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Les jihadistes majoritaires de la province d'Idleb ont annoncé dimanche qu'ils poursuivraient le combat, fragilisant l'accord russo-turc sur la Syrie.

Ils vont poursuivre le combat. Lundi 15 octobre, les jihadistes majoritaires dans la province syrienne d'Idleb occupaient toujours la zone devant être démilitarisée à la frontière turque, après la date-limite prévue pour leur départ par le plan russo-turc, signé entre Moscou et Ankara le 17 septembre 2018 à Sotchi.

"Nous n'abandonnerons pas le choix du jihad et du combat pour réaliser les objectifs de notre révolution bénie, en premier lieu faire tomber le régime criminel", a écrit dans un communiqué Hayat Tahrir al-Cham (HTS), principale alliance jihadiste à Idleb et issue de l'ex-branche syrienne d'Al-Qaïda. "Nous n'abandonnerons pas nos armes", a-t-il affirmé.

De son côté, le chef de la diplomatie syrienne, Walid Mouallem, a affirmé que son pays avait besoin de "temps" pour vérifier la mise en oeuvre de l'accord. "Nous devons donner du temps (...) Nos amis russes doivent juger si l'accord a été appliqué ou pas", a-t-il déclaré lors d'une conférence de presse à Damas avec son homologue irakien Ibrahim Jaafari.

À Idleb, les jihadistes annoncent rester dans la zone démilitarisée

Selon l'Observatoire syrien des droits de l'Homme (OSDH), aucun retrait visible n'a été constaté dimanche avant minuit, malgré l'accord négocié entre la Russie, une alliée du président syrien Bachar al-Assad, et la Turquie, qui soutient les rebelles, afin d'éviter un assaut meurtrier du régime.

Le flou sur l'accord russo-turc

HTS ne dit toutefois pas clairement s'il rejette cet accord conclu le 17 septembre. Dans une référence implicite à la Turquie, le groupe jihadiste indique "apprécier les efforts de tous ceux qui luttent à l'intérieur de la Syrie et à l'extérieur pour protéger les zones libérées (du régime) et empêcher leur destruction ou des massacres". "Mais nous mettons en garde contre la duplicité de l'occupant russe et contre toute confiance dans ses intentions", ajoutent les jihadistes, qui avec d'autres groupes contrôlent plus des deux tiers de la future zone tampon et 60 % de la province.

HTS a "essayé de gagner du temps en évitant de refuser explicitement et d'accepter l'accord", a décrypté Rami Abdel Rahmane, directeur de l’OSDH. Mais Sam Heller, analyste à l'International Crisis Group (ICG), a tweeté que l'annonce de HTS apparaissait comme un "accord tacite du plan de Sotchi".

Le plan russo-turc prévoit une zone démilitarisée pour séparer les territoires du régime Assad de ceux encore tenus par les rebelles et jihadistes, évitant ainsi un assaut et une possible catastrophe humanitaire à Idleb (nord-ouest). Le Front national de libération (FNL), principal groupe rebelle, l'a officiellement endossé et a affirmé avoir totalement retiré ses armes lourdes mercredi dernier, selon la date butoir établie.

Mais samedi soir, plusieurs tirs au mortier venant de la zone tampon ont visé une position militaire à Jourine, dans le nord de la province voisine de Hama, tuant deux soldats, ainsi que des secteurs dans celle d'Alep, selon l’OSDH. L'ONG n'a pas été en mesure de préciser si les tirs avaient été effectués par des rebelles ou par des jihadistes.

Deux scénarios

Le quotidien syrien pro-régime Al-Watan a aussi fait état de bombardements, indiquant que des zones de l'ouest de la province d'Alep avaient été touchées par "des obus de mortier et des tirs d'artillerie lourde censés être retirés de la zone".

Selon l’OSDH, le régime a aussi bombardé par intermittence ces derniers jours la zone tampon. Et de nouveaux bombardements du régime ont été enregistrés dimanche soir sur un secteur situé "dans l'ouest de la zone tampon", rattaché à la province de Hama.

Dans un rapport du centre de réflexion Omran basé en Turquie, le spécialiste de la Syrie, Nawar Oliver, estime que si HTS fait capoter l'accord, deux scénarios sont à envisager : "Soit la Turquie et le FNL lancent une offensive militaire contre HTS, soit la Russie saisit l'occasion avec le soutien du régime et ses alliés pour entrer à Idleb."

Avec AFP