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Violences, intimidations et soupçons de fraude planent sur le scrutin

À deux jours de la deuxième élection présidentielle depuis la chute des Taliban en 2001, l’Afghanistan connaît un regain de tensions. Paris dénonce les violences, alors que les craintes de fraudes massives entachent déjà le scrutin.

Ce mardi, une attaque suicide visant un convoi des forces étrangères présentes en Afghanistan a fait au moins sept morts et 50 blessés. La France a condamné cette attaque et salué la "détermination" du peuple afghan à participer à la campagne électorale, dans une déclaration de son ministre des Affaires étrangères, Bernard Kouchner.

"Je condamne avec la plus grande fermeté l'attentat-suicide perpétré aujourd'hui à la sortie de Kaboul, qui a entraîné la mort de plusieurs personnes", a déclaré Bernard Kouchner. "Cet acte criminel, s'ajoutant aux autres actes de violence commis ces derniers jours, témoigne de la volonté des Taliban, à deux jours des élections présidentielles et provinciales, d'en perturber le bon déroulement", a estimé le ministre.

Plus tôt, ce même jour, les Taliban ont tiré une roquette sur le palais présidentiel et une autre s’est abattue sur le quartier général de la police.

Ce déferlement de violence souligne l’insécurité grandissante dans laquelle vivent les Afghans, à deux jours de la seconde élection présidentielle depuis la chute des Taliban en 2001.

Les forces occidentales, sous l’égide de l’Otan, ont annoncé qu’elles suspendraient toute offensive et se concentreraient sur la protection des civils le jour du scrutin, le 20 août. Les Taliban, qui appellent au boycott des urnes, menacent en effet de perturber le vote.

Dans un e-mail envoyé à l’AFP, les Taliban préviennent que "si un électeur est blessé par les Moudjahidines, il sera tenu pour seul responsable".

Jon Boone, correspondant à Kaboul du journal anglais the Guardian, explique à FRANCE 24 que les régions du sud et du sud-est sont celles où les Taliban ont le plus de chance de mettre leurs menaces à exécution : "Ces régions ont particulièrement soufferts ces cinq dernières années. De nombreux habitants ne prendront pas le risque d’aller voter."

Les électeurs ne se font pas d’illusions

Près de 17 millions de personnes sont inscrites sur les listes électorales et la plupart ont l’intention de se rendre aux urnes jeudi. Le risque abstentionniste fait néanmoins craindre pour la légitimité du scrutin. De même, la fraude pourrait remettre en cause les résultats.

L’ONG Human Rights Watch (HRW) s’inquiète ainsi dans un rapport de "la violence, de la présence de forces de sécurité illégales autour des bureaux de vote, de l’accès inégale aux médias des différents candidats et des conditions de vie des femmes" qui pourrait fausser le résultat.

Pour le journaliste Jon Boone, la commission électorale afghane n’a pas donné les garanties nécessaires à la bonne tenue du scrutin.

Un deuxième tour possible

Le président sortant Hamid Karzaï est donné largement favori de l’élection, mais le candidat Abdullah Abdullah a réalisé une campagne énergique et pourrait s’inviter dans un éventuel second tour. De plus, la popularité de Karzaï n’a cessé de chuter depuis qu’il a accédé au pouvoir il y a huit ans.

La situation de l’Afghanistan s’est améliorée depuis la chute des Taliban en 2001, mais la population reste majoritairement frustrée. Malgré les milliards de dollars de l’aide occidentale, le pays manque toujours de routes, une majorité de la population n’a pas accès à l’électricité, les emplois sont rares et la corruption gangrène la société.

Selon Jon Boone, "le manque de confiance des Afghans dans leurs dirigeants pourrait avoir un impact aussi important que l’intimidation des Taliban sur le vote de jeudi".