Au Soudan, les militaires ont annoncé mardi que leur chef Abdel Fattah al-Burhane dirigerait le futur conseil conjoint avec les civils. Cette décision pourrait crisper les meneurs de la contestation, pour qui le pouvoir doit être remis aux civils.
Les militaires au pouvoir au Soudan ont annoncé mardi 30 avril que leur chef, le nouvel homme fort du pays, Abdel Fattah al-Burhane, prendrait la tête du futur conseil conjoint avec les civils, au risque d'exacerber les tensions dans les discussions avec les meneurs de la contestation.
Le mouvement de contestation au Soudan a dans la foulée appelé à une marche d'un million de manifestants jeudi afin de réclamer une nouvelle fois l'instauration d'un pouvoir civil.
Les relations entre les deux camps se sont tendues, les militaires affirmant que six membres des forces de sécurité ont été tués dans des heurts avec les manifestants, tandis que l'Association des professionnels soudanais (SPA), fer de lance de la contestation, les a accusés d'avoir tenté de disperser le sit-in qui se tient depuis le 6 avril devant le QG de l'armée à Khartoum.
Les militaires ont réfuté les accusations de la SPA et réaffirmé mardi qu'ils "n'utiliseraient pas la violence contre les manifestants".
Le Soudan est le théâtre d'un mouvement de contestation populaire déclenché le 19 décembre par le triplement du prix du pain, qui a conduit à la destitution par l'armée le 11 avril du président Omar el-Béchir, aujourd'hui incarcéré.
Blocage des discussions
Les protestataires réclament désormais la dissolution du Conseil militaire de transition qui lui a succédé et le transfert du pouvoir à une administration civile.
Les deux camps sont parvenus samedi à un compromis avec la création d'un conseil conjoint, mais les discussions achoppent désormais sur sa composition et le nombre de ses membres.
Ce conseil deviendrait l'autorité suprême du pays et serait chargé de former un nouveau gouvernement civil de transition pour gérer les affaires courantes et ouvrir la voie aux premières élections post-Béchir.
Mardi, le général Salah Abdelkhalek, membre du conseil militaire, a annoncé que le chef de cette instance, Abdel Fattah al-Burhane, serait "le chef du (futur) Conseil souverain".
Les discussions sur le conseil conjoint devaient reprendre mardi, avait indiqué lundi le général Chamseddine Kabbachi, un porte-parole du conseil militaire.
Il avait précisé que les deux camps s'étaient néanmoins mis d'accord sur la réouverture de routes et de chemins de fer bloqués par les manifestants autour du QG de l'armée.
Mais l'Alliance pour la liberté et le changement (ALC), qui regroupe les partis politiques et groupes de la société civile à la tête de la contestation, ont nié tout accord dans ce sens.
Et elle a appelé les manifestants à maintenir leur sit-in ainsi que les barricades à Khartoum, prévenant les militaires que "les sit-ins et les marches continueraient jusqu'à ce que les objectifs de la révolution soient atteints".
"Pillages, violences"
"Ces barricades nous protègent. Nous ne voulons pas que des véhicules militaires entrent dans la zone du sit-in", a expliqué un manifestant à l'AFP.
Bien décidés à ne pas partir, des protestataires sont assis sur ces barricades, brandissant le drapeau du Soudan. D'autres surveillent depuis les toits aux alentours d'éventuels mouvements de troupes, selon un témoin.
Chamseddine Kabbachi a dénoncé tard lundi des "pillages, de violences sur des citoyens, de routes bloquées, d'attaques contre les forces de sécurité et d'entraves empêchant les trains de transporter des produits essentiels".
Avec AFP