Le journaliste Maxime Lelong a initié la marche pour le climat, grande mobilisation populaire qui se déroule ce samedi 8 septembre à Paris, au lendemain de la démission de Nicolas Hulot. Entretien.
Au téléphone, Maxime Lelong a la voix claire et le propos précis. "Lorsque j’ai entendu Nicolas Hulot parler d’absence d’unité nationale sur la question du climat, je me suis dit que la suite logique serait de lui prouver qu’il se trompe en organisant une vaste mobilisation. Il était 17h lorsque j’ai regardé en replay la séquence qui avait eu lieu le matin même. J’étais donc persuadé que quelqu’un d’autre avait déjà pensé à cette idée mais j’ai été surpris de constater que non. C’est comme ça que je me suis retrouvé à créer cet événement Facebook appelant les Français à descendre dans la rue…"
On l'a connu journaliste et fondateur de 8e étage, média qui propose depuis 2014 de "différencier l’information de l’actualité". Aujourd’hui, le jeune homme de 27 ans est à l’initiative de la marche pour le climat qui se déroule ce samedi à Paris. À la veille de la grande mobilisation à laquelle plus de 27 000 personnes se sont inscrites sur Facebook, ce citoyen qui se dit "un peu dépassé par les événements" s'est confié à France 24.
Êtes-vous surpris par l’engouement suscité par votre initiative ?
Oui et non. En créant cet événement, je ne m’attendais certes pas à un tel succès. Mais si je l’ai créé, c’est bien parce que je me suis dit que je n’étais probablement pas le seul. Probablement pas le seul à avoir été surpris d’entendre un ministre démissionnaire reprocher au peuple son manque d’unité nationale sur la question environnementale. Le succès de cette mobilisation citoyenne en est la preuve. La société civile va sortir dans la rue pour montrer que la problématique du climat est plus que jamais une urgence.
Pensez-vous qu’en ce sens, le geste de Nicolas Hulot va servir la cause ?
Je pense qu’au-delà de l’homme, il y a la preuve d’un échec du système. Qu’il s’agisse de Nicolas Hulot ou de son successeur, l’échec restera le même tant que ce poste de ministre appartiendra à un gouvernement dans lequel le climat n’est pas une priorité. L’objectif de la mobilisation de ce samedi est donc bien d’envoyer un signe fort : celui que le dérèglement climatique ne doit plus être remis en question. En revanche, le fait que Nicolas Hulot estime avoir été bien seul dans la lutte contre le dérèglement climatique en a déçu plus d’un, et à raison. Depuis des années, des associations n’ont pas attendu l’ancien ministre pour travailler sur le terrain en faveur de l’écologie.
Face au succès de la mobilisation, des acteurs de la vie publique ont-ils cherché à récupérer la marche ?
J’ai très rapidement clarifié un point avec ceux qui m’ont contacté : la marche sera avant tout citoyenne. Hors de question que le cortège défile au nom d’une association ou d’un parti politique. Greenpeace, Attac, les Amis de la Terre et d’autres ONG m’ont aidé dans l’organisation de la mobilisation. Mais cette dernière ne peut être revendiqué par un seul d’entre eux. Il s'agit d'un mouvement collectif. Les tentatives de récupération les plus absurdes ont surtout émané de petits partis politiques qui ont tenté de se faire passer pour des associations lambda. Mais nous avons vérifié l’identité de tous avant de les inscrire dans la liste des soutiens.
Vous avez lancé cet événement Facebook en tant qu’anonyme. Pourquoi parlez-vous aujourd’hui à visage découvert ?
J’ai d’abord souhaité dissimuler mon identité afin de faire de la marche pour le climat une impulsion citoyenne. Mais lorsque les suspicions sur le statut de l’organisation sont apparues, notamment de la part de personnes craignant d’avoir affaire à un politique ou à une opération de communication d’une ONG, j’ai préféré révéler mon nom afin que chacun puisse vérifier que j’étais bien un citoyen lambda, qui n’a jamais été encarté quelque part ou affilié à une association.
Par-delà les clivages politique, le climat doit-il être une cause du peuple ?
Aujourd’hui, je pense qu’il est essentiel que l’urgence climatique soit un intérêt transversal à la société, autrement dit que l’on cesse d’envisager cette problématique soit par le prisme associatif, soit par le prisme politique, mais bien par un prisme commun. Finalement, l’intérêt défendu coule de source : nous ne cherchons pas à sauver la planète, qui nous survivra quoiqu’il arrive, mais plutôt les hommes qui l’habitent. Pour continuer à débattre et à faire tout ce que nous adorons faire sur Terre, il faudra bien commencer par défendre notre existence sur celle-ci.