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La famille d’Adama Traoré tente de relancer l’enquête avec une nouvelle expertise

La famille d'Adama Traoré, un jeune homme noir mort après une course-poursuite avec la police en juillet 2016, a fourni à la justice un nouveau rapport d'expertise médicale qui contredit les conclusions de l'enquête.

La famille d'Adama Traoré, persuadée que le jeune homme noir est mort à la suite de violences policières, ne perd pas espoir de relancer le dossier. Deux ans et demi après le drame, les proches du défunt ont fourni in extremis, lundi 11 mars, une nouvelle expertise médicale. Celle-ci, rédigée par quatre professeurs d'hôpitaux parisiens à la demande des parties civiles, contredit sévèrement les conclusions de l'enquête que les juges ont décidé de clore sans mettre en cause les gendarmes.

Les magistrates parisiennes avaient décidé mi-décembre de boucler leurs investigations sans mettre en examen les trois gendarmes au cœur de l'interpellation de ce jeune homme noir de 24 ans, le 19 juillet 2016 à Beaumont-Sur-Oise (Val-d'Oise), au terme d'une course-poursuite.

Les juges s'appuyaient notamment sur une expertise médicale de synthèse qui concluait que le pronostic vital du jeune homme était "engagé de façon irréversible" avant son arrestation, exonérant les gendarmes de toute responsabilité. Selon les quatre experts mandatés par la justice, c'est une maladie génétique, la drépanocytose, associée à une pathologie rare, la sarcoïdose, qui a entraîné une asphyxie à l'occasion d'un épisode de stress et d'effort.

Une conclusion "médicalement fausse"

Mais les quatre professeurs choisis par la famille, dont deux spécialistes de ces maladies, leur répondent en dénonçant une conclusion "médicalement fausse car elle ne repose que sur des spéculations théoriques sans fondement scientifique, en l'état actuel des connaissances", selon le rapport que l'AFP a pu consulter.

Les médecins vont même jusqu'à accuser leurs confrères d'avoir rendu des "conclusions biaisées sur le plan intellectuel, voire de l'éthique médicale". Ils s'accordent néanmoins avec trois des quatre expertises précédentes pour attribuer le décès d'Adama Traoré à "un syndrome asphyxique aigu", tout en excluant qu'il résulte de son état de santé antérieur. Ils invitent donc à "se poser la question de l'asphyxie positionnelle ou mécanique", ce qui tend vers une mise en cause de la technique d'interpellation des gendarmes.

"Cette expertise démontre clairement que les gendarmes sont mis en cause dans la mort de mon frère", a réagi auprès de l'AFP Assa Traoré, la sœur aînée du jeune homme. "Maintenant, on attend un procès."

Nouvelle audition réclamée

S'appuyant sur cette nouvelle analyse, l'avocat de la famille, Yassine Bouzrou, a réclamé lundi une nouvelle audition des trois gendarmes, dans l'espoir qu'ils soient mis en examen puis renvoyés devant une cour d'assises pour "violences ayant entraîné la mort sans intention de la donner".

Le 19 juillet 2016, la mort d'Adama Traoré avait été constatée près de deux heures après son arrestation dans sa ville de Beaumont-sur-Oise. Interpellé une première fois par des gendarmes qui cherchaient son frère Bagui, le jeune homme avait pris la fuite. Une course-poursuite d'"environ 15 minutes" sous une forte chaleur s'en était suivie, avant qu'il ne soit retrouvé dans un appartement où il s'était caché, puis plaqué au sol et maintenu sous le poids des gendarmes. Il avait ensuite eu un malaise dans leur véhicule avant de décéder dans la cour de la gendarmerie de la commune voisine de Persan.

Depuis le début de l'affaire, qui avait généré cinq nuits de violences dans ce département au nord de Paris, les proches d'Adama Traoré dénoncent sans relâche une interpellation violente, accusant aussi les gendarmes de ne pas avoir secouru le jeune homme, laissé menotté jusqu'à l'arrivée des pompiers.

Avec AFP