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Inondations, pluies torrentielles ou encore montée des eaux : une nouvelle étude, publiée lundi, souligne que les catastrophes climatiques ne vont pas seulement augmenter dans le futur, mais qu’elles risquent de frapper simultanément au même endroit.
La Californie brûle, connaît une période d’intense sécheresse et de fortes chaleurs. Ce cumul d’événements climatiques extrêmes qui frappent l’État américain constitue encore un phénomène rare. Mais au rythme actuel du réchauffement climatique, ces événements destructeurs concomitants sont appelés à se multiplier et à toucher un nombre croissant de personnes, à en croire une étude publiée dans la revue Nature Climate Change, lundi 19 novembre.
Une équipe pluridisciplinaire de scientifiques a établi que la moitié de la population mondiale risquait de subir entre trois et six catastrophes climatiques majeures en même temps en 2100, si rien n’est fait pour ralentir les émissions de gaz à effet de serre.
Sécheresse, manque d’eau et canicule pour Paris
L’étude retient dix aléas climatiques – comme la sécheresse, les précipitations intenses, les feux, ou encore la montée du niveau des eaux – dont la science peut prévoir avec une relative assurance l’évolution d’ici la fin du siècle. Dans un monde où la pollution continuerait au rythme actuel, la région de New York risquerait de souffrir, en même temps, des effets de la montée des eaux, de pluies intenses, d’ouragans ainsi que de sécheresse. L’Île-de-France serait, quant à elle, frappée de sécheresse, de manque d’eau potable et de canicule. Si les États mettent tout en œuvre pour lutter contre la montée des températures, le nombre de ces catastrophes climatiques simultanées baisserait à une seule pour New York, comme pour Paris.
Les zones qui risquent de payer le tribut le plus lourd à la multiplication d’événements climatiques extrêmes en série sont les régions côtières et tropicales. Ce sont aussi elles qui "connaissent les hausses de populations parmi les plus importantes au monde", souligne Sylvie Joussaume, chercheuse au Laboratoire des sciences du climat et de l’environnement (LSCE) du CNRS, jointe par France 24.
L’équipe de scientifiques qui a réalisé l’étude a même mis au point une carte interactive permettant d’explorer un futur placé sous le signe des catastrophes naturelles simultanées. "Il faut faire attention à cette notion de simultanéité, et savoir de quel laps de temps on parle vraiment", prévient Sylvie Joussaume. En 2100, le nord du Danemark, par exemple, serait frappé en même temps par une sécheresse et d’intenses précipitations. Impossible ? En réalité, ces catastrophes se dérouleraient plutôt sur un "temps très court, d’environ un an", précise au New York Times Camilo Mora, chercheur à l’université d’Hawaï et auteur principal de cette étude.
L’originalité de ce travail scientifique réside dans le fait qu’il "met en lumière l’exposition de chaque région à des risques climatiques croisés, alors que les études scientifiques se concentrent généralement sur un seul phénomène", explique Valérie Masson-Delmotte, membre du GIEC (Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat) et du CNRS, contactée par France 24.
467 façons de pâtir des catastrophes
En ne se limitant pas seulement aux effets, par exemple, des ouragans ou de la montée des eaux, ces nouvelles prévisions "procurent aussi un cadre plus complet pour trouver des manières de faire face à cette nouvelle réalité climatique", poursuit la spécialiste du climat. Elle rappelle que jusqu’à présent, les autorités se préparaient à une éventuelle catastrophe en regardant ce qui s’est déjà passé. Mais l’étude démontre que le réchauffement climatique doit pousser les responsables à anticiper, en plus, de nouveaux scénarios climatiques dans lesquels leur région serait frappée par plusieurs catastrophes simultanées.
Ce message aux décideurs est d’autant plus important que l’article de Nature souligne les 467 façons différentes dont les aléas de la nature affectent l’humanité. "Ces chercheurs ont fait un travail impressionnant pour lister tous les cas répertoriés dans la littérature scientifique qui démontrent un impact négatif d’un événement climatique sur notre société", remarque Sylvie Joussaume. Ils ont trouvé 890 occurrences depuis les années 1980, ensuite cataloguées en 467 catégories.
Un inventaire qui contient des effets connus tels que les décès, les famines, les destructions d’infrastructures ou encore les conflits pour des ressources naturelles devenues plus rares. Mais d’autres conséquences sont rarement évoquées, comme la solastalgie, une détresse psychique due aux changements d’environnements qu’on a toujours connus et qui peut survenir lorsqu’une sécheresse transforme totalement le paysage. Les scientifiques listent aussi tous les cas avérés où des inondations ou des vagues de chaleur ont pu exacerber la violence ou accentuer les inégalités entre les sexes.
Si ces conséquences sont toutes liées à des événements météo, cela "ne veut pas dire qu’elles ont toute pour origine le réchauffement climatique", note Sylvie Joussaume. Les ouragans, les inondations ou encore les canicules ne s’expliquent, en effet, pas tous par la montée des températures. En revanche, il ne fait aucun doute que cette dernière va entraîner une hausse et une intensification de ces catastrophes naturelles aux 467 conséquences néfastes pour l’homme.