulté depuis les élections européennes. Bien qu’arrivée en tête, la CDU a en effet réalisé un score historiquement faible.
La dirigeante a par ailleurs multiplié les faux pas et est aujourd’hui fortement contestée en interne, un an seulement après avoir succédé à Angela Merkel à la tête du parti.
Face à la CDU et au SPD, qui creusent leurs différences sur le fond depuis des mois, sur des thèmes stratégiques tels que la lutte contre le changement climatique, les Verts tirent leur épingle du jeu et poursuivent leur ascension. Samedi dernier, ils sont passés pour la première fois en tête des intentions de vote au niveau national (27 %), devant la CDU (26 %), très loin devant le SPD (12 %).
Avec AFP