L’écrivain français Pierre Guyotat a remporté mardi le prix Médicis pour "Idiotie", son nouveau livre dans lequel il raconte son passage – chaotique – à l’âge adulte dans une langue à la fois crue et ciselée.
Deuxième prix en deux jours pour Pierre Guyotat. L’écrivain français a été désigné, mardi 6 novembre, lauréat du prix Médicis pour "Idiotie", récit de son passage à l’âge adulte. Lundi, l’auteur avait déjà été récompensé du prix spécial du jury du prix Femina pour l'ensemble de son œuvre.
"Cette ‘Idiotie’ traite de mon entrée, jadis, dans l'âge adulte, entre ma dix-neuvième et ma vingt-deuxième année, de 1959 à 1962", a résumé l'auteur de "Tombeau pour cinq cent mille soldats", âgé aujourd'hui de 78 ans.
Le récit commence à l'automne 1958. Le jeune Guyotat, âgé d'à peine 18 ans – et donc encore mineur –, a quitté Lyon pour Paris, persuadé que c'est dans la capitale qu'il pourra accomplir son destin de poète. Son père, médecin, a lancé un détective privé à ses trousses.
La vie est rude. Il dort sous le pont de l'Alma. Avec sa langue à la fois crue et ciselée, Pierre Guyotat nous régale de tableaux animés d'un Paris populaire qui n'est plus.
Hanté par la guerre d'Algérie
En 1961, alors que son premier texte ("Sur un cheval") vient d'être accepté par les Éditions du Seuil, il est appelé sous les drapeaux pour servir en Algérie.
Son esprit réfractaire ne fait pas bon ménage avec la discipline militaire. Dans des pages terribles, l’écrivain décrit les tabassages, vexations des gradés et séjours au cachot. "Notre soumission, l'ignorance où l'on nous tient de tout ce qui est et vient, c'est un cauchemar dont, sortant de l'enchantement de la sottise, il faut se réveiller et rire..."
Ramené à la vie civile, Pierre Guyotat reste hanté par "tous les égorgés, tous les mutilés du nez, des lèvres, des oreilles, tous les énucléés, tous les démembrés, tous les désentraillés, tous les traqués abattus, tous les battus à mort, tous les déchiquetés, tous les enflammés, bébés jetés contre les murs, mères enceintes éventrées, toutes les violées, tous les torturés (...) victimes à retardement du crime originel de la conquête".
Avec AFP