Le parti d’extrême droite de Matteo Salvini a renforcé, dimanche, son emprise sur le gouvernement populiste au pouvoir en Italie. La Ligue a largement remporté les élections européennes avec 34,3 % des voix, selon les résultats quasi-définitifs.
En Italie, l’extrême droite est arrivée en tête des élections européennes de dimanche 26 mai. Selon des résultats quasi-définitifs, la Ligue de Matteo Salvini réalise un score de 34,3 %, soit son meilleur résultat obtenu, et de loin, lors d'un scrutin national.
"C’est un bond spectaculaire pour le parti de Matteo Salvini", observe Natalia Mendoza, correspondante de France 24 à Rome qui rappelle que "lors des dernières élections européennes, la Ligue avait obtenu 6 % du consensus".
"Merci", a réagi le vice-Premier ministre italien et ministre de l'Intérieur, en affichant dimanche soir sur son compte Twitter une photo le montrant tout sourire brandissant une affiche avec les mots : "1er parti d'Italie, merci".
Una sola parola: GRAZIE Italia! ???????? pic.twitter.com/PEmaNvCpNJ
Matteo Salvini (@matteosalvinimi) 26 mai 2019La Ligue dépasse désormais largement son allié au gouvernement, le Mouvement 5 Étoiles (M5S, antisystème, eurosceptique), grand perdant du scrutin de dimanche avec un score de 17 % des voix, après le dépouillement de plus de 99 % des bulletins. "L’année dernière, le M5S avait remporté les élections générales avec 32 % des voix et aujourd'hui il serait le troisième parti du pays", détaille Natalia Mendoza, qui note "l’extrême volatilité de l’électorat italien".
La Ligue lâchera-t-elle son allié, le M5S ?
Le rapport de forces déjà très déséquilibré en faveur de la Ligue est désormais acté dans les urnes. Les interrogations sur la survie du gouvernement actuel se multiplient. "La Ligue demande de voter pour elle pour les élections européennes ou pour provoquer une crise de gouvernement lundi matin ?", s'est ainsi ouvertement interrogé le chef de file du M5S, Luigi Di Maio.
Prenant la parole dans la nuit de dimanche à lundi depuis le siège de son parti à Milan (nord), Matteo Salvini a toutefois assuré que le gouvernement irait de l'avant. Les européennes ? "Ça ne change rien en Italie", a-t-il réaffirmé, reprenant presque mot pour mot ce qu'il avait déclaré plus tôt dimanche et sa promesse d'aller jusqu'au bout de la législature, en 2023.
Mais s'il ne semble pas question, au moins pour l'instant, de lâcher son allié du M5S avec qui les relations sont pourtant exécrables depuis des semaines, il a toutefois clairement imposé l'agenda du gouvernement pour les prochaines semaines.
"J'appelle à une accélération du programme de gouvernement", a lancé Matteo Salvini. Et d'énumérer quelques mesures phares de la Ligue : réduction des impôts, renforcement de la sécurité ou autonomie régionale. La Ligue réclame aussi de choisir le prochain commissaire italien dans le futur exécutif européen, a confirmé un de ses responsables, Riccardo Molinari.
S'il n'arrive pas à imposer ses vues, Matteo Salvini pourrait être tenté de provoquer des élections anticipées. Le bon résultat de l'autre parti d'extrême droite, Fratelli d'Italia (FdI, "frères d'Italie"), qui a obtenu environ 6 % des voix, pourrait l'y inciter.
"Il y a toujours la possibilité de mettre sur pied un centre-droit compact", a indiqué dimanche soir un des responsables de ce parti, Fabio Rampelli. La Ligue s'était présentée en mars 2018 aux côtés de FdI et de Forza Italia (FI, centre-droit), le parti de l'ancien Premier ministre Silvio Berlusconi. Cette coalition n'avait toutefois pas obtenu la majorité des sièges, incitant alors la Ligue à se tourner vers le M5S.
Un groupe eurosceptique à Bruxelles
Forza Italia a de son côté obtenu quelque 8,8 % des voix dimanche, selon ces mêmes résultats, et Silvio Berlusconi, 82 ans, n'a cessé d'appeler Matteo Salvini à lâcher son allié actuel pour relancer cette coalition.
Pour la journaliste de France 24 Natalia Mendoza, "l’objectif de Matteo Salvini à Bruxelles est de créer un groupe uni, de regrouper l’ensemble de la galaxie d'ultradroite nationaliste eurosceptique au Parlement européen. Pour cela, on l'a vu démarcher plusieurs leaders de différents pays. Il a réussi avec notamment l’AfD en Allemagne ou le Parti du peuple danois ou le Parti des vrais Finlandais. Il s’agit avec ce groupe de faire bouger le centre de gravité politique de l'Europe vers la droite, de pouvoir faire pression sur le groupe des conservateurs pour durcir un certain nombre de politiques, notamment sur l’immigration."
La journaliste rappelle toutefois que "la tâche ne sera pas facile. Parmi ces groupes d’extrême droite des différents pays européens, les divergences sont nombreuses entre les partisans de l’économie de marché et les partisans du patriotisme économique, ceux qui défendent les racines chrétiennes de l’Europe et ceux qui prônent la laïcité. L’Italie, par exemple, prône la redistribution des migrants, ce dont ne veulent pas entendre parler les pays de l’est de l’Europe."
Avec AFP