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Avec Nancy Pelosi, Donald Trump a trouvé à qui parler

Aux États-Unis, les négociations pour mettre fin au "shutdown" sont rythmées par le bras de fer entre la présidente démocrate de la Chambre des représentants, Nancy Pelosi et Donald Trump, qui a trouvé, en celle-ci, une résistance de taille.

Le "shutdown" dure depuis plus d’un mois désormais aux États-Unis, Donald Trump invective les démocrates sur Twitter, mais Nancy Pelosi reste ferme. Elle répète qu’elle ne cèdera pas face au président américain, qui lui réclame le financement de la construction de son mur à la frontière mexicaine. Et pour la première fois depuis le début de son mandat, Donald Trump n’est plus certain d’obtenir ce qu’il souhaite.

Au contraire, c’est la présidente démocrate de la Chambre des représentants qui semble prendre le dessus dans ce bras de fer. Nancy Pelosi a déjà obtenu une victoire remarquée en contraignant Donald Trump à reporter sine die son discours sur l’état de l’Union. Prononcé tous les ans fin janvier par le président devant l’ensemble du Congrès, celui-ci devait avoir lieu mardi prochain. Mais la représentante démocrate de la Californie a signifié au milliardaire que, pour des raisons de sécurité liées au "shutdown", ce discours devrait attendre la fin du blocage des services fédéraux.

This afternoon, I sent @realDonaldTrump a letter informing him that the House will not consider a concurrent resolution authorizing the President’s State of the Union address in the House Chamber until government has opened. https://t.co/r1oad0xEAh pic.twitter.com/kGEbayx95u

  Nancy Pelosi (@SpeakerPelosi) 23 janvier 2019

Pour le représentant démocrate du Tennessee, Steve Cohen, la manœuvre de Nancy Pelosi est "intelligente pour deux raisons" : "D’abord, Pelosi aurait été assise juste derrière lui [pendant le discours sur l’état de l’Union] et aurait dû rester là sans rien dire pendant qu’il l’aurait rendue responsable du shutdown. Et ensuite, cela lui donne une raison de mettre fin au shutdown, car il adore passer à la télévision et être le centre de l’attention", a-t-il dit au Washington Post.

Donald Trump a bien été obligé de reconnaître sa défaite et a consenti sur Twitter à attendre la fin du "shutdown" pour prononcer son discours, le tout sans la moindre attaque personnelle à l’encontre de Nancy Pelosi.

As the Shutdown was going on, Nancy Pelosi asked me to give the State of the Union Address. I agreed. She then changed her mind because of the Shutdown, suggesting a later date. This is her prerogative - I will do the Address when the Shutdown is over. I am not looking for an....

  Donald J. Trump (@realDonaldTrump) 24 janvier 2019

....alternative venue for the SOTU Address because there is no venue that can compete with the history, tradition and importance of the House Chamber. I look forward to giving a “great” State of the Union Address in the near future!

  Donald J. Trump (@realDonaldTrump) 24 janvier 2019

"Une femme de pouvoir qui ne va pas se laisser intimider par Trump"

Le ton employé par le président américain lorsqu’il parle de la "speaker" de la Chambre des représentants est d’ailleurs le signe du respect qu’il lui accorde. Alors qu’il surnomme volontiers ses adversaires politiques par des qualificatifs péjoratifs – pendant la campagne électorale, Hillary Clinton était notamment devenue "Crooked Hillary" ("Hillary la corrompue") et le républicain Ted Cruz avait été rebaptisé "Lying Ted" ("Ted le menteur") – Nancy Pelosi est généralement appelée par son simple prénom dans les tweets du président américain.

"Elle ne se contente pas d’être plus habile que lui, elle le rend également furieux", estime Michael Cornfield, professeur de management politique à l’université George Washington de Washington, interrogé par le Guardian. "Elle se moque de lui. Elle est le matador et lui le taureau. Et il n’a aucune idée de ce qu’il doit faire", poursuit-il.

Le bras de fer sur le "shutdown" et le financement du mur offre en tout cas un aperçu des affrontements politiques à venir lors des deux prochaines années. Femme politique expérimentée, élue pour la première fois au Congrès en 1987, Nancy Pelosi, 78 ans, se voit "comme une législatrice experte" qui a réussi à gravir les marches du monde politique américain, car elle est capable de "prendre des coups".

"Elle a tellement d’expérience et a été attaquée si souvent qu’elle est aujourd’hui pleine d’assurance, affirme dans le Washington Post une stratège démocrate. C’est une femme de pouvoir qui sait l’utiliser et qui ne va pas se laisser intimider par ce que peut dire Trump à son égard. Ça n’est pas un souci pour elle, et cela lui permet de prendre des initiatives que d’autres auraient peur de poursuivre." Au-delà du "shutdown", le match Pelosi-Trump promet donc de faire des étincelles.