
Plusieurs médias, dont France 24, ont annoncé par erreur, jeudi, le décès du réalisateur Costa-Gavras. Cette fausse nouvelle provient d'un compte monté de toute pièce par un journaliste italien, qui n'en était pas à son coup d'essai.
L’information sur le décès du cinéaste franco-grec Costa-Gavras a été reprise jeudi 30 août par de nombreux médias, dont France 24. Il s’agissait en réalité d’une fausse nouvelle. Contacté par la correspondante de France 24 en Grèce, Alexias Kefalas , le réalisateur a démenti son propre décès.
"Il va très bien. Il s’en est amusé. Il n’a absolument aucun problème de santé. Cela fait partie des pièges des réseaux sociaux, ces faux comptes qui peuvent procurer beaucoup de frayeurs", a-t-elle expliqué sur l’antenne de France 24.

Un récidiviste des fausses nouvelles
La fausse nouvelle a été publiée, jeudi, vers 12 h, sur un compte Twitter présenté comme celui de la nouvelle ministre grecque de la Culture Myrsini Zorba. L'information a été reprise par l’agence de presse américaine AP suivie par de nombreux médias dont le New York Times, la Presse ou encore le Washington Post. Jusqu'à ce que la ministre grecque de la Culture nie en personne être l'auteur de cette publication auprès de l'agence de presse ANA : "Ce n'était pas mon compte, je n'ai pas publié cette nouvelle".
Le faux message annonçant le décès de Costa Gavras. Le journaliste Tommasso Debenedetti a ensuite changé la photo et le nom du compte.
URGENT. I receive now from Paris the news of the death of Greek film director and producer Costa Gavras. Official note to be released soon.
Tommasso Debenedetti (@TDebNews) 30 août 2018Il s’agissait en fait d’un faux compte tenu par un habitué des fausses nouvelles, le journaliste italien Tommasso Debenedetti. Celui-ci a la fâcheuse manie d’enterrer virtuellement des personnalités. À son tableau de chasse sur Twitter, la mort de Mikhaïl Gorbatchev, Bachar al-Assad ou du pape. Il utilise pour cela les mêmes recettes. En 2013, il avait créé un faux compte au nom du romancier John Le Carré pour faire croire au décès de l’écrivain JK Rowling. Plus récemment, en début de semaine, il avait déjà fait circuler la rumeur du décès de Milan Kundera via un compte au nom de Daniel Pennac.
Un faux compte annonçant la mort de Kundera
Une terrible nouvelle. Gallimard m'annonce maintenant que Milan Kundera est mort.
Daniel Pennac (@PennacOfficial) 28 août 2018"Démontrer la fragilité des réseaux sociaux"
Interrogé en 2013 par l’AFP sur le but de sa démarche macabre, il avait expliqué vouloir dénoncer le peu de fiabilité de Twitter, un réseau social dont les informations sont pourtant largement reprises par les médias. "Malheureusement, le journalisme fonctionne sur la vitesse. Une fausse information se répand exponentiellement et quand par exemple un journaliste du New York Times retwitte un message, il lui donne une crédibilité même s'il ne la publie pas. À la fin, tout le monde oublie la source originale", avait-il dénoncé.
"Je veux démontrer la fragilité des réseaux sociaux, où n'importe qui peut être n'importe qui. C'est un danger énorme que je veux dénoncer", martèle-t-il, invitant les journalistes "à être plus prudents, à procéder à toutes les vérifications nécessaires, surtout dans les petits médias, les petites radios ou sites internet qui tombent facilement dans le piège".
"Je ne m'en prends qu'à des personnalités de premier plan qui ont tout à fait les moyens de démentir très vite. Je n'annoncerai jamais la mort d'un écrivain de second rang ou celle de ma voisine de palier", avait-il cependant ajouté.
Comme le raconte les Inrocks, Tommasso Debenedetti s’est spécialisé dans le faux durant l’année 2000, alors qu’il travaillait en Italie pour le compte de plusieurs journaux régionaux : "Au total, il leur vendra des dizaines de fausses interviews (soixante-dix selon ses dires) d’auteurs tels que John Grisham, Avraham Yehoshua, José Saramago, ou encore Mario Vargas Llosa. Ne se contentant pas des écrivains, il a fait encore plus fort : interviewer le pape Benoît XVI, Desmond Tutu, le dalaï-lama, Gorbatchev".
Il sera finalement démasqué dix ans plus tard, lorsqu’un autre journaliste demandera à l’écrivain Philip Roth de commenter ces propos tirés d’une interview avec Tommasso Debenedetti .
Qui sera sa prochaine cible ?