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"Le corps incarcéré" récompensé au festival Visa pour l'image

Le récit multimédia "Le corps incarcéré", réalisé par les équipes du site Le Monde.fr, remporte le premier prix FRANCE 24/RFI du webdocumentaire au Festival du photojournalisme Visa pour l'image de Perpignan.

Pour sa 21e édition, le festival Visa pour l’image, rendez-vous annuel du photojournalisme international, se met à l’heure d’Internet et s’ouvre, pour la première fois, au webdocumentaire.

En partenariat avec RFI, FRANCE 24 a lancé dans ce cadre un concours qui récompense ce nouveau support médiatique. Le jury, présidé par Samuel Bollendorff de l’agence L’œil public, a décerné son premier prix à l’œuvre réalisée par Le Monde interactif, intitulée "Le corps incarcéré", récit multimédia qui traite de la vie de détenus français et de la façon dont l’expérience carcérale a marqué leur corps.

Au cœur de ce projet se trouve la "volonté politique de voir en quoi la prison parlait de la France et de la société française, mais aussi la volonté éditoriale (…) de consacrer de l’énergie et de l’argent au webdocumentaire, qui donne une nouvelle vie aux photos", explique à FRANCE 24 Soren Seelow, co-auteur du "Corps incarcéré".

Cinq mois de travail ont été nécessaires à la petite équipe du Monde.fr, coordonnée par Boris Razon, son rédacteur en chef, pour finaliser le projet. Un journaliste, Soren Seelow, un photographe, Léo Ridet, et les réalisateurs Bernard Monasterolo, Éric Dedier et Karim el-Hadj y ont été associés.

Voyage dans l’intimité carcérale

"Le corps incarcéré" est le récit du "rapport de force entre un homme et le système pénitentiaire", raconte Soren Seelow. C’est aussi un voyage dans l’intimité des prisonniers. Ou de ce qu’il en reste…

Au premier clic, des lettres blanches apparaissent sur les parois sales de la prison de Mont-de-Marsan. Puis l’on entend le bruit d’une clé dans une serrure, une grille qui claque, des pas qui résonnent. La caméra zoome sur un couloir vide et l’internaute se trouve plongé dans l’univers carcéral français. Un monde clos, sans horizon, où le corps est privé de sa liberté.

Les prisonniers livrent ce qu’ils ont de plus intime : leur corps, enfermé, fouillé, malade. Humilié. La voix d’Hugo, 56 ans, dont 29 passés en prison, accompagne les photos d’un maton, l’œil collé au judas d’une porte, et d’un homme forcé à se déshabiller en public. "Le corps est livré en pâture", dénonce Hugo.

Sur fond d’images en noir et blanc, quatre anciens détenus, Hugo, Hélène, Hafed et Djemel, témoignent des conditions physiques de leur incarcération.

"Le corps se trouve au centre d’une lutte entre l’administration pénitentiaire et le détenu. La première tente de le mettre sous dépendance, de rythmer ses journées avec des horaires, de l’infantiliser. Le second va, lui, essayer de se le réapproprier à travers la musculation, le tatouage et tout un tas d’autres pratiques, pour se reconstituer en tant qu’individu", explique Soren Seelow.

Un nouveau champ des possibles

La remise du prix FRANCE 24/RFI honore un nouveau genre journalistique. Sous forme de récit vidéo linéaire, diaporama sonore ou documentaire interactif, le webdocumentaire exploite les multiples possibilités du Web, sans être toutefois strictement codifié.

"Nous sommes au début d’une nouvelle écriture documentaire et nous avons cherché à récompenser celle qui tentait de pousser le plus loin la réflexion sur les nouvelles formes de récit journalistique sur le Web", explique Samuel Bollendorff.

Si son modèle économique reste à définir, le webdocumentaire gagne, à Perpignan, une réelle reconnaissance professionnelle.